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Sang Royal

Sang Royal

Titel: Sang Royal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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alors à hurler, pris d’une furie soudaine. Je m’écartai encore plus, me recroquevillant sur moi-même. « Espèce de minable bossu ! À Fulford Cross, le roi vous a traité comme vous le méritiez ! » Il rit, soudain animé d’une joie démoniaque, comme le lutin malfaisant d’une fable. Il habitait à présent dans un monde à part, à moins que ce n’eût toujours été le cas. Son rire cessa brusquement. « Maleverer m’accuse, reprit-il. À tort. Dès que je serai sorti d’ici, il sentira la brûlure du martinet. C’est moi qui la lui infligerai. » Il secoua la tête. « Non. Je veux dire, les fers, le feu. Pourquoi est-ce que ma tête bouillonne et me brûle ? Pourquoi est-ce que je ne peux plus penser normalement ? s’écria-t-il en me lançant un regard désespéré.
    — Vous devriez voir un prêtre, Radwinter.
    — On m’enverra un papiste, un sale papiste qui mériterait le bûcher… » Il baissa la voix et son marmonnement – balbutiements de fou adressés à lui-même – devint incompréhensible. Je me levai et me dirigeai vers la fenêtre. Les chaînes faisaient un bruit de ferraille et entravaient mes mouvements. Je me dis à nouveau que j’étais en train de vivre ce que craignaient les Londoniens : se retrouver dans une cellule de la Tour, enchaîné, accusé de trahison, attendant d’être interrogé au moyen de Dieu seul savait quelles horribles méthodes. En outre, le froid me transperçait jusqu’à la moelle. Je fermai les yeux et portai les mains à mon visage, tandis que Radwinter chuchotait ses propos de dément et qu’à l’extérieur, la pluie crépitait sur le fleuve. La marée devait monter car le chuintement semblait s’être rapproché. De ma vie, je n’avais jamais été aussi terrifié.
    Je retournai me coucher sur mon lit, grelottant de froid. Les heures passèrent. Radwinter s’était allongé, lui aussi, et calmé. Nous sursautâmes tous les deux quand la clef tourna dans la serrure, mais il ne s’agissait que du jeune gardien qui apportait la nourriture – un potage peu consistant, malodorant et mousseux, où flottaient des petits bouts de nerfs. Il posa les écuelles à même le sol.
    « Si vous voulez quelque chose de meilleur, déclara-t-il, faudra payer. » Il nous regarda d’un air intéressé. « Vous êtes tous les deux des messieurs. Est-ce que vous allez recevoir des visites ?
    — Sont-elles autorisées ? demandai-je.
    — Pour sûr ! répliqua-t-il, comme si j’étais idiot. Autrement, comment est-ce que vous auriez de l’argent pour payer vos achats ? Est-ce que quelqu’un va venir vous voir ?
    — Je l’espère bien », soupirai-je. Je me rendis alors compte à quel point j’avais envie de voir un visage amical.
    « L’archevêque Cranmer viendra me voir, moi, annonça Radwinter avec une certaine hauteur. Alors ce sera vous et le gouverneur de la Tour qui payerez !
    — Est-ce qu’il amènera le roi avec lui ? » s’esclaffa le gardien, avant de refermer la porte. Radwinter le regarda d’un œil torve, puis attrapa l’une des écuelles et se mit à aspirer bruyamment des gorgées de potage. J’avalai moi aussi le répugnant breuvage, ce qui n’arrangea pas l’état de mon estomac.
    Plusieurs heures passèrent encore, et le jour déclina. Dehors, le chuintement de la pluie ne connaissait pas de répit. Nous faisait-on attendre exprès, comme jadis le père de Radwinter, pour nous laisser imaginer tout ce qui pourrait se passer ? Je m’allongeai sur mon lit. Barak et Wrenne allaient m’aider, me dis-je. Ils allaient venir.
    Au fur et à mesure que l’heure tournait, le froid chassait toute autre pensée de mon esprit. Mes vêtements étaient mouillés depuis la traversée sur le fleuve et ils ne sécheraient jamais en ce lieu. Dehors, il pleuvait toujours à verse. Le crépitement montait et baissait sur le fleuve, au gré du flux et du reflux de la marée. Je finis par m’étendre sur les planches nues du lit, m’enveloppant tant bien que mal dans le matelas crasseux pour tenter de me réchauffer. Opération malaisée, à cause des chaînes. Le matelas puait l’urine et la sueur rance, et la peau me démangeait, attaquée par la vermine qui pénétrait sous mes vêtements. Radwinter était tout à fait silencieux. Je distinguais juste la forme de son corps allongé sur le lit. J’espérais qu’il dormait. L’idée qu’il ait pu être éveillé dans le noir me déplaisait, car alors,

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