Sachso
trésor S. S. de Sachsenhausen par des officiers de Himmler pour leur profit personnel ?
À cet égard, le règlement intérieur du camp, daté du 6 novembre 1942, donc en vigueur à l’arrivée des Français, est un monument d’hypocrisie et de cynisme. On y lit notamment : « Le camp de concentration est un établissement d’éducation ayant sa propre particularité… Dans le camp règnent des principes militaires absolus… La tenue doit toujours être propre, raccommodée et boutonnée. Les mains ne doivent pas être dans les poches, le col de la veste ne doit pas être relevé. Il est défendu de cracher, de jeter des papiers, les paquets de cigarettes et les allumettes… Il doit exister de bons rapports de camaraderie entre les uns et les autres… Avant de se coucher, chaque détenu se lave particulièrement les pieds. Les dents doivent être lavées. Chacun, après avoir retiré le pantalon et le caleçon, les plie et les place sur un banc ou sur un escabeau. Il est défendu de se coucher avec la veste ou le gilet. Il n’est pas permis de lire au lit… Rangement dans les armoires : l’étagère supérieure est destinée aux lettres, au nécessaire de toilette (brosse à dents, pâte dentifrice, rasoir), tabac, etc. Sur l’étagère inférieure la gamelle sera posée propre et retournée, et, dessus, la timbale, également retournée. Derrière sont placés le pain et les vivres divers ; cuiller et couteau sont fixés au linteau de la porte… Les détenus malades se présentent au Blockführer. Tout détenu qui ne se fait pas soigner intentionnellement ou par légèreté sera puni, de même que celui qui simule une maladie… »
Dans cet « établissement d’éducation » vraiment très particulier, les S. S. font en effet tout ce qu’il faut pour que « les bons rapports de camaraderie » des « verts » se manifestent à l’encontre des « rouges » par une brutalité égale à la leur, pour que les détenus démunis de tout n’aient ni papier ni paquet de cigarettes à jeter, pour que l’hygiène soit prohibée par la promiscuité, le manque de soins, l’absence de nécessaire de toilette qu’aucun Français n’a jamais eu à mettre sur l’étagère supérieure d’une armoire dont il ne disposait pas ou qu’il partageait avec plusieurs autres.
Dès son premier article, le règlement d’Oranienburg-Sachsenhausen se contredit lui-même : « Dans les camps de concentration, les détenus se trouvent dans une condition inférieure, subalterne, sans considération de leur âge, de leur situation, et doivent obéir aux ordres des supérieurs sur le champ et sans contestation. » À la base de l’ordre S. S., s’il y a bien le mépris de l’homme ravalé au rang de numéro, de Stuck (morceau), s’il y a bien l’exigence d’une obéissance aveugle des victimes, il n’y a par contre aucune intention d’égalitarisme dans la façon de les traiter. Au contraire, c’est le choix méthodique, calculé froidement, la fameuse « sélection » qui l’emporte en chaque circonstance : pour fournir de la main-d’œuvre aux usines de guerre, pour détecter les spécialistes utiles à des besoins particuliers (artistes pour la fabrication de fausse monnaie, savants pour la résolution de problèmes mathématiques), pour alimenter en cobayes les médecins S. S. expérimentateurs ou les tueurs des unités spéciales du colonel S. S. Skorzeny, pour faire de la place aux entrants en vidant des blocks du camp et du Revier par des transports d’extermination…
Afin de se ménager des otages en vue d’éventuelles tractations, les nazis sélectionnent encore des personnalités détenues qu’ils logent de l’autre côté du mur d’enceinte dans les chalets ou les bâtiments du Sonderlager (camp spécial). Quelques Français seulement y séjournent, parmi lesquels, après un passage au block cellulaire, l’ancien président du Conseil Paul Reynaud et l’ancien commissaire de Pétain à l’éducation générale et aux sports Jean Borotra. Le 12 mai 1943, tous deux sont transférés au château d’Itter, dans le Tyrol autrichien, où ils retrouvent d’autres personnalités françaises. L’ancien ministre de l’intérieur, Georges Mandel, reste par contre enfermé dans un cachot de Sachsenhausen, d’où il ne sort que pour être livré au gouvernement de Vichy et aux miliciens, qui l’assassinent à son arrivée en France, le 7 juillet 1944, sur la route de
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