Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
la dépendance sensuelle, quasi envoûtante, dans laquelle la baronne von Fernberg le tenait.
     
    Adrienne, ce matin-là, avait annoncé qu’elle devait porter au Gabinetto scientifico-letterario , ouvert quelques mois plus tôt dans le palais Bondelmonti par un certain Giampietro Vieusseux, un message de son époux.
     
    Tandis qu’Axel et le comte se réchauffaient en buvant une tasse de café, la conversation vint sur la visite d’Adry à ce cabinet littéraire.
     
    – Savez-vous que le fondateur de ce Gabinetto 5 est suisse, comme vous ? Ce Jean-Pierre Vieusseux, qui se fait appeler Giampietro, Giovani Pietro ou Pedrino, est le fils de Pierre Vieusseux, fameux avocat de Genève, descendant, comme vous encore, d’un général français. Les Vieusseux sont alliés aux Rivier, des Vaudois que vous connaissez peut-être, gens au grand cœur, habiles en affaires, fins juristes et très estimés en Europe. Mais je me suis laissé dire que ce cabinet de lecture est aussi un lieu de rendez-vous et d’accueil pour les beaux esprits libéraux et, peut-être, révolutionnaires, qu’ils soient italiens ou étrangers de passage. On y échange, dit-on, des idées scientifiques et littéraires, mais probablement, aussi, des idées subversives. Et, de là à penser qu’y trouvent soutien et refuge les agitateurs qui rêvent de chasser les Autrichiens et de fonder une grande Italie indépendante, il n’y a qu’un pas ! Je me demande ce que votre sororale dulcinée va faire dans ce repaire… et pour le compte, m’avez-vous dit, de son époux représentant de Metternich !
     
    Axel s’abstint de répondre. Il espérait seulement qu’Adry ne se compromettait pas. Il était maintenant persuadé, en revanche, que la baronne von Fernberg se livrait à de ténébreuses activités, sans parvenir à comprendre comment cette femme conciliait sa situation d’épouse autrichienne avec les sentiments qu’elle exprimait parfois, touchant à la liberté des peuples et au bien-fondé des idées généreuses issues de la Révolution française.
     

    Un événement devait bouleverser la vie d’Axel Métaz et allait lui fournir plus d’explications qu’il ne pouvait souhaiter. Dès leur retour à Venise, Adrienne informa son amant qu’elle devait, d’urgence, se rendre à Parme. Sans avoir de fonction officielle à la cour de Marie-Louise, ex-impératrice devenue duchesse de Parme, la baronne von Fernberg y était toujours bien accueillie. Elle apportait le souffle frais et l’esprit de la lagune, des nouvelles autres que politiques, sur la mode, les événements mondains, et des ragots du monde extérieur, dont les moroses courtisans de l’épouse de Napoléon se montraient friands.
     
    Adry devait être de retour après une semaine.
     
    « Nous irons entendre la Pasta 6 à la Fenice. Lord Byron est prêt, dit-on, à payer son cachet et ses frais de séjour », avait-elle annoncé.
     
    Mais son absence fut de plus courte durée et sa réapparition surprenante.
     
    Un soir, fin février, alors qu’il gelait assez fort pour suspendre des larmes de glace au fer des gondoles et plaquer des fleurs de givre aux vitres, tandis qu’Axel disputait une partie d’échecs avec Ugo, miss Emily apparut, porteuse d’un message urgent « livré par la femme noire », commenta-t-elle, avec un rien de mépris dans la voix. Axel, reconnaissant le cachet des Fernberg, prit aussitôt connaissance du billet. Son visage refléta surprise et inquiétude et Malorsi l’interrogea sans façon :
     
    – Rien de fâcheux, ami ?
     
    – J’espère que non. Adriana (c’est ainsi que le comte appelait la baronne), qui vient sans doute de rentrer à Venise, m’enverra chercher à une heure de la nuit par son gondolier. Elle dit simplement que je devrai me laisser conduire par cet homme sans poser de questions.
     
    – Oh ! je n’aime pas ce genre de convocation, ami. Je vois déjà les gondoles à lanterne bleue des sbires au service des Inquisiteurs. Prenez garde. La police autrichienne est bien faite à Venise. On ouvre les lettres des étrangers, on note les noms de ceux à qui ils rendent visite, on les fait suivre…
     
    – Et on les torture pour leur faire dire le nom de leur maîtresse ! s’exclama Axel en riant.
     
    – Je suis sérieux. Et si vous voulez apaiser mes craintes, prenez une arme et permettez-moi de demander au capitaine Giacomo Alboretti, notre maître d’armes, de vous suivre

Weitere Kostenlose Bücher