Sépulcre
quelqu’un a versé une substance dans sa boisson… Tu ne me crois pas, dit-il en voyant son expression.
— Je ne dis pas ça, s’empressa-t-elle de répondre. Mais en supposant que ce soit possible, qui aurait fait une chose pareille ? Et pourquoi ?
Hal soutint son regard, jusqu’à ce que Meredith comprenne où il voulait en venir.
— Ton oncle ?
Il hocha la tête.
— Ce ne peut être que lui, confirma-t-il.
— Tu ne parles pas sérieusement ? Je sais bien que vous ne vous entendez pas, mais de là à l’accuser de…
— Je sais, ça semble grotesque, mais réfléchis-y, Meredith. Qui d’autre à part lui ?
Elle secoua la tête d’un air consterné.
— As-tu porté cette accusation devant la police ?
— Pas dans ces termes, répondit-il, mais j’ai effectivement déposé une requête pour que le dossier soit transmis à la police judiciaire.
— Ce qui veut dire ?
— La police judiciaire enquête sur les crimes. Pour l’instant, le décès a été considéré comme accidentel. Mais si je parvenais à trouver des indices susceptibles d’incriminer Julian, cela pourrait les obliger à reconsidérer leurs conclusions… Si tu voulais bien t’entretenir avec Shelagh O’Donnell, je suis sûr qu’elle serait plus coopérative qu’avec moi.
Meredith se radossa. Quelle histoire de fou ! Hal avait imaginé ce scénario et il y croyait dur comme fer. Il lui fallait un coupable, pour évacuer sa colère et son chagrin. Malgré toute la compassion qu’il lui inspirait, elle était certaine qu’il se trompait. Et elle savait d’expérience que la vérité, aussi pénible fut-elle, valait toujours mieux que le doute ou l’ignorance, qui vous empêchaient de tirer un trait sur le passé et d’aller de l’avant.
— Meredith ?
— Pardon. Je réfléchissais.
— Pourrais-tu être là demain, quand Shelagh O’Donnell viendra ? Je t’en serais vraiment reconnaissant, ajouta-t-il en la voyant hésiter.
— Bon, convint-elle enfin. Entendu.
— Merci, soupira-t-il, visiblement soulagé.
La serveuse vint prendre la commande et l’atmosphère s’allégea aussitôt. Ce fut de nouveau un dîner en tête à tête. Hal choisit une bouteille de vin rouge de la région pour accompagner deux chateaubriands. Un moment, ils se sourirent d’un air gêné, sans savoir quoi dire, puis Hal rompit le silence.
— Bon, assez parlé de mes soucis. Vas-tu me dire maintenant la vraie raison de ta venue ici ?
Meredith se figea.
— Pardon ?
— Ce n’est pas juste pour ton livre sur Debussy, n’est-ce pas ?
— Qu’est-ce qui te fait dire ça ? lança-t-elle plus vivement qu’elle ne l’aurait voulu, ce qui le fit rougir.
— Eh bien, pour commencer, durant notre promenade de ce matin, il m’a semblé que les choses auxquelles tu t’intéressais avaient peu de rapport avec Lilly Debussy. Mais davantage avec l’histoire des lieux entourant Rennes-les-Bains et des gens qui y avaient vécu. J’ai remarqué aussi que la photographie accrochée au-dessus du piano avait disparu. Quelqu’un a dû l’emprunter, conclut-il avec un petit sourire.
— Et qu’est-ce qui te fait croire que c’est moi ?
— Je t’ai vue la contempler ce matin…, répondit-il d’un air contrit. Et puis je vous ai observés, mon oncle et toi. Visiblement, le courant ne passait pas, entre vous. Je me trompe peut-être, mais j’ai eu l’impression que… que tu cherchais à percer le personnage, à en savoir plus sur lui, conclut-il en bredouillant.
— Tu penses que je suis ici pour me renseigner sur ton oncle ? Tu plaisantes, j’espère ?
— Eh bien… Je ne voulais pas te vexer, mais…
Meredith leva la main.
— Mettons les choses au clair. Tu ne crois pas que la mort de ton père soit accidentelle, tu penses que les résultats ont pu être falsifiés, ou bien que quelqu’un a versé de la drogue dans son verre et qu’on a poussé la voiture pour qu’elle bascule dans le vide… Pour résumer, tu soupçonnes ton oncle d’avoir provoqué la mort de ton père. N’est-ce pas ?
— Ça paraît un peu abrupt dit comme ça, mais…
Meredith poursuivit en haussant le ton.
— Et comme il faut que tout rentre dans ton scénario bien ficelé, tu en déduis que mon apparition a forcément un lien avec tout ça et que j’y suis mêlée d’une façon ou d’une autre. C’est ce que tu penses, Hal ? Tu me prends pour l’une de ces héroïnes de roman policier
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