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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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après-midi. Celui qui s’était éloigné de Rive-Reine en octobre 1819 ne reviendrait jamais. Il errait sur la lagune et dans les palais de Venise.
     

    Dès le lendemain de son retour, le nouveau maître de Rive-Reine se mit en quête d’un comptable que pût agréer Charles Ruty. Il rendit visite au marguillier, qui lui proposa un jeune diacre de la paroisse, capable de tenir des livres de comptes. Mais, quand Pierre Valeyres lui présenta son petit-fils, Régis Valeyres, le choix d’Axel fut arrêté. Ce garçon de dix-sept ans, dont les études avaient été payées par M me  Métaz, travaillait maintenant à Lausanne, à la banque Bugnion qui, depuis 1803, se consacrait à la gestion de fortunes et aux opérations de change. Meilleur élève du collège de Vevey, il avait suivi des cours de comptabilité et de droit du commerce. Axel n’eut aucun mal à le débaucher. Charles Ruty agréa ce choix et Régis Valeyres fut installé, bureau et logement, dans une annexe de Rive-Reine, sorte d’entrepôt devenu inutile depuis la construction par Guillaume des greniers et magasins sous la terrasse Saint-Martin. Axel voulut que le jeune homme fût confortablement logé. Il chargea maçons et charpentiers de transformer en pièces spacieuses la vieille resserre, voisine des écuries. Il offrit à Régis de choisir lui-même, avec l’aide de son grand-père, mobilier, lampes et matériel dont il aurait besoin pour équiper son logement et assumer ses travaux de comptable. Puis il laissa entendre que s’il était satisfait des services du garçon, dont le sérieux ne semblait faire aucun doute, il ferait de lui un intendant capable de le seconder.
     
    Blanchod, mis au courant de cet arrangement, des frais immédiatement engagés à Rive-Reine et de l’achat, par Axel, d’un cheval de selle nécessaire à ses déplacements, fit observer que tout cela, en plus du salaire du petit Valeyres, allait coûter cher, qu’il y avait déjà l’impôt foncier et l’impôt communal à régler.
     
    – Où vas-tu prendre les sous, pour payer tout ça, hein ? demanda-t-il à son filleul.
     
    – Ne vous faites aucun souci. J’ai de quoi payer, répondit Axel en pensant aux pierres précieuses qui restaient dans le sachet offert par Blaise de Fontsalte.
     
    Au fil des rencontres à travers la ville, qui comptait maintenant quatre mille habitants, Axel apprit que Louis Vuippens, le fils du boulanger, son camarade de jeux depuis l’école lancastérienne et le collège, étudiait la médecine en France, à Montpellier, ce dont ses parents se montraient fiers.
     
    Le syndic 4 , à qui Axel se présenta, l’informa que certains horlogers, désireux d’imiter leurs concurrents anglais, encourageaient maintenant la fabrication de pierres pour le mouvement des montres en s’inspirant d’une ancienne découverte de Nicolas Fatio. Ce Suisse de la région de Bâle avait réussi, dès 1704, à percer un minuscule rubis et, l’ayant serti dans le support d’un mouvement, y avait placé le pivot d’une roue. Fatio avait même offert à son ami Isaac Newton une montre ainsi conçue et d’une précision rare à l’époque.
     
    – Je te dis ça parce que je sais que ton père se tenait informé de tous les progrès et de toutes les trouvailles en horlogerie et que le fabricant Audemars commande ses pierres percées dans la vallée de Joux, dit le syndic.
     
    Axel remercia, se promettant de faire son profit du renseignement.
     
    En rentrant à Rive-Reine, il trouva le cheval que Pierre Valeyres était allé choisir pour lui chez un marchand de Villeneuve. C’était un demi-sang à robe noire, du type de ceux que les Anglais montent pour chasser le renard. Puissant, musclé, mais à tête fine, l’animal plut aussitôt au jeune homme.
     
    – Ils l’ont appelé Ténèbre. C’est un drôle de nom, pour un cheval, observa le vieux bacouni.
     
    Axel conduisit aussitôt sa monture chez le maréchal-ferrant, où il apprit, en parlant routes et chemins, que les autorités cantonales envisageaient d’utiliser, pour améliorer un réseau qui laissait fort à désirer, le système mis au point en Angleterre par un certain John Loudon McAdam.
     
    – Que va-t-on chercher les Anglais pour faire nos chemins ! grogna le maréchal.
     
    Axel, qui avait entendu parler, lors de son séjour en Angleterre, en 1817, de l’invention de cet ingénieur écossais revenu d’Amérique fortune faite, instruisit le

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