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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
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Talleyrand ?
    La réponse est non.
    Villèle, Martignac et Polignac seront les trois présidents du Conseil qui feront la pluie et le beau temps durant les six années que dureront le règne de l’ancien comte d’Artois.
    La pluie, surtout.
    Et aux Affaires étrangères – sa tasse de thé par excellence – Charles Maurice – un peu amer sans doute – verra défiler Chateaubriand, Damas, La Ferronays, Laval-Montmorency, Portalis et l’inévitable Polignac.
    Six ans sans qu’on lui demande son avis ! Autant dire une éternité ! Et l’éternité c’est long, surtout à la fin ! comme dit le poète.
    En 1824, Charles Maurice est âgé de soixante-dix ans. Le nouveau roi de France en compte trois de moins et, bien que son visage soit singulièrement parcheminé, il semble respirer la santé.
    Mais Talleyrand, grand joueur de whist devant l’Éternel, dispose d’un atout majeur que les autres n’ont pas : il n’est jamais pressé.
    De là à dire qu’il vivra ce « sextennat » sans piaffer serait excessif, mais il saura prendre son mal en patience, voilà tout.
    Grâce à Dorothée, bien sûr, grâce à la petite Pauline et à Charlotte, aussi, qui ressemblait maintenant à un mignon tendron ; grâce au sublime château de Valençay, à ses multiples séjours en villes d’eaux et à la rédaction de ses Mémoires ...
    Et malgré quelques désagréments, bien sûr, car on ne pouvait pas avoir impunément célébré la messe du 14 Juillet de 1790, favorisé la nationalisation des biens du clergé, prêté le serment constitutionnel, avoir jeté sa soutane aux orties, épousé la pulpeuse madame Grand et servi l’Ogre de l’Europe sans s’être attiré un minimum d’inimitiés.
    Un jour, par exemple, il reçoit un soufflet du comte de Maubreuil et il se retrouve avec la joue sérieusement boursouflée et un oeil au beurre noir.
    — C’était un coup de poing, Sire, expliqua-t-il à Charles X, un Périgord ne reçoit pas de gifle.
    Victime, oui, mais pas insulté !
    Une autre fois, on lui ressert sa culpabilité dans l’assassinat du duc d’Enghien. Une autre fois encore, c’est une certaine Ida de Saint-Elme qui publie une manière de feuilleton titré Mémoires d’une contemporaine dans lequel on apprend que Charles Maurice a été un temps son très intime.
    — On croit rêver ! s’énerva-t-il alors devant son valet fidèle. N’est-ce pas, Courtiade, que je n’ai jamais connu cette dame ?
    — Heu... Monseigneur...
    — Comment ? Que voulez-vous dire ?
    — Je veux dire que vous l’avez bien connue, Monseigneur, et même beaucoup !
    — Ah ! soupira le prince, c’est possible, puisque vous le dites...
    Même éloigné du gouvernement du dernier des Bourbons, quand il résidait à Saint-Florentin, il continuait de donner de somptueuses soirées.
    On ne se refait pas !
    Dans l’entrée de son hôtel particulier, il avait fait dresser un registre pour que ses invités, ou ses simples visiteurs, y apposent leur signature. Alors, à l’aube, quand ses salons s’étaient enfin vidés, il le scrutait de son vieil oeil de lynx, ce « livre d’or », il se penchait dessus avec un malin délice. Non pour y trouver le paraphe de celui ou de celle qui avait été honoré de venir le saluer, mais plutôt pour enregistrer le nom des absents.
    Qui ont toujours tort, comme chacun sait.
    Ainsi, le préfet de police, un certain monsieur Delaveau – un homme complètement inféodé au parti des ultraroyalistes –, n’assistait-il jamais aux festivités de la rue Saint-Florentin.
    — Il est bien peu curieux, cet homme-là, au poste qu’il occupe, sourit Charles Maurice.
    — On dit pourtant qu’il serait parvenu à traquer les libertins des bals masqués de l’Opéra, rétorqua Dorothée.
    Le bonhomme Delaveau, informé que les amateurs de parties fines avaient pris l’habitude de se donner rendez-vous sous la pendule du foyer de l’Opéra, avait en effet dépêché un gendarme pour en arrêter le balancier.
    — C’est, en vérité, pousser bien loin la manie des arrestations, remarque Charles Maurice qui, bien que rangé aux oubliettes de la politique, n’a rien perdu de son esprit.
    Car il est évident que, Charles X régnant exclusivement entouré de nostalgiques de l’Ancien Régime, il ne pouvait espérer figurer en haut de l’affiche.
    Ni même en bas !
    En 1836, par exemple, le 3 mai, alors qu’il est tout de même convié à la cérémonie de la

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