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Sang Royal

Sang Royal

Titel: Sang Royal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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les lits jusqu’à la fenêtre, vu l’état de ses mains ? » Celles-ci pendaient de chaque côté de son corps, écorchées et ensanglantées, les ongles arrachés. Je frissonnai et détournai la tête.
    « Ils auraient dû utiliser le chevalet, déclara le jeune Billy, au lieu de faire joujou avec ses dents. Là, au moins, il en aurait été incapable. Merde ! il se balance toujours. Il vient sans doute de sauter ! » Il attrapa l’une des jambes de Radwinter pour arrêter le mouvement de balancier du corps.
    « Mais pourquoi est-ce qu’il a fait ça ? s’écria le gros d’un ton offusqué.
    — On devait lui donner une deuxième ration demain.
    — La honte, voilà le motif, murmurai-je. Il n’aurait pu éprouver de plus grande honte. Et voilà comment la torture permet de connaître la vérité… »
    Le vice-gouverneur arriva sur place, surveilla le décrochage et l’enlèvement du corps. « Et on n’a rien tiré de lui », marmonna-t-il avec irritation. C’est qu’il n’avait rien eu à offrir, pensai-je. Il n’avait pas tué Broderick. Oldroyd, Jennet Marlin, Broderick, et à présent Radwinter. Quelle moisson de vies avait récoltée le coffret ! Et combien de vies coûterait l’affaire de cœur de Catherine Howard ?
    Je restai donc seul dans la cellule, un jour encore, une nuit de plus. Dehors, la pluie tombait à verse, crépitant de plus belle, dégoulinant le long des murs. Quand la nuit apparut, je me mis à regarder dans les coins, comme si l’esprit tourmenté de Radwinter pouvait s’y manifester. Mais il n’y avait rien, et je ne sentais pas sa présence. Au fur et à mesure que l’heure tournait, l’espoir montait et refluait avec la marée du fleuve. Je me disais que Barak allait arriver ou que je recevrais un message qui me mettrait du baume au cœur. Nul doute que par le fleuve il ait déjà eu le temps de se rendre à Hampton Court et d’en revenir. S’il ne venait pas, qu’allait-on me faire demain ? J’eus le vertige à la pensée de tous les instruments de torture dont j’avais entendu parler : chevalet, tenailles, fers ardents. J’avais été idiot d’imaginer un seul instant pouvoir mentir à sir Jacob. Je revis la bouche ensanglantée de Radwinter. Dans un moment de désespoir, au cœur de la nuit, je me demandai avec effroi si Barak et Tamasin n’avaient pas dû fuir pour éviter d’être interrogés au sujet de la reine. Puis je me maudis d’être d’une telle stupidité : Barak ne me laisserait jamais tomber. Enfin l’aube se leva, éclairant la fenêtre où pendait encore un morceau de la chemise de Radwinter.
    Les gardiens vinrent me chercher très tôt. Ils me surveillèrent de près, de crainte que je ne me débatte, or, sachant toute résistance inutile, je me laissai docilement conduire. La tête me tournait, comme si mon esprit était sur le point de déserter mon corps.
    Nous descendîmes un escalier, puis nous suivîmes un couloir mal éclairé, avant de faire halte devant une grande porte d’aspect robuste. Le gros gardien frappa, tandis que je fixais le vieux bois sombre. Mon cœur cognait comme un fou, à présent, ce qui accroissait la sensation de vertige. La porte s’ouvrit et les gardiens me firent entrer. Ils me lâchèrent les bras et s’empressèrent de ressortir.
    Je me trouvais dans une grande pièce sans fenêtre dont les murs étaient noirs de suie. Un braisier dans un renfoncement et l’homme en tablier de cuir, fort comme un taureau, qui se dressait devant moi, les mains sur les hanches, me donnèrent un instant l’impression d’être dans un atelier de forgeron. Un grand adolescent trapu tisonnait les charbons ardents. Puis j’aperçus dans le coin le chevalet équipé de ses courroies et de ses poulies en bois, la panoplie d’instruments – pinces, tisonniers, couteaux – suspendus à des crochets. Mon esprit chavira. Près de moi se trouvait une grosse boîte métallique sur le couvercle de laquelle, parmi des cendres et des scories, brillaient de petits objets blancs. Je compris qu’il s’agissait des dents de Radwinter et mes jambes se dérobèrent sous moi.
    Le grand costaud me rattrapa et m’installa sur une chaise de bois. Il poussa un soupir, comme moi devant un document mal recopié. « Respirez profondément, dit-il. Restez assis là et prenez de profondes inspirations. »
    J’obtempérai tout en le regardant d’un air hébété. Il avait la mine renfrognée et son tablier était

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