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Sépulcre

Sépulcre

Titel: Sépulcre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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prolonger notre séjour ici. Peut-être jusqu’au Nouvel An. Qu’en dis-tu ?
    Léonie fixa son frère d’un air ébahi, ne sachant quoi penser de cette proposition. Ce séjour à la campagne aurait-il autant de charme s’il se prolongeait ?
    — Mais… Et ton travail ? La revue peut-elle se passer de toi si longtemps ? N’as-tu pas besoin d’être sur place pour veiller à tes intérêts ?
    — Oh, je suis bien certain que la revue pourra se débrouiller sans moi encore un petit moment, répondit-il avec insouciance en prenant la tasse de café que lui tendait Isolde.
    — Et maman ? dit Léonie, assaillie par l’image soudaine de sa mère, assise toute seule dans le salon de la rue de Berlin.
    — Si Du Pont veut bien se passer d’elle, nous avons pensé l’inviter à nous rejoindre ici.
    Il sait très bien qu’elle ne voudra jamais quitter Paris. Surtout pas pour venir ici, se dit Léonie en dévisageant son frère, éberluée.
    — À mon avis, le général ne verra pas ça d’un très bon œil, prétexta-t-elle pour excuser par avance le refus qui suivrait immanquablement cette invitation.
    — C’est peut-être que tu t’ennuies trop en ma compagnie ? lança Anatole et, la rejoignant, il lui passa un bras autour des épaules. L’idée de passer encore plusieurs semaines confinée ici avec ton frère te déprime-t-elle à ce point ?
    — Quel idiot ! Je serais ravie de rester encore un peu. Rien ne me ferait plus plaisir. Mais…
    — Mais quoi ?
    — J’aimerais bien avoir des nouvelles de maman, répondit Léonie, et son sourire s’effaça.
    Anatole reposa sa tasse et alluma une cigarette.
    — Moi aussi, confirma-t-il posément. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles, dit le proverbe. C’est sans doute parce qu’elle prend du bon temps qu’elle n’a pas trouvé celui de nous écrire. Et puis l’on a dû faire suivre ma lettre dans la Marne. D’où ce retard.
    — Je croyais que d’après toi, ils étaient déjà rentrés à Paris ? s’étonna-t-elle.
    — Ce n’était pas une certitude, juste une supposition, dit-il doucement, puis son visage s’éclaira de nouveau. Alors, cette virée à Carcassonne, ça te tente ?
    — Oh oui !
    — Bien. Jeudi, nous prendrons le train du matin pour Couiza. La diligence part de la place du Pérou à 5 heures.
    — Combien de temps y séjournerons-nous ?
    — Deux jours, peut-être trois.
    — Seulement ? Ça ne vaut pas le coup, protesta Léonie, déçue.
    — Mais si, tu verras. Ce sera bien assez long, répondit-il en souriant, et cette fois encore, Léonie ne put manquer de remarquer le regard complice qu’il échangea avec Isolde.

55.
    Les amants étaient allongés sous les draps. Une unique bougie éclairait leurs visages.
    — Tu devrais regagner ta chambre, dit-elle. Il est tard.
    — Justement. Tout le monde est couché, répliqua Anatole, et il croisa les bras derrière sa nuque.
    Isolde sourit. Manifestement, il n’avait pas l’intention de s’en aller.
    — Jamais je n’aurais cru que je vivrais un jour un tel bonheur. Que nous serions ici, ensemble, dit-elle d’une voix sereine, puis le sourire s’effaça de son visage, et elle porta machinalement la main à sa gorge. J’ai peur qu’il ne dure pas.
    Anatole se pencha pour l’embrasser là où la peau était abîmée, mais Isolde ne put s’empêcher de se rétracter et il le sentit. La cicatrice était un douloureux rappel de sa brève et violente liaison avec Victor Constant.
    Leur idylle durait déjà depuis plusieurs mois quand, après la mort de son mari, Isolde avait enfin permis à Anatole de la voir sans le foulard ni le col montant qui cachaient en permanence sa vilaine cicatrice. Et il avait encore attendu plusieurs semaines avant d’obtenir de son amante qu’elle lui raconte comment elle avait reçu cette blessure.
    À tort, il avait cru que parler de son passé l’aiderait peut-être à le surmonter. Or cela n’avait fait que la perturber davantage. Encore aujourd’hui, neuf mois après leur première rencontre et alors que la liste des sévices physiques que Constant avait infligés à Isolde lui était familière, Anatole tressaillait en se rappelant son ton neutre et posé quand elle lui avait décrit comment, dans une crise de jalousie, Constant l’avait marquée au fer rouge. Il s’était servi de tisonniers pour chauffer sa chevalière sur les braises avant d’appuyer le métal rougi sur sa gorge jusqu’à ce

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