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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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furieux et j’ai dû faire intervenir mes gardes pour les
disperser.
    — Voilà qui est plutôt de
mauvais augure. Qui sont, selon toi, ces navires assez hardis pour se présenter
en grand nombre sous nos murs ?
    — Je ne puis te répondre et je
crains qu’ils ne viennent en ennemis plutôt qu’en amis.
    — Seraient-ce des
Nazaréens ?
    — Ces êtres frustes ignorent
tout de l’art de la navigation. Ils vivent retranchés dans leurs montagnes et
n’ont pas de port.
    Au moment où l’intendant prononçait
ces mots, un officier entra en courant dans la pièce et interrompit la
conversation :
    — Wali, les envahisseurs ont
débarqué et commencent à piller les entrepôts. La population, saisie de
panique, afflue vers la citadelle et je n’ai pas eu le courage de lui en
refuser l’accès.
    — Tu as bien fait. Qui sont les
assaillants ?
    — De véritables géants, barbus,
qui s’expriment dans un langage incompréhensible. Ils sont armés de haches,
d’épées, de lances et de larges boucliers de bois ou de métal dont ils se
servent pour assommer leurs adversaires. J’ai combattu sur de nombreux champs
de bataille et je puis t’assurer que, jamais, je n’ai vu de telles bêtes
fauves. L’enfer lui-même n’abrite pas des démons de cette espèce, capables de
tant de cruauté. L’alerte a été donnée par un mendiant qui dormait sur la berge
du fleuve. J’ose à peine te raconter le supplice qu’ils lui ont infligé.
    — Parle.
    — L’une de ces créatures
étranges, aux cheveux aussi blonds que le blé, l’a frappé avec sa hache dans la
poitrine et le dos, lui brisant les côtes et lui arrachant la peau par lambeaux
entiers. On pouvait voir les poumons du malheureux à vif. Dégoulinant de sang,
il a pu se traîner jusqu’aux premières maisons de la cité pour prévenir les
habitants avant d’expirer. Ils ont mutilé à dessein ce malheureux pour que nos
concitoyens désertent leurs foyers et viennent se réfugier à l’abri des
remparts de la forteresse. Pendant ce temps, ils ont pillé méthodiquement les
maisons, n’épargnant ni les églises ni les mosquées ni les synagogues. Ils sont
suivis par des captifs qui ramènent le butin à leurs navires. Eux achèvent les
vieillards et les infirmes qui n’ont pu s’enfuir et dont le sang ruisselle dans
les rues. D’ici, tu peux voir les flammes qui s’élèvent des quartiers de la
ville basse. La fumée est tellement épaisse qu’on ne peut distinguer leurs
mouvements et j’ai jugé préférable de ne pas faire sortir mes hommes de peur
qu’ils ne tombent dans une embuscade. J’ai donné l’ordre d’armer tous les
habitants en âge de porter les armes et d’ériger à la hâte un mur de pierre
derrière l’unique porte de la citadelle afin que celle-ci ne cède pas. J’ai
aussi envoyé un cavalier à Kurtuba prévenir l’émir qu’une terrible menace pèse
sur son royaume.
    — Quel est ton avis sur la
situation ?
    — La ville basse est perdue.
Maintenant, ces brutes vont mettre le siège devant la forteresse et je puis te
garantir que nous nous battrons jusqu’au dernier, tout le temps qu’il faudra.
Nous avons assez d’eau et de vivres pour résister plusieurs semaines.
    — Mon cœur saigne, fit Wahb
Allah Ibn Hazm, devant pareille catastrophe. Tous mes efforts ont été anéantis
en quelques heures. Ainsi l’a voulu Allah, en punition de nos péchés. Je ne
désespère pas. Si nous parvenons à repousser les assaillants, je reconstruirai
al-Ushbuna plus belle qu’elle n’était auparavant.
    Durant treize jours, les agresseurs
tentèrent d’escalader les remparts. En vain. À l’aube du quatorzième jour, les
assiégés découvrirent que les Barbares avaient profité de la nuit pour décamper
et qu’ils descendaient l’estuaire en direction de la mer. Chacun de leur côté,
musulmans, juifs et chrétiens célébrèrent ce miracle par des actions de grâces
et des prières et leurs chefs tinrent à féliciter le wali pour sa brillante
conduite tandis que celui-ci leur promettait de tout faire pour les aider à
rebâtir leurs foyers, échoppes et entrepôts.
    Sitôt prévenu de cette attaque, Abd
al-Rahman réunit d’urgence ses principaux conseillers et généraux pour prendre
les mesures qui s’imposaient. Mais qui pouvaient être ces envahisseurs ?
L’émir avança qu’il s’agissait vraisemblablement de ces hommes du Nord,
al-Urdamniniyum [106] dont lui avait parlé Kartiyus,

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