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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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figurants de la fête faisaient partie de la compagnie des voltigeurs que le colonel Vischer devait conduire à Bâle, ce fut l’affolement, puis la désolation. Le comité, qui prévoyait une affluence record les 8 et 9 août, envisageait des modifications au programme quand de braves réservistes de Clarens et de Montreux se présentèrent pour prendre les places des appelés, ce que l’autorité militaire accepta.
     
    Restait à se protéger des sectaires, qui venaient de publier et de répandre une brochure sortie de l’imprimerie Ducloux, à Lausanne. La fête y était condamnée par écrit et, dans leurs propos les plus exaltés, les réveillés parlaient de bacchanale impie, présentaient les déguisements comme provocations païennes et qualifiaient les danses d’incitation au stupre ! Ces calomnies étant très mal reçues par les Veveysans, on pouvait craindre des actes de violence contre les habitués des conventicules. Aussi les milices de Morges et de Lausanne furent-elles mises en alerte.
     
    Deux jours avant la fête, on apprit que des affrontements très meurtriers avaient éclaté près de Prattlen, où les milices citadines s’étaient heurtées aux milices campagnardes. Ces dernières sortaient victorieuses des combats, mais on déplorait soixante-cinq morts et cent treize blessés du côté des citadins, six morts et dix-huit blessés chez les paysans. Ceux-ci paraissaient désormais bien assurés de la partition du canton de Bâle en deux demi-cantons 14 .
     

    Ayant échappé à divers périls, la fête de 1833 bénéficia des faveurs du ciel, d’un soleil éclatant et d’une affluence jamais égalée de mémoire de Veveysan. Pierre Valeyres, qui passait pour le plus apte à juger de la qualité des parades, des danses et des tableaux, reconnut que de toutes les fêtes auxquelles il avait assisté, depuis 1762, celle de 1833 était la mieux réussie 15 .
     
    Le 8 août, à sept heures du matin, les Veveysans furent éveillés par des salves d’artillerie, tandis que les groupes de figurants se mettaient en marche, précédés par les musiques, pour se rendre place du Marché. Déjà, les gradins de l’immense tribune, décorée d’oriflammes aux couleurs des cantons, de guirlandes multicolores et de sapins, se garnissaient de spectateurs. Tous étaient impatients de voir apparaître, sous l’arche dressée face à l’estrade établie au pied de la tribune, la populaire compagnie des Anciens Suisses, qui ouvrait le cortège. Portant culottes à crevés rouge et blanc, armés des piques qui avaient fait merveille à Grandson et à Morat, ces soldats barbus, coiffés de grands bérets rouges à plumet, encadraient le drapeau de la Confédération, croix blanche sur fond rouge. Une formidable ovation, que la brise eût pu porter jusqu’en Savoie, jaillit des tribunes. Les menaces qui, par suite de la révision avortée du pacte fédéral, pesaient sur l’unité de l’Helvétie stimulaient le patriotisme et chacun semblait avoir à cœur de clamer, haut et fort, sa fidélité à l’idée de patrie.
     
    Les bergers et bergères ouvrirent le spectacle. Parvenus sur l’esplanade, face au public, ils ôtèrent leur chapeau, qu’ils remplacèrent par la barrette de cuir des fermiers, puis, retroussant leurs manches, mimèrent avec entrain la traite des vaches et la fabrication du fromage telles qu’elles se pratiquent, l’été, dans les hauts alpages. Quand un ténor entonna le Ranz des vaches , la foule, qui connaissait le beau chant des bergers montagnards, reprit le refrain avec flamme.
     
    La fête était lancée. Grand-messe profane, opéra mythologique, géante cavalcade, ronde diaprée, elle allait, pendant deux jours, libérer les forces connues et secrètes de la nature, proclamer la fécondité irrépressible de la terre, la majesté du soleil, la foi en Dieu et la foi en l’homme, que traduisait la devise de l’Abbaye des vignerons : Ora et Labora (« Prie et travaille »).
     
    Dans la tribune, Axel, dont personne ne s’étonna qu’il eût choisi, en célibataire courtois, l’institutrice de sa filleule pour cavalière, se tenait au milieu de ses invités. Le pasteur Henri Delariaz et son épouse avaient fait le voyage de Berne, les Laviron avaient accepté de venir de Genève, Charlotte et Blaise, les Calver, Claude Ribeyre et Flora étaient installés quand on vit apparaître Martin Chantenoz, accompagné d’une fort belle femme aux cheveux blond

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