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Sang Royal

Sang Royal

Titel: Sang Royal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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enflé, messire Shardlake », répondit-il, avec une sollicitude feinte. Une vision soudaine de la chambre de torture s’imposa à moi, j’entendis à nouveau le craquement au moment où la dent avait été fracturée et la même sensation de terreur m’envahit. Je clignai des paupières, puis foudroyai mon adversaire du regard. Ses yeux évitèrent les miens.
    « Vous savez que le Guildhall a clos votre dossier, poursuivit-il en me gratifiant de son sourire charmeur. Chaque partie paie ses propres frais. Vous aurez sans doute à régler au Guildhall une forte facture. La mienne est prise en charge par la Cour des augmentations.
    — Par Rich.
    — Par la cour. À cause des intérêts qu’elle avait dans cette affaire. Eh bien, le résultat a été assez remarquable. » Il me salua chapeau bas, en une révérence moqueuse, avant de continuer son chemin.
    « La prochaine fois, ce sera un combat loyal, lui lançai-je. Tôt ou tard je vous battrai, Bealknap ! » Il ne se retourna pas.
    Je remontai Chancery Lane jusqu’à Gray’s Inn, de l’autre côté de l’avenue Holborn. Quoique le ciel fut gris et chargé de nuages, la pluie n’avait pas recommencé à tomber. Je demandai le chemin de Garden Court à la loge du portier, lequel m’indiqua un bâtiment de l’autre côté de la cour. Comme je la traversais, regardant les allées et venues des avocats, je me dis que le contact de Bernard Locke, à qui il devait remettre les documents, se trouvait peut-être parmi eux – à moins qu’il n’ait été arrêté. Je franchis la porte et me retrouvai dans un premier bureau où un petit clerc grassouillet leva le nez de ses papiers.
    « Bonjour, fis-je. Matthew Shardlake, de Lincoln’s Inn. Je cherche un confrère qui a son cabinet à Garden Court. Martin Dakin. »
    Le clerc se redressa brusquement. « Oh ! » fit-il. Il eut d’abord l’air surpris, puis troublé.
    « Vous connaissez le nom ?
    — Oui, monsieur, mais… » Il se leva lentement, sans me quitter des yeux. « Si vous voulez attendre quelques instants, peut-être devriez-vous parler au confrère Philips. Veuillez m’excuser. »
    Il se dirigea vers une porte, frappa et entra. J’attendis, soudain pris d’angoisse. Le clerc avait semblé ému, inquiet. Dakin avait-il été arrêté pour subir un interrogatoire ? Je jetai un coup d’œil circulant sur la pièce, où les tables étaient couvertes de liasses de papiers attachées avec des rubans roses. C’était là que Bernard Locke avait lui aussi exercé. Je frissonnai en me rappelant la fois où je l’avais vu à la Tour, les membres brisés et le visage marqué de brûlures.
    Le clerc réapparut dans l’encadrement de la porte. « Le confrère Philips aimerait vous parler, monsieur. » Il s’écarta pour me laisser passer, l’air soulagé de me confier à quelqu’un d’autre.
    Dans le cabinet qui ressemblait beaucoup au mien, un avocat replet entre deux âges se tenait debout derrière son bureau. Il paraissait éreinté et avait les yeux cernés. Il inclina le buste, puis me regarda, la mine soucieuse.
    « Confrère Ralph Philips », dit-il. Son accent indiquait qu’il était originaire du Nord.
    « Confrère Matthew Shardlake, de Lincoln’s Inn.
    — Vous cherchez le confrère Martin Dakin ?
    — C’est bien ça.
    — Ne m’en veuillez pas, monsieur, mais… pourrais-je connaître votre lien avec lui ?
    — Je suis un ami de son oncle, le confrère Giles Wrenne, d’York. Il s’est querellé avec son neveu, il y a des années de cela, et il est venu jusqu’à Londres pour opérer une réconciliation. J’ai participé au voyage royal à York. Le confrère Wrenne est revenu avec moi et il loge chez moi, dans Chancery Lane. » Je me tus un bref instant. « Il est âgé et en mauvaise santé.
    — Ah ! » Le confrère Philips poussa un lourd soupir.
    « Que lui est-il arrivé ? demandai-je, d’un ton plus brusque que je ne l’eusse souhaité. A-t-il été arrêté pour être interrogé à propos de la conjuration nordiste ? Je sais que l’on a questionné certains avocats. »
    Il me jeta un regard perçant « Oui, les enquêteurs sont venus ici. On a tous été interrogés. » Il poussa un nouveau soupir. « Mais personne n’a rien à cacher, et surtout pas le confrère Dakin. » Il eut un étrange sourire, un sourire empreint de tristesse.
    « Alors quoi ?
    — Martin Dakin est décédé, monsieur. Il est mort il y aura deux ans

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