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Sarah

Sarah

Titel: Sarah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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que tu le
tues.
    Pharaon eut un rire mauvais, pareil à un
crachat.
    — La peur !
    — Oui, la peur de Pharaon.
    Pharaon ricana. Il sentit la morsure
laissée par Saraï sur son épaule. Il l’effleura, se mit debout. Il hésita à se
rapprocher d’elle, y renonça en secouant la tête.
    — Ainsi, le Dieu Très-Haut d’Abram
n’est pas assez puissant pour vous protéger de la peur ?
    Saraï baissa le front sans répondre.
    — Toi et ton époux, vous vous êtes
trompés. Pharaon ne vous donnera pas aux crocodiles. Mon père a écrit pour
moi : « Ne sois pas méchant. Nourris le pauvre, un peuple riche ne se
dresse pas pour se révolter. Deviens grand et durable par l’amour que tu
laisses. » Tu répéteras mes mots à Abram.
    Il se tut, le visage impassible, portant
déjà le masque et l’indifférence de Pharaon. Mais il franchit l’espace qui les
séparait et referma ses mains sur le visage de Saraï. La bouche contre sa
bouche il souffla :
    — Et toi, je ne te fouette pas, je ne
te lapide pas afin que ma mémoire garde le souvenir de ton corps parfait. Ainsi
tu vivras toi aussi avec la douleur de notre souvenir.

 
Sixième partie

Hébron
     

 
Le voile de Saraï
    Le front et la poitrine couverts d’or, se
balançant dans une étrange corbeille d’osier harnachée sur le dos d’un
éléphant, Saraï fut reconduite au campement. Une colonne de soldats la
précédait, un troupeau de plus de mille têtes de petits bétails, d’ânes et de
mules encombrait la route derrière elle.
    C’était une reine qui revenait du palais de
Pharaon, une déesse du Nil. Pourtant, Abram l’accueillit sans une question et
presque sans un regard. Seul Loth se précipita à sa rencontre. Il voulut
soutenir son pied lorsqu’elle descendit de l’éléphant mais s’affala sur le sol,
ivre. Il ne s’était pas écoulé un jour durant l’absence de Saraï sans qu’il
vide des cruches entières de bière d’Égypte.
    Les yeux rouges, il éclata de rire, se
releva en tanguant. Saraï refusa de le serrer contre elle tant il empestait.
Sans un mot, sans un sourire pour ceux qui admiraient ce retour magnifique,
elle disparut sous la tente qu’on lui avait dressée. Quelques instants plus
tard elle fit annoncer par ses servantes qu’elle voulait demeurer seule et se
reposer de son long voyage. Loth protesta, assura qu’il voulait la rejoindre.
On le repoussa sans ménagement.
    Abram lui-même ne tenta pas de pénétrer
sous la tente de son épouse. D’ailleurs, on le fêtait bruyamment. Des hommes le
hissèrent sur leurs épaules, le portant en triomphe entre les tentes en criant
son nom et celui de Yhwh. Pharaon n’avait-il pas plié le genou devant le Dieu
Très-Haut ? Il ne tuait pas, ne capturait pas, mais, tout au contraire,
offrait à Abram de quoi rendre à nouveau son peuple riche !
    Jusqu’au cœur de la nuit, au son des
flûtes, on dansa autour des feux dont les escarbilles s’élevaient dans
l’obscurité, tourbillonnantes comme des insectes phosphorescents. La bière et
le vin coulèrent à flots. La joie et le soulagement furent si violents qu’on
oublia Saraï. Nul ne s’étonna de son absence au côté d’Abram jusqu’à ce que les
cris de Loth détournent chacun de son plaisir.
    À quatre pattes devant la tente de Saraï,
la voix noyée de bière et de larmes, il braillait :
    — Montre-toi, montre-toi ! Il y a
si longtemps que je ne t’ai pas vue. Montre-toi, Saraï !
    Sa tunique était souillée et déchirée, son
visage un champ de bataille. Les yeux déments, les lèvres blanches de salive,
il se jetait sur les piliers de la tente pour les briser. Il s’y effondrait,
s’ouvrait la poitrine sur les angles des pieux. Cependant, même au plus fort de
ses gesticulations, il prenait soin de ne pas déchirer la portière que Saraï
gardait close.
    On le releva, mais Loth trouva la force de
se débattre et de vociférer :
    — Dansez ! Dansez comme des
imbéciles… Ne demandez pas pourquoi ma tante Saraï nous revient comme une
reine ! Soyez lâches. Faites comme Abram, il ne demande pas ! Son
Dieu Très-Haut ne demande pas non plus ! Eh, eh, eh ! Il n’y a que le
neveu Loth qui demande ! S’en moque, lui, des ânes et des mules de
Pharaon ! Mais il veut savoir, Loth !
    La question, il la pose : pourquoi
Saraï nous revient-elle comme une reine ?
    Il eut un mauvais rire, pointa le doigt sur
les visages qui l’entouraient, cherchant celui d’Abram. Ne le

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