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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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le meurtre en accident. Un responsable de la Sécurité informe
Staline du succès de l’opération par téléphone.
    Staline fait embaumer Mikhoels par Zbarski, l’embaumeur de
Lénine, publier un article élogieux sur lui dans la Pravda du 14, et
organiser des funérailles solennelles en son honneur, le 15 janvier. Le
soir même de la cérémonie, le poète yiddish Peretz Markich, membre du présidium
du Comité antifasciste juif, écrit un acte d’accusation poétique transparent (« J’avance,
sabré, tué, mon dernier souffle étranglé/Pareil à mon peuple, je garde les
traces du forfait/Pour que tu me reconnaisses par ces plaies [1379]  »).
    Dans l’intelligentsia, surtout juive, le bruit court que
Mikhoels a été assassiné. Staline contre-attaque aussitôt : en janvier-février,
il fait attribuer à des juifs près d’un quart des 190 prix Staline et
donne le nom de Mikhoels au Théâtre-Juif. Entre-temps, après la littérature et
la philosophie, il s’est attaqué à la musique. Il a confié à Jdanov la
rédaction d’un rapport contre la musique moderne, dite formaliste. Jdanov
rédige un rapport général. Staline veut des coupables ! Jdanov, qui jouait
du piano avec un doigt, peut-être deux, dénonce alors les plus grands dans son
rapport : Mouradéli, Chostakovitch, Khatchatourian, Prokofiev. Clouer au
pilori des idées n’intéresse pas Staline si elles ne s’incarnent pas dans des
individus livrés à la vindicte publique du Chef. À la mi-janvier, un décret du
Comité central condamne explicitement la musique « formaliste »,
déclarée « totalement fausse » parce que oublieuse du vieux folklore
national. Mais Staline sait manier la carotte et le bâton, et cette
condamnation n’empêchera pas au bout du compte Chostakovitch de recevoir cinq
prix Staline, et Prokofiev six. Ils sont utiles, à leur corps défendant, au
prestige international de l’URSS.
    Le décret musical n’est qu’un intermède entre deux épisodes
de l’affaire du Comité antifasciste juif. Abakoumov, dans une déclaration à
Beria communiquée par celui-ci à Malenkov, le 2 avril 1953, prétendra
que Staline a organisé lui-même, dans le détail, le meurtre de Mikhoels : « Staline
a confié [à Abakoumov] la mission urgente d’organiser rapidement la liquidation
physique de Mikhoels. » Apprenant que Mikhoels partait à Minsk, il lui « ordonna
aussitôt de le tuer en simulant un accident de voiture ». L’ancien
ministre de la Sécurité de Biélorussie, Tsanava, impliqué dans l’assassinat,
insiste lui aussi : Abakoumov lui a téléphoné et demandé d’exécuter une
mission importante « sur un ordre personnel de Staline ». Arrivé à
Minsk, Ogoltsov annonça, lui aussi, la nécessité de liquider « Mikhoels
sur décision du gouvernement et sur ordre personnel de Staline [1380]  ». Ce
texte qui cite cinq fois le nom de Staline est suspect. En effet, quatre
semaines après sa mort, Abakoumov, emprisonné, et deux généraux de la Sécurité
en disgrâce ne pouvaient décider seuls de mettre en cause le chef défunt en
citant son nom comme celui d’un vulgaire mortel, alors que la Sécurité d’État
se contentait toujours d’une vague dénomination, « l’Instance ». Seul
Beria pouvait leur suggérer de charger Staline. Mais si ce dernier a
effectivement discuté avec Abakoumov et ses adjoints des détails pratiques, c’est
un changement notable : jusqu’alors il se contentait de fixer l’objectif.
Aux exécutants d’en régler les modalités.
    Le recours à l’assassinat s’explique avant tout par le fait
que Staline ne voulait pas d’un procès public du Comité antifasciste juif. C’est
qu’il soutient alors la création de l’État d’Israël. Un procès public aurait
gêné sa politique étrangère. Mais l’assassinat permet aussi de déclencher un
processus d’ensemble. À la mi-mars, Abakoumov remet à Staline une note sur l’activité
antisoviétique d’un « réseau clandestin nationaliste juif en URSS ».
Il explique : Mikhoels et Fefer se sont, dès 1943, vendus aux Américains
lors de leur voyage aux États-Unis, ils leur ont promis de lutter pour la
constitution d’une République juive de Crimée, futur « champ d’opération
de la clique militaire américaine », et de diffuser le sionisme. Quelques
jours plus tard, Lev Cheinine, juif, directeur de la section des enquêtes du
ministère de l’Intérieur, ancien bras droit de

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