Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Suite italienne

Suite italienne

Titel: Suite italienne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
avaient le même sort, fût-il la mort, elle rendrait grâce à Dieu. Dans son exaltation, elle rêvait d’un échafaud en plein soleil, semblable à quelque autel, vers lequel ils marcheraient main dans la main, unis pour l’éternité. Quelle plus belle fin pourraient-ils souhaiter ?
    Mais Nicolo d’Este ne voulait pas d’échafaud public, pas de grand soleil, pas d’exécution solennelle trop semblable à une fête. Une nuit, plusieurs hommes entrèrent dans le cachot de Parisina : l’un était le duc, puis venait un moine, enfin, traînant Ugo enchaîné, deux bourreaux fermaient la marche.
    — Tu vas mourir, dit Nicolo à la jeune femme. Confesse-toi.
    Elle s’agenouilla docilement ; dit ses prières puis, quand le moine lui eut donné l’absolution, l’un des bourreaux tendit à Ugo effaré une hache tandis que l’autre courbait de force Parisina, découvrant son cou mince.
    — Frappe ! ordonna l’impitoyable Nicolo.
    Avec un cri d’horreur, Ugo rejeta l’arme d’exécution.
    — Non… non… pas moi ! Je ne suis pas un bourreau.
    — Frappe, te dis-je ! Sinon, je vous traîne tous deux dans la chambre des tortures et elle périra devant toi dans les pires supplices. Vas-tu frapper ?
    — Frappe, mon amour, implora Parisina. Je suis heureuse de mourir de ta main… N’aie pas peur.
    Alors, avec un frisson de dégoût, Ugo reprit la lourde hache, la leva au-dessus de la jolie tête inclinée. Les yeux clos, Parisina priait de tout son cœur.
    Quelques instants plus tard, le bourreau faisait tomber à son tour la tête d’Ugo.
     
    Nicolo d’Este organisa pour les amants adultères des funérailles somptueuses. Les deux corps, revêtus de velours, de brocarts et de joyaux furent exposés dans la cour du château et tout le peuple défila devant eux. Des colliers d’or cachaient, sur les cous mutilés, le passage de la hache.
    Puis, par un curieux sentiment de respect pour leur jeunesse et leur amour, il les fit enterrer tous deux dans le même tombeau, unis dans la mort comme Parisina l’avait tant souhaité.
    Après quoi, la conscience satisfaite, le duc Nicolo d’Este se mit à la recherche d’une troisième épouse.

Cardinal contre bâtard !

I. Angela
    On était dans les premiers jours de juin de l’an 1505, et le soleil écrasait Ferrare. Dans les rues rectilignes, tirées au cordeau, de la cité des princes d’Este, la première ville d’Italie construite selon un plan moderne, une chaleur de four régnait tandis que les brumes fétides qui montaient des marais proches portaient avec elles les miasmes de la malaria. Même derrière les murs énormes du château ducal, rude forteresse médiévale quadrangulaire flanquée de tours carrées, la chaleur était suffocante.
    Cependant, malgré cette chaleur ou à cause d’elle, on s’activait fort dans les appartements de la duchesse. Les servantes sortaient les toilettes, emplissaient les coffres de voyage, emballaient les objets usuels et familiers sans lesquels une grande dame de la Renaissance ne pouvait envisager de demeurer une seule journée : bijoux, instruments de musique, livres, etc. Dès que ce déménagement serait achevé, on partirait chercher la fraîcheur à Belriguardo, le domaine ombreux qui était la résidence d’été habituelle de la duchesse. Il y avait en effet urgence : enceinte de six mois, la noble dame avait le plus grand besoin de respirer l’air pur de la campagne.
    Pas très grande et de constitution fragile, mais ravissante avec l’abondante chevelure couleur d’or qui était à la fois sa parure et son supplice, celle-ci n’avait jamais aimé Ferrare où elle était arrivée trois ans plus tôt, à contrecœur, pour un mariage avec un homme qui ne la désirait pas et ne l’avait épousée que par politique et parce qu’elle était la fille de l’autoritaire et tout-puissant pape Alexandre VI.
    Depuis longtemps déjà, elle avait appris qu’il n’était pas facile de s’appeler Lucrèce Borgia et gardait trop d’intelligence et de finesse pour ne pas ressentir cruellement la méfiance et la crainte que soulevaient autour d’eux son père et surtout César, son terrible frère, dont on disait qu’il avait, par jalousie et par amour pour elle, assassiné Jean, leur frère commun.
    Pourtant, depuis qu’elle avait épousé Alphonse d’Este, héritier de Ferrare, Lucrèce avait réussi à vaincre bien des préjugés. Elle avait su se faire apprécier de sa belle-famille par

Weitere Kostenlose Bücher