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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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de la conquête, il ne restait plus que Musa Ibn Fortun Ibn Kasi,
descendant de Florinda. Tout un pan d’histoire était ainsi balayé.
    Pendant plusieurs semaines, la
capitale vécut dans l’angoisse, guettant l’arrivée des messagers envoyés par
al-Nasr pour informer l’émir du déroulement des opérations. Ceux-ci, à peine
l’enceinte franchie, se dirigeaient vers le Dar al-Imara d’où ils repartaient
porteurs de nouvelles instructions. Les fonctionnaires avaient été consignés au
palais avec, sous peine de mort, l’interdiction de communiquer la moindre
information à leurs familles. La ville était envahie par des milliers de
réfugiés venus des campagnes environnantes. Aucun n’avait vu les envahisseurs.
Cela ne les empêchait pas, pour apitoyer les passants et leur soutirer quelques
pièces, de raconter les scènes d’horreur dont ils auraient été les témoins,
créant ainsi un climat de peur. Averti, Abd al-Rahman décida de faire exécuter
les propagateurs de fausses rumeurs. L’un de ses conseillers l’en
dissuada :
    — Noble seigneur, je comprends
ta colère et, en d’autres circonstances, je me serais montré sans pitié envers
ces affabulateurs. En fait, tu n’y as pas intérêt. Plus grande sera la terreur
qu’ils inspireront, plus tes sujets te seront reconnaissants de les avoir
délivrés de ce danger mortel.
    — L’inverse peut se produire.
Si mes troupes ne parviennent pas à les repousser, je risque d’en subir les
conséquences.
    — Il n’y a aucun danger à cela.
Tu as proclamé l’istinfar et même Musa Ibn Fortun Ibn Kasi, qui avait défié ton
autorité, a répondu à ton appel. Ces barbares sont deux mille au plus et tu as
envoyé contre eux plus de huit mille hommes résolus. Ta victoire est assurée.
    La bataille décisive eut lieu le 25
safar 230 [108] à Tablada [109] .
Surpris dans leur camp en pleine nuit alors qu’ils se livraient à
d’interminables libations, les envahisseurs furent anéantis. Mille d’entre eux
furent tués dans l’affrontement et quatre cents autres, faits prisonniers,
exécutés le lendemain sous les cris de joie des paysans qui avaient quitté leurs
cachettes pour assister au châtiment des responsables de leurs malheurs. Les
autres Urdamniniyum, réfugiés à Karmuna, encerclés de toutes parts, négocièrent
avec al-Nasr les termes de leur reddition. Il fut convenu qu’ils auraient la
vie sauve à condition de libérer tous leurs prisonniers et de se convertir. Ils
s’établirent dans l’île où ils avaient initialement installé leur campement et,
placés sous bonne surveillance, se consacrèrent à l’élevage de vaches,
fournissant bientôt Ishbiliya en fromages réputés.
    Le retour de l’expédition à Kurtuba
fut triomphal. Abd al-Rahman sortit de son palais pour se porter à la rencontre
de ses généraux, suivi d’une foule en liesse qui acclamait les soldats, les
aspergeant de parfum et les couvrant de fleurs. Considéré comme le sauveur de
l’Ishbaniyah, al-Nasr devint de facto le principal conseiller du
souverain. Particulièrement avisé, il ne chercha pas à tirer profit, outre
mesure, de son avantage et prit plusieurs dispositions destinées à éviter le
renouvellement d’un drame similaire. Il fit ainsi reconstruire les murailles
d’Ishbiliya et édifier des tours de guet tout le long de la côte. Ayant engagé
à prix d’or des charpentiers chez les Grecs et les Francs, il fonda à
al-Ushbuna et à Kadis des ateliers de construction navale et dota le royaume
d’une flotte de guerre suffisante pour dissuader les Madjus de revenir
dans les parages. Ceux-ci concentrèrent leurs attaques sur l’Ifrandja. Désireux
de consacrer toute son énergie à repousser ces barbares, le roi des Francs accepta
de signer une trêve de vingt ans avec l’émirat de Kurtuba, s’engageant
notamment à ne plus porter assistance aux Nazaréens du Nord que les princes
Mohammed et al-Mundhir attaquèrent. Leur entreprise fut couronnée de succès et,
jusqu’à la mort de leur père, le pays connut la paix à ses frontières.
     

Chapitre XI
    Abd al-Rahman écumait littéralement
de rage. Depuis plus de trois semaines, il séjournait, contraint et forcé, à
al-Rusafa, la somptueuse résidence édifiée par son arrière-grand-père. Il
n’avait jamais aimé cet endroit pas plus que les autres palais où il avait
passé son enfance. Dès son avènement, il avait abandonné le Dar al-Imara, où
avait vécu son

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