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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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toujours respectée. Et c’est le maître de Rive-Reine qui a choisi le lieu et le moment.
     
    Après ce préambule et un regard vers Axel, Blaise se tourna résolument vers le pasteur Delariaz.
     
    – Monsieur le Pasteur, j’ai l’insigne honneur de vous demander pour mon fils, Axel Métaz de Fontsalte, ici présent, la main de Mademoiselle votre Fille.
     
    Au soudain silence, dû à l’étonnement, succédèrent des clameurs diverses, que la voûte du carnotset amplifia et porta jusque dans la ruelle. Charlotte, voyant son mari enfiler ses gants beurre frais, s’était mise à pleurer. Élise, assise près de son père, l’avait enlacé et lui demandait pardon pour ne pas l’avoir prévenu de ce guet-apens. Vuippens assurait Aricie qu’il savait depuis longtemps que ça finirait ainsi. Chantenoz tendait son verre à Pierre Valeyres pour le faire remplir.
     
    Le pasteur Delariaz, souriant, n’avait pas perdu son sang-froid.
     
    – Mon général, ma fille vient de me dicter à l’oreille la réponse à la demande que vous venez de, si noblement, formuler. J’aurai donc le bonheur, en tant que pasteur et père, d’unir moi-même votre fils à ma fille, après les vendanges, comme le veut, me dit-on, la tradition.
     
    Les applaudissements crépitèrent et ce fut un grand remue-ménage de tabourets et de bancs dans le carnotset, car tous les invités voulaient complimenter Axel et embrasser sa fiancée.
     
    Dans le calme revenu, Axel, qui s’était entendu donner pour la première fois son nom complet, crut de bon ton de remercier le pasteur de la confiance qu’il lui manifestait en lui accordant la main de sa fille unique. Ayant terminé sa péroraison, il se tourna vers Chantenoz :
     
    – Mon maître, n’avez-vous rien à dire, au sujet du mariage ? Pas de mise en garde à formuler, pas de promesse à tenir ? dit-il, gentiment provocateur.
     
    Martin ôta ses lunettes, puis, après en avoir poli les verres avec soin, les chaussa et se leva.
     
    – Monsieur le Pasteur, j’ai, un jour, commis l’imprudence de dire à mon meilleur élève que je me marierais quand il prendrait femme. Or nous y voici. Quand vous célébrerez le mariage d’Axel et de Mademoiselle votre Fille, accepterez- vous d’aider un vieux célibataire à tenir sa promesse en m’unissant à la téméraire Aricie ?
     
    Les rires fusèrent, puis les applaudissements, et Flora vint embrasser Martin, tandis que Charlotte étreignait Aricie, qui, émue, confuse, effarouchée, eût volontiers disparu dans un trou de souris.
     
    – Ça alors ! dit Vuippens. Qu’est-ce qui leur prend à tous ? Le mariage serait-il une maladie contagieuse ? Mais, ajouta-t-il en se tournant vers Martin et Axel, s’il ne reste qu’un célibataire dans cette ville, je serai celui-là !
     
    – J’ai une sœur, plus jeune que moi et très jolie, dit Aricie, qui, toute à son bonheur inattendu, retrouvait ses moyens.
     
    Les congratulations achevées, Vuippens entonna le chant de la fête des Vignerons que tous avaient retenu et qui paraissait de circonstance :
     
    Salut à ce jour d’allégresse,
    Jour de triomphe à nos travaux !
    Nous ferons redire sans cesse
    Son souvenir à nos échos.
     
    Au moment de servir la dernière bouteille, le pasteur Delariaz s’étonna de l’absence de sa fille. Le maître de Rive-Reine avait aussi disparu. Seul Blaise, qui avait reconnu sur le pavé le claquement des sabots de Ténèbre, avait vu les fiancés se couler dehors discrètement.
     
    Tandis que Vevey dansait sous les girandoles de la fête, Axel et Élise, main dans la main, blottis dans le cabriolet, montaient, solitaires, à travers les vignes, vers Belle-Ombre, en comptant les étoiles que Julie et Saint-Preux n’avaient pas su voir.
     
    6 janvier 1994,
Vevey-Paris.
     
    1 Jean-François Guichard (1731-1811), poète français.
     
    2 L’amour est le même pour tous. Géorgiques
     
    3 Félix Mendelssohn (1809-1847) fit de nombreux séjours à Chernex d’où il écrivait, le 6 août 1831, à ses sœurs : « Le lac, dont on suit la rive, scintille à travers le feuillage ; dans chaque village, et ils se suivent de près, on entend de tous côtés le bruit de l’eau qui court dans les ruisseaux ou coule dans les fontaines ; les maisons sont propres et coquettes ; bref, que vous dirai-je encore, sinon que c’est trop beau, et qu’on se sent au comble du bonheur et de la liberté ? » La présence de la jolie

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