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Sedan durant la guerre de 1914 à 1918

Sedan durant la guerre de 1914 à 1918

Titel: Sedan durant la guerre de 1914 à 1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henry Rouy
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Nassau; là, il est amputé, et, le 20 septembre, conduit à notre hospice civil. Rien ne trouble sa vaillance dans la douleur, et ses notes sont touchantes par leurs témoignages de reconnaissance et de justice envers tous ceux qui furent bons pour lui: les Allemands qui, sur le signe d’un chef, lui firent un premier pansement; les brancardiers français qui le portèrent avec beaucoup de précautions; le docteur Molard, qui l’amputa et « dont il ne saurait assez dire l’habileté »; les associés de la Croix-Rouge d’un inlassable dévouement; les sœurs de Saint-Vincént-de-Paul « qui ne cessèrent de faire du bien aux blessés et dont on ne pourrait oublier la sollicitude toute maternelle, sans une véritable ingratitude » ; les « dames de Sedan si attentives et les courageuses jeunes filles, enfin, que l’on ne remerciera jamais trop » ; — Viollin fut évacué sur nos lignes, le 21 février, et le carnet de guerre de ce glorieux mutilé se termine sur ce religieux sentiment de résignation : « Mon Dieu, que votre volonté soit faite ! »
    Quel calme, quelle fermeté chez ce Baptiste Salafa du 59 e de ligne !... Comme le général Margueritte, il a reçu dans la joue gauche une balle qui s’est frayé une issue par la joue droite, en lui cassant des dents et lui déchirant la langue. La gangrène se déclare à la langue dont il faut couper un morceau; l’alimentation et la parole sont presque impossibles; quelques liquides seuls passent !... Il faut une grande habitude pour comprendre ce que dit ce martyr; cependant, il préfère son sort à celui des amputés, qui, eux, disent aimer mieux leur situation que celle de Salafa ( 108 ) !

    Une des choses les plus affreuses, n’est-ce pas de rester plusieurs jours, pantelant, abandonné sur le théatre de l’action ? Nous en avons trop d’exemples : à Solférino ; sur vingt champs de bataille de 1870-71 et de 1914-1915 !! — Joseph Beaumont , du 7 e d’infanterie, connut ce supplice, 7 ou 8 jours dans les bois. Atteint dans la colonne vertébrale, paralysé de tout le bas du corps et ne vivant plus, selon ses propres expressions, que du cœur à la tête : « Et combien « ce petit reste de vie me fait souffrir ! » disait-il. — D’une bonne famille de Bordeaux, il adorait sa mère; il y pensait sans cesse, et pleurait en songeant à elle. Il eût seulement voulu la revoir, mais il ne s’illusionnait aucunement sur son état. Quand on essayait de lui donner quelque espoir, il remerciait très simplement... Avec une douceur très grande et une résignation que lui inspirait sa foi, il supporta les six mois de sa lente agonie et puisa des forces dans la prière: « Comme il faut souffrir pour mourir ! » soupirait-il simplement. Dieu prit pitié de ses tourments le 18 février et y mit un terme.

    Lucien Hulin (du 202 e ), blessé en pleine poitrine, à la Marphée, avait bien failli être achevé par les Allemands: il crachait le sang; l’ennemi le crut perdu et se contenta de le dépouiller. Lui aussi, restait à souffrir sur le terrain: tout à coup un officier allemand survient, menace tous les blessés de son revolver et leur fait comprendre que ceux qui seraient incapables de se traîner jusqu’à l’endroit par lui désigné pour y rejoindre les voitures d’ambulance seront achevés! Alors, ces infortunés patients, — quelques-uns mourants même — sont un peu galvanisés et se traînent jusqu’au lieu indiqué. Hulin est de ce nombre: il est apporté et soigné à l’hôpital civil où, contre toute vraisemblance, il se guérit ; et même il rendit de sérieux offices, en qualité d’infirmier, à ses camarades de salle. Sa bonté, sa douceur le faisaient aimer de tous ( 109 ).
     
    Quoique nous soyons contraint de nous limiter, nous voulons seulement encore en citer quatre ou cinq.
    Marcel Gatineau (du 65 e d’infanterie) reçut dans un œil une balle qui ressortit par l’autre : il perdit longtemps connaissance; puis il demeura gisant à la place même où il était tombé, « ne souffrant pas, disait-il, mais étant comme dans un vague sommeil, croyant que la mort allait venir et l’attendant stoïquement. Il se remit, à l’hôpital ; — privé toutefois, hélas! pour toujours de « la douce lumière des cieux ». Il était triste et avait des instants de bien légitime accablement, et cependant il se laissait égayer et savait rire avec ses camarades.
     
    Le genou percé d’une balle, Emile Potrel , (du même

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