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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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Et son œuvre sera pareillement divisée entre les livres, son « œuvre visible », et ses articles, lettres ou conférences dédiés à la littérature telle qu’il la conçoit, généreuse et messianique – son œuvre invisible, à laquelle il convient d’ajouter la toile de liens, d’influences, de contacts, d’amitiés, qu’il aura minutieusement tissée et maintenue entre quelques contemporains « capitaux ».
     
    Zweig a d’abord pensé que sa maison du Kapuzinerberg serait une résidence d’été, mais le festival, créé en 1920, bouscule ses projets. Amenant à la ville de Mozart, fin juillet et pour tout le mois d’août, une foule de musiciens, de mélomanes et d’amateurs de foire ainsi qu’il nommera bientôt le festival, il se doit aux amis qui viennent jusque chez lui partager des heures de convivialité internationale. Il les invite à déjeuner ou à prendre le thé, donne pour eux quelques réceptions dont Salzbourg gardera longtemps la mémoire. Mais, gêné dans son travail, voyant menacée la raison pour laquelle il a choisi de vivre retiré en province, il décide d’y séjourner en automne et même en hiver – quand il n’y a personne, et que la ville appartient aux seuls Salzbourgeois, gens des plus tranquilles qui ne perturbent jamais son quant-à-soi. Il fera installer le chauffage central, en 1924, après avoir dû écrire pendant plusieurs mois emmitouflé, au lit, sous des couvertures, pour ne pas geler. Puis le gaz, apportant le confort, en 1927, fera du Kapuzinerberg sa résidence principale. A Vienne, il n’aura plus qu’un pied-à-terre et partout ailleurs, en Autriche, en Allemagne ou à l’étranger, il vivra en hôte de passage, exclusivement à l’hôtel.
     
    Conciliant dans son existence deux tendances contradictoires et complémentaires, le mouvement et la méditation, comme l’extériorité et l’intériorité, il sera le Salzbourgeois volant (der fliegende Salzburger) , un surnom que Hermann Hesse lui a trouvé, en s’inspirant du célèbre Fliegende Holländer , le Hollandais volant. Sa vie sera toujours agitée et stable, comme il est lui-même passionné et raisonnable, anxieux et maître de soi. Sans Friderike, il est probable que son sentiment de culpabilité n’aurait pas suffi à l’arracher à la dispersion. Il aurait été en permanence sur les routes, dévoré par l’errance et les rencontres, les aventures qu’elle suscite, au détriment d’une œuvre qui a besoin pour se faire de longues plages de calme et de concentration. Sa femme est là pour lui rappeler qu’il « faut se préserver un peu de vie privée ». Elle sait qu’elle ne doit pas l’affronter, il ne tolérerait pas une intrusion, encore moins une contrainte dans ses affaires personnelles. Aussi dans chacune de ses lettres, pour l’inciter à « se préserver », préfère-t-elle évoquer les splendeurs de Salzbourg, elle compte sur la nostalgie pour réveiller son désir de rentrer au bercail, et écrire. « Aujourd’hui, la soirée est féerique, le givre étincelle sous un ciel constellé d’une intense clarté », lui écrit-elle le 24 novembre 1921, tandis qu’il s’apprête à fêter loin d’elle, à Berlin, ses quarante ans. A son retour, une quinzaine de jours plus tard, elle lui offrira un fauteuil à oreilles, couvert d’un tissu à fleurs, parangon du confort à l’autrichienne et invitation au rêve, sinon à la paresse. Ce fauteuil sera, jusqu’à ce que les nazis vident, après l’Anschluss, la maison enchantée, « le » fauteuil de Stefan Zweig. Il y passera les meilleures heures de sa vie, à lire et à méditer. D’un style gauche et mièvre, mais plein de gentillesse, Friderike le lui a adressé avec ces mots :
     
    Repos, amok ! murmure-lui des choses douces
    Et de vastes idées qui séduiront les hommes,
    Nées de la profondeur, engendrées sans terreur,
    Et s’il quitte tes bras, désireux de bouger, […]
    Délivre-le de ce fardeau, s’il est trop lourd
     
    qui résument son souci de le voir à la fois angoissé, agité par générosité, par volonté d’accomplir sa tâche missionnaire, et de se fuir lui-même. « Vis pour toi-même, écoute-toi toi-même, mon chéri », le supplie-t-elle, le plus souvent en vain.
     
    « Cet homme doux et effacé comptait un ami dans presque toutes les villes de plus de cinq mille habitants, dira de lui l’écrivain autrichien Robert Neumann, un libraire, un membre d’une

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