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Suite italienne

Suite italienne

Titel: Suite italienne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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la haute piété de ce trop beau garçon, si visiblement fait pour l’amour. Et les servantes ne se gênaient pas pour murmurer qu’il était bien dommage qu’aucune femme ne pût espérer faire un jour vibrer son cœur.
    Or justement, il y avait au palais une femme qui, depuis le jour de son arrivée, s’était juré de conquérir l’amour du jeune homme. Cette femme, c’était Parisina.
    La vue d’Ugo lui avait fait comprendre que le sentiment qu’elle éprouvait pour le duc n’était qu’une pâle copie de l’amour. L’amour, elle savait maintenant ce que c’était. Elle l’avait su à l’instant précis où Ugo l’avait regardée. C’était une flamme brûlante, insatiable et dévorante, qui ne laissait au cœur ni trêve ni repos. D’un seul coup, tout l’univers quotidien et magnifique qui l’entourait avait pris les couleurs effacées d’un décor qui a trop servi. Seule, sur un immense désert, se détachait la figure brune d’Ugo, sa silhouette athlétique… Même ses nuits solitaires avaient cessé de lui être pénibles. Bien au contraire, c’était la présence de Nicolo qui lui était maintenant désagréable. Elle préférait cent fois demeurer seule dans son immense lit, ne fût-ce que pour pouvoir rêver à son aise à celui qu’elle aimait.
    — Tôt ou tard, se promettait-elle, Ugo m’aimera, Ugo sera à moi…
    Mais comment mener à bien son entreprise de séduction si elle ne parvenait jamais à le rencontrer ?
    Profitant d’une des multiples absences de son époux, et du passage à Ferrare d’un célèbre chanteur vénitien, elle fit dire à Ugo qu’elle souhaiterait que pour entendre l’artiste, il quittât sa chambre et vînt souper avec elle. À sa grande surprise, il accepta.
     
    Afin que la soirée fût plus agréable et plus intime, Parisina décida que le souper et le concert auraient lieu dans l’une des maisons de campagne du duc, proche de Ferrare. Le temps exceptionnellement doux permit de dresser la table dans la loggia ombragée d’une treille pourpre. Au-delà, c’était l’eau clapotante d’un étang, la nuit tiède, le chant du rossignol luttant de mélodie avec le chanteur vénitien. Et le charme de cette nuit marqua d’un trait de feu l’âme d’Ugo.
    Assis auprès de Parisina, il ne pouvait détacher son regard de la jeune femme. Toute vêtue de soie blanche, légère et fine, largement décolletée, des perles dans ses cheveux noirs, Parisina avait tout mis en œuvre pour séduire celui qu’elle aimait. Jamais ses yeux n’avaient été si brillants, ses lèvres si fraîches. L’enchantement de la nuit rejoignait celui de la jeune femme et les vins capiteux faisaient le reste pour composer un redoutable philtre auquel le naïf jeune homme ne résista pas longtemps. Comme il demeurait silencieux, buvant cependant coupe sur coupe, Parisina se pencha vers lui :
    — Mon très doux seigneur, pourquoi êtes-vous si triste ? Ce souper ne vous sied-il pas ?
    — Il ne me sied que trop et j’ai honte d’y prendre tant de plaisir. Mais cette nuit merveilleuse, cette musique si douce… et vous, Madona, qui êtes si belle. Il y a des moments où j’envie si férocement mon père qu’il me semble le haïr. Il a tout, puisque vous l’aimez.
    — Qui vous a dit que je l’aimais ?
    — N’êtes-vous pas sa femme ?
    — Être l’épouse ou être l’amante ne sont pas la même chose, Ugo. Non, je n’aime pas votre père. Je l’ai épousé parce qu’une fille n’a pas le droit de dire non lorsque son père commande. J’étais résignée… mais vous êtes venu.
    — Ne dites pas cela ! C’est un crime de convoiter le bien d’autrui… surtout si c’est celui de votre père.
    — Votre père fait fi de ce bien que vous jugez si précieux. Il préfère les filles de mariniers ou les chanteuses. Ugo, Ugo, c’est vous que j’attendais, c’est vous que j’aurais dû épouser. C’est à vous que je veux appartenir.
    Elle se rapprochait de lui, tentante, parfumée. Ugo eut un vertige. Depuis son arrivée, l’image de Parisina hantait ses nuits. Il avait tenté de la chasser par la prière et la pénitence mais chaque soir la retrouvait plus forte et plus dangereuse. Et là, dans cette loggia, elle donnait une réalité à ses rêves. Il n’avait qu’un geste à faire pour qu’elle fût dans ses bras… et ce geste, elle lui demandait presque de le faire. Dans une ultime défense, il secoua la tête.
    — Non… Ce

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