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Souvenir d'un officier de la grande armée

Souvenir d'un officier de la grande armée

Titel: Souvenir d'un officier de la grande armée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Baptiste Auguste Barrès
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paraître au-dessus de ce qu’elles étaient. Il savait que le régiment allait à Strasbourg et moi à Wissembourg. Étonné de ce qu’il me disait, je lui demandai comment il pouvait savoir cela.
    – C’est bien simple, me dit-il, votre capitaine de carabiniers est l’ami de mon précepteur. C’est par lui que j’ai appris tout ce que je sais sur votre prochain départ et votre destination.
    Ce charmant enfant ne me quitta pas de la soirée, m’expliqua tous les tableaux de la galerie, et les beautés de chacun d’eux. Tout cela était dit avec un aplomb et une grâce charmante.

PROMENADES DANS PARIS
     
    Non content de noter au jour le jour tant de grands événements dont il vient d’être le témoin, Barrès, avec cette curiosité toujours en éveil qui est chez lui un trait de caractère, a soin de consigner dans son journal toutes les nouveautés qui l’ont frappé dans Paris pendant ses sept années de séjour (1823 – 1830). Monuments, spectacles, voitures publiques, – Favorites, Dames blanches, Batignollaises, – etc., tout l’intéresse, et il ne manque pas de signaler les difficultés croissantes de la circulation dans les rues !
    Ma promenade favorite était le jardin du Luxembourg ; mais après la mort de ma femme, j’y fus moins souvent, le voisinage me rappelant de trop douloureux souvenirs. Je visitais avec plaisir ses superbes collections de rosiers, ainsi que la pépinière de l’enclos des Chartreux. J’allais souvent dans les galeries du palais du Luxembourg admirer les belles peintures modernes qui s’y trouvent réunies. Elles n’y sont pas à demeure ; quand le peintre qui les a produites est mort, ses ouvrages sont portés au Louvre, et remplacés par ceux que le gouvernement a achetés aux expositions publiques. Ainsi le musée du Luxembourg est le musée des peintres vivants ; le Louvre, celui des peintres morts. En général, la vue des chefs-d’œuvre de l’école moderne fait plus de plaisir, à ceux qui ne sont pas connaisseurs, que la majeure partie des tableaux du Louvre. Mais les artistes et les amateurs instruits en jugent autrement.
    Une autre promenade, qui avait toutes mes sympathies, c’était le Jardin des plantes. J’y ai passé dans la belle saison des matinées et des soirées pleines de charme. Combien je jouissais de voir en détail le jardin botanique, de parcourir les serres et les nombreuses galeries du Muséum ! Au reste, c’était Paris tout entier qui m’attirait dans tous ses coins. Il n’est pas un quartier, ancien ou neuf, une rue nouvellement ouverte, un monument, un passage, un bazar, un pont, une fontaine, qui n’aient eu ma visite, surtout ce qui avait été construit ou amélioré depuis 1823. Je supprimerai une foule de faits et de remarques que j’avais notés dans mon ancien itinéraire et qui sont bien peu intéressants pour moi, maintenant que j’ai vieilli. Mais voici qui prête encore à mes réflexions.
    Sur la place où fut guillotiné, le 21 janvier 1793, l’infortuné Louis XVI, – place qui a porté successivement les noms de Louis XV, avant 1789 ; de la Révolution jusqu’à 1802 ; de la Concorde jusqu’à 1814 ; de Louis XVI jusqu’à 1830, et qui se réappelle de la Concorde, jusqu’à nouvel ordre ; – sur cette place où l’on voit un palais sans roi, les Tuileries ; un temple sans dédicace, la Madeleine ; un arc de triomphe sans consécration, l’arc de l’Étoile ; on élevait un monument à Louis XVI. Le piédestal qui devait le supporter était seul achevé, quand la révolution de 1830 éclata.
    Pendant mon séjour, on plaça sur les balustrades du beau pont Louis XVI, les statues colossales en marbre blanc de Condé, Turenne, Dugesclin, Bayard, Suger, Sully, Richelieu, Colbert, Tourville, Duquesne, Duguay-Trouin et Suffren : elles ont disparu. Au rond-point des Champs-Élysées, on élevait un monument à Louis XV, encore peu avancé ; je pense que les derniers événements empêcheront qu’on y donne suite. Le superbe Arc de triomphe de la barrière de l’Étoile, ou de Neuilly s’achevait. J’en avais vu poser la première pierre en 1806 : on le dédiait alors aux armées françaises de la République et de l’Empire ; sous les Bourbons de la branche aînée, il devait être consacré à la gloire du duc d’Angoulême, pour sa campagne d’Espagne. On élevait une statue à Louis XVIII, auteur de la Charte, et fondateur du gouvernement représentatif en France, sur la

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