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Sir Nigel

Sir Nigel

Titel: Sir Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Conan Doyle
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rêve
qu’il vit un abbé souriant et conciliant, un procureur obséquieux
et un groupe d’archers qui leur ouvrirent le chemin, à lui-même et
au messager du roi, au travers de la foule qui obstruait la porte
de la salle du chapitre. L’instant d’après, il marchait à côté de
Chandos, dans le cloître paisible, et devant lui, au-delà de la
grande porte, s’étendait la large route jaune, bordée de verts
pâturages. L’air printanier qui embaumait l’atmosphère n’en était
que plus doux et plus parfumé, après celui, glacial, du déshonneur
et de la captivité, qui venait de refroidir un cœur si ardent. À
peine avait-il franchi le portail, qu’il se sentit tiré par la
manche. Ayant tourné le regard, il vit l’honnête visage brun et les
yeux couleur noisette de l’archer qui avait pris son parti.
    – Alors, jeune seigneur, fit Aylward,
qu’avez-vous à dire ?
    – Et que pourrais-je vous dire, mon bon
ami, sinon vous remercier du fond du cœur ? Par saint Paul,
eussiez-vous été mon frère de sang que vous ne m’auriez pas défendu
avec plus d’énergie.
    – Non, cela ne suffit point.
    Nigel, vexé, rougit, d’autant plus que
Chandos, l’œil critique, écoutait leur conversation.
    – Si vous avez entendu ce qui a été dit
au tribunal, dit-il, vous devez savoir que je ne jouis point en ce
moment des biens de ce monde. La peste noire et les moines ont pesé
lourdement sur mes terres. C’est avec plaisir que je vous donnerais
une poignée d’or pour le service que vous m’avez témoigné, si c’est
ce que vous cherchez. Mais je n’en ai point, et je vous répète
qu’il vous faudra vous satisfaire de mes remerciements.
    – Votre or ne m’intéresse point, répondit
Aylward, d’un ton bref. De plus, vous n’achèteriez point ma
loyauté, même en remplissant ma besace de nobles à la rose, si je
ne vous estimais point un homme. Mais je vous ai vu monter le
cheval jaune, je vous ai vu faire front à l’abbé de Waverley, et
vous êtes le maître que j’aimerais servir, si vous avez une place
pour un homme comme moi. J’ai vu vos suivants et je ne doute point
qu’ils furent de vaillants compagnons du temps de votre grand-père.
Mais lequel d’entre eux pourrait encore tendre la corde d’un
arc ? Pour vous, j’ai renoncé au service de l’abbé de
Waverley. Où pourrais-je trouver un autre poste maintenant ?
Si je reste ici, je ne pourrai plus rien faire.
    – Voyons, il n’y a point là de
difficultés, intervint Chandos. Parbleu, un archer audacieux,
bruyant et crâneur vaut son pesant d’or dans les marches de France.
J’en ai deux cents pareils qui me suivent et je ne demanderais pas
mieux que de vous voir parmi eux.
    – Je vous remercie pour votre offre,
noble seigneur, répondit Aylward, et je préférerais votre bannière
à n’importe quelle autre car il est bien connu qu’elle va toujours
de l’avant : j’ai assez entendu parler des guerres pour savoir
qu’il ne reste plus grand-chose à piller pour ceux qui demeurent en
arrière. Cependant si le squire veut de moi, je préférerais
combattre sous les roses de Loring car, bien que je sois né dans la
centurie d’Eastbourne, canton de Chichester, j’ai grandi et appris
à manier l’arc dans ces terres et, en tant que fils libre d’un
homme libre, je préférerais servir monseigneur plutôt qu’un
étranger.
    – Mon bon ami, répondit Nigel, je vous ai
déjà dit que je ne pourrais en aucune façon vous récompenser pour
le service que vous m’avez rendu.
    – Si vous acceptez simplement de
m’emmener à la guerre, je me chargerai moi-même de ma récompense.
En attendant, je ne demande qu’un coin à votre table et une toise
de votre plancher, car il est bien certain que la seule récompense
que j’aurai de l’abbé pour mon exploit de ce jour, ce sera le fouet
pour mes reins et le tabouret pour mes pieds. Samkin Aylward est
votre homme, squire Nigel, à partir de cette heure et, sur les os
de mes doigts, que le diable m’emporte s’il doit vous arriver de le
regretter !
    Ce disant, il porta la main à son casque
d’acier en guise de salut, rejeta son grand arc jaune sur le dos et
suivit son nouveau maître à quelques pas.
    – Pardieu, j’arrive à la bonne heure,
s’exclama Chandos. Venant de Windsor, je me suis rendu directement
à votre manoir que j’ai trouvé vide, à l’exception d’une vieille
dame qui m’a fait part de vos ennuis. De là, je me suis rendu

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