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Survivant d'Auschwitz

Survivant d'Auschwitz

Titel: Survivant d'Auschwitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thomas Gève
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qu’il n’en était même plus compréhensible.
     
    Pendant quelque temps, le bloc 2a devint un centre de réunions culturelles et de concerts avec des sketchs humoristiques pendant les entractes, malheureusement il fut fermé au bout d’une dizaine de séances. La direction du camp fut d’avis que nous serions tout aussi bien occupés avec des punitions collectives – dont le choix ne manquait pas – et qui, celles-ci, seraient à la fois moins coûteuses et plus efficaces.
    L’une des corrections favorites était de nous faire faire du « sport » et elle nous était infligée lorsque « nous n’avions pas assez travaillé ». Les premiers sur la liste étaient les kapos, qui devaient défiler le long des rues du camp en faisant les exercices ordonnés : « Couché ! Debout » « Genou plié, bras tendu ! » « Petits sauts ! » « En avant, en arrière » « Roulades ! ».
    « Voilà, sales chiens galeux ! s’entendaient-ils hurler, maintenant vous savez comment on doit apprendre à travailler à toutes ces ordures dont vous êtes responsables, si l’on veut qu’ils soient un peu plus productifs. Allez, on recommence, mais plus vite cette fois ! »
    Si le lendemain, le rendement n’était pas plus élevé, c’était au tour des contremaîtres, hiérarchiquement moins gradés que les kapos, de faire du « sport ». Et si là encore, les résultats escomptés n’arrivaient pas, nous étions tous conviés à nous rouler dans la boue, au son grotesque des ridicules chants du camp.
    Ensuite on nous prévenait qu’il fallait être impeccables et avoir la tenue propre pour le prochain appel, de telle sorte que nous passions – aussi désespérément que vainement – le restant de la soirée à laver nos vêtements et à essayer de les faire sécher pour qu’ils soient prêts le lendemain matin, c’est-à-dire six heures plus tard.
     
    Enfin, les premiers bombardiers alliés firent leur apparition dans le ciel, premier signe que le monde autour de nous avait conscience de nos souffrances. Les SS avaient réalisé qu’ils étaient la cible et firent construire à la hâte des abris, peindre des camouflages avec des striures sur les bâtiments, enfin ils s’équipèrent de casques et de masques à gaz…
    Dès que nous entendions le hurlement de la sirène – signe bienvenu et bienfaiteur qui pouvait se manifester jusqu’à trois fois dans la même journée –, nous quittions notre travail, après nous être assurés de ne laisser quiconque derrière nous – qui aurait été sourd, se serait endormi et aurait ensuite été puni, accusé d’avoir voulu s’enfuir – et nous nous retrouvions au point de rassemblement pour retourner le plus vite possible au camp, en rang serré.
    Notre kommando avait la route la plus longue à faire, mais nous ne le regrettions pas, car bien qu’épuisés, les pieds en sang et au bord de la route, nous avions le plaisir de voir les SS que nous haïssions tant, se recroqueviller dans leurs trous d’abri. Les seigneurs de la race supérieure commençaient à prendre peur et leurs fusils ne servaient à rien contre les bombes. Depuis leurs abris, ils guettaient et scrutaient le ciel avec angoisse. Ensuite – et c’était moins à notre goût – le camp était noyé dans un brouillard artificiel, et l’odeur en était désagréable.
    Les détenus s’entassaient dans les blocs et nous n’avions aucune protection. Lorsque l’explosion était si proche, que le bâtiment était ébranlé et les fenêtres brisées, nous exultions. C’était la preuve que nos ennemis essuyaient des revers.
     
    Les nazis commencèrent à s’inquiéter lorsqu’ils virent la moitié de la Pologne libérée. Les sélections pratiquées à l’intérieur des blocs pour envoyer les détenus à la mort avaient cessé. Une rumeur avait été répandue pour nous tranquilliser, disant que les gazages allaient être complètement arrêtés. Ce ne fut que mensonge, puisque de nouveaux convois continuaient d’arriver du sud-est de l’Europe, déversant des flots de malheureuses victimes juives destinées à finir le voyage dans le bois des morts.
    L’orientation de la direction, qui se reflétait toujours dans l’attitude de ses fidèles serviteurs SS, marqua un changement notoire. Il ne s’agissait plus d’opprimer les sous-hommes, mais de répondre à l’appel d’une nouvelle mission : les protéger contre les « hordes venues de l’est ». Dans un

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