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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
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l’étonnante sveltesse – malgré les nombreuses maternités que l’on sait ! –, cette « princesse aux grands yeux d’améthyste » qui savait naturellement prendre la pose mélancolique, cet air pénétré de triste langueur dont raffoleront bientôt les romantiques échevelés.
    À Londres comme ailleurs, Old Talley ne pouvait plus se passer de la mère de Pauline. À tel point même qu’il en vint à renvoyer en France tout le personnel que Molé – l’officiel ministre des Affaires étrangères – lui avait imposé pour sa mission et que la belle enfant aux lèvres sensuelles était devenue son premier secrétaire d’ambassade.
    Même s’il n’ignorait pas que, pendant qu’il boitait de plus en plus bas, elle savait garder la jambe leste.
    — Eh bien oui ! mais qu’importe ! s’exclamait alors lady Grey qui avait pourtant la réputation d’être le parangon de vertu des bords de la Tamise. Moi, j’aime beaucoup la duchesse de Dino, elle est toujours de belle humeur et de la plus agréable compagnie. Comme elle ne dit jamais rien qui me froisse, pourquoi me soucierais-je des amants qu’on lui prête ?
    Sans doute faisait-elle allusion à Adolphe de Bacourt, l’homme de confiance de Talleyrand.
    « L’homme de confiance » étant une façon de parler car, s’il était au courant de toutes les affaires officielles de l’ambassadeur, il n’ignorait rien non plus des affaires intimes de Dorothée à qui il donnait très familièrement du « ma jolie pie borgne » ou du « mon ange ».
    Un jour, évidemment, cela finit par agacer Charles Maurice qui était toujours très épris de « Madame » – car de son côté il continuait de l’appeler dignement. Aussi, quand il ne supporta plus d’être le malheureux témoin des caresses que son bras droit dispensait à sa nièce, il le lui fit savoir.
    Et ce fut sans appel !
    Jusqu’à présent il n’avait guère manifesté de mauvaise humeur quand la mère de Pauline avait sorti tel ou tel amant de sa boîte à malice, mais cette fois, comme cela se passait sous son toit – car le bel Adolphe était logé à l’ambassade ! –, il fut franchement exaspéré.
    Ce qui peut se comprendre.
    On ne trouve pas la plus petite trace d’une grossesse de Dorothée, néanmoins, durant la mission londonienne de son vieil oncle.
    En revanche, on assiste à la naissance d’une jolie fille : la Belgique.
    Et pour la déposer au berceau, nul n’était plus qualifié que le prince de Talleyrand en personne. Songez qu’il avait même bassiné le lit du nouveau-né ! À cette occasion, en effet, l’évêque avait... joué les moines !
    Le dernier enfant de Talleyrand – et celui-là ne fut pas fait dans le dos de Napoléon !
    Mais la gestation n’avait pas été une partie de plaisir.
    Et que dire des douleurs de l’accouchement !
    Parce que en réalité il s’agissait d’un enfant siamois bicéphale.
    À la première chute de Napoléon, les Alliés – l’Angleterre en tête – avaient décidé, pour dresser une manière de barrière à l’expansion française, de réunir les provinces belges et hollandaises en un seul État qui serait le royaume de Hollande, et dont ils confieraient la souveraineté à Guillaume d’Orange-Nassau.
    Mais étant donné les disparités linguistiques, économiques et religieuses, sans compter le manque de psychologie du roi, la greffe n’avait pas pris.
    Et le rejet eut lieu le 25 août de l’an 1830.
    C’est ce soir-là que Bruxelles entra en transes.
    À cause de, ou grâce à, un musicien originaire de la ville de Caen, le nommé Esprit Auber, dont on donnait un opéra, La Muette de Portici , au théâtre de la Monnaie, une oeuvre dont le livret racontait l’histoire de Masaniello, le chef de la révolution de Naples contre les Espagnols. Subitement, le grand air fit exploser la salle, toute la foule l’ayant repris d’un seul choeur :
    Amour sacré de la patrie
    Rends-nous l’audace et la fierté
    À mon pays je dois la vie
    Il me devra sa liberté !
    Et dans les heures qui suivirent, les Bruxellois enivrés se ruèrent sur les grilles de l’hôtel de ville. Ils étaient cinq cents rue de la Madeleine ou rue de la Paille, ils étaient mille au Grand-Sablon, ils furent cinq mille sur la Grand-Place.
    À la suite de quoi il ne se passa que peu de nuits avant que l’émeute de La Muette ne se transformât en révolution belge.
    Et que le roi Guillaume ne fût contraint de se

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