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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Léman se sont entendues pour faire cesser une concurrence préjudiciable aux deux.
     
    – Décision intelligente, surtout parce qu’elle est accompagnée d’une harmonisation du service offert aux passagers et des tarifs, remarqua Axel, lui-même actionnaire du Léman .
     
    – Certes, mon ami, mais l’augmentation des tarifs a incité la Régie vaudoise des Postes à abaisser de moitié le prix des places de diligences entre Lausanne et Genève. Et, comme les routes s’améliorent, les gens prennent maintenant plus facilement la poste que le bateau. Tout cela pour vous dire que j’aimerais rendre service dans l’immédiat à l’ami que vous êtes, mais cela me sera difficile pour ne pas dire impossible.
     
    – Je ne demande pas un service à un ami. Je demande un prêt à un banquier, avec intérêt courant, monsieur, dit Axel, un peu agacé par les atermoiements de Laviron.
     
    – Intérêt, intérêt ! Vous me voyez vous prendre des 3 ou 4 pour cent l’an, comme ça se pratique à Genève, dans ce genre d’affaire ! Allons, allons, ce ne serait pas amical, monsieur Métaz. Et puis, si vous voulez mon sentiment, je trouve que le banquier qui pratique ce genre d’avance se conduit un peu comme un usurier.
     
    – Cela se fait, cependant, entre membres d’une même famille, dit Axel, qui aurait pu citer des exemples.
     
    – Ah ! pour moi, s’il s’agissait d’un membre de ma famille, ou même d’un allié très intime, le prêt serait sans intérêt. Peut-être même à fonds perdus, dit Pierre-Antoine Laviron, se penchant vers son interlocuteur et fixant alternativement l’œil droit et l’œil gauche d’Axel, dont le regard bicolore le troublait toujours.
     
    Axel mit lui-même fin à l’entretien en alléguant un rendez-vous. Il lui déplaisait que M. Laviron eût tenté de lui vendre sa fille pour soixante-quinze mille francs !
     
    Le lendemain, comme il se préparait à rentrer à Vevey par le Léman et se trouvait dans le hall de l’hôtel, un commissionnaire lui remit un billet de Juliane Laviron.
     

    « Cher Axel,
     
    » Si vous n’avez rien de plus urgent à faire, accompagnez-moi ce matin à Pregny, chez M. de Sellon, pour visiter le temple de la Paix qu’il a fait construire dans le parc de La Fenêtre. Le porteur me rendra votre réponse. Si c’est oui, je passerai à dix heures à l’hôtel avec le cabriolet de maman. J’espère un oui et vous fais amitié. »
     

    Axel étant d’humeur maussade depuis sa conversation avec le banquier – il avait déjà décliné, la veille, une invitation à souper chez les Laviron – hésita un moment avant de formuler la réponse attendue. Il était un peu las de jouer les chevaliers servants à la mode genevoise, qui n’offrait pas les délices de la vénitienne ! Ah ! si l’on eût été à Venise ! La beauté sans apprêt de Juliane, alliée à un charme primesautier, éveillait, bien sûr, sa convoitise. Une femme ne devient-elle pas encore plus attirante quand elle ignore, ou feint d’ignorer, son pouvoir de séduction ? Mais Liane, comme l’appelait sa mère, inspirait à Axel plus de respect que de désir et bien qu’il ait eu, parfois, le sentiment qu’elle attendait de lui voir prendre l’initiative d’un geste tendre ou d’un baiser, jamais il n’avait été au-delà du baisemain, conduite déjà risquée, puisque la bienséance interdit de baiser la main d’une demoiselle.
     
    Le Vaudois se résolut, enfin, à réclamer une plume et du papier. Il rédigea en quatre mots la réponse que le coursier attendait : « C’est oui, bien sûr. Axel Métaz. »
     
    Puis il fit signe à un valet de remonter dans sa chambre les bagages qu’il venait de descendre et s’assit pour attendre Juliane, en se remémorant ce qu’il savait de l’apôtre de la Paix chez qui elle voulait l’entraîner.
     
    À Genève, le comte Jean-Jacques de Sellon passait pour un aimable utopiste. Il y avait à cela une bonne raison : ce petit-fils du seigneur d’Allaman, représentant de Genève à la cour de Louis XV, croyait à l’établissement de la paix universelle !
     
    Descendant d’une riche famille nîmoise et huguenote, qui avait dû fuir les persécutions suscitées par la révocation de l’édit de Nantes, il avait reçu une éducation de prince, heureusement tempérée par les idées philanthropiques de son précepteur. Au cours de son tour d’Europe, il avait vu trop de gens souffrir de

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