Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
Vom Netzwerk:
Nommé confesseur de Charles
le Chauve, celui-ci l’avait envoyé à Rome pour obtenir du pape qu’il mette au
pas certains prélats rebelles à son autorité.
    À son arrivée dans la Ville
Éternelle, Bodo avait été révolté par ce qu’il avait découvert. Le Souverain
Pontife était entouré de cardinaux et de courtisans qui monnayaient chèrement
leur appui et leurs faveurs. Certains pratiquaient la simonie, la vente à
l’encan des sacrements, et entretenaient, au vu et au su de tout le monde, des
maîtresses ou des gitons. Dans l’attente d’une audience, Bodo avait mis ses
loisirs à profit pour visiter la cité en compagnie d’un négociant juif, Ezra
Ben Jacob, qui l’accompagnait depuis Aix-la-Chapelle. Alors que les deux hommes
arpentaient le Forum, l’Israélite avait refusé de s’approcher de l’arc de
triomphe de Titus en expliquant au prêtre :
    — C’est le symbole de la pire
des catastrophes arrivée à mon malheureux peuple : la destruction du saint
Temple de Jérusalem. Titus, que son nom soit maudit, n’a pas su empêcher ses
légionnaires d’incendier la maison du Seigneur dont nous commémorons, chaque année,
le 9 du mois d’Av, la perte en jeûnant et en récitant dans nos synagogues la
lamentation du prophète Jérémie. Demain aura lieu ce triste anniversaire et je
te demande donc l’autorisation de m’absenter.
    Bodo avait accordé au Juif une
journée de congé à une seule condition : que celui-ci le fasse inviter, à
l’occasion du prochain sabbat, par le chef de la communauté juive locale, David
Ben Daniel, un marchand prospère auquel il voulait acheter plusieurs manuscrits
rares en provenance d’Orient. Il fut agréablement surpris de l’accueil que lui
réserva ce dignitaire qui habitait dans un quartier près du Tibre où ses
coreligionnaires vivaient depuis des siècles. Le prêtre avait été ému par la
piété sincère de ses hôtes et par le sérieux avec lequel ils étudiaient, dès
qu’ils le pouvaient, les textes saints qu’ils commentaient avec passion. Quel
contraste avec l’atmosphère de la cour pontificale peuplée d’intrigants,
d’ambitieux et de sots !
    Bodo revint à plusieurs reprises
chez David Ben Daniel, auquel il avait demandé de lui parler du Talmud dont les
premières copies avaient commencé à circuler en Italie et en Ifrandja. Petit à
petit, le doute s’installa dans son esprit. Il prenait conscience que, sur de
nombreux points, ses maîtres avaient déformé l’enseignement des Écritures et
que tout ce qu’il croyait jusque-là n’était que tromperie. Après avoir retardé
son retour à Aix-la-Chapelle, le prêtre, au terme d’une éprouvante quête
spirituelle, avait demandé à ses deux amis s’il pouvait être admis au sein de
leur communauté. Ils avaient paru réticents et embarrassés. Finalement, Ezra
Ben Jacob s’était décidé à parler :
    — Jadis, nos pères acceptaient
que des païens, lassés d’honorer des dieux cruels, se convertissent à notre
religion. Certains, ceux qu’on appelait les « Craignant Dieu », qui
avaient une cour spéciale dans le Temple de Jérusalem, se contentaient de
proclamer l’unicité de Dieu. D’autres acceptaient de se faire circoncire et
d’observer toutes nos lois. Il nous était interdit de les rebuter. Notre maître,
Moïse, avait été le premier à donner l’exemple en épousant la fille de Jethro
le Midianite. Quand sa sœur Myriam lui avait reproché d’avoir épousé une
étrangère, elle avait été, en punition, frappée de la lèpre. Tu connais, tout
comme moi, le Livre de Ruth qui, après la mort de son époux, décida de rester
avec sa belle-mère en lui disant : « Ne me presse pas de t’abandonner
et de m’éloigner de toi car où tu iras, j’irai ; où tu demeureras, je
demeurerai ; ton peuple sera mon peuple et ton Dieu sera mon Dieu. »
S’étant remarié avec Booz, elle lui donna une nombreuse progéniture dont était
issu le roi David. L’un de nos sages les plus réputés, Rabbi Akiba, mort en
martyr pour sa foi, était le fils d’un Grec de Galilée.
    — Rien donc ne s’oppose à ma
demande, avait murmuré, plein d’espoir, Bodo.
    — En principe, lui avait
rétorqué son interlocuteur. Malheureusement, nous subissons, en punition de nos
fautes, le joug d’Edom. [119] Vos prêtres nous ont interdit de pratiquer le prosélytisme. Je t’ai bien
observé et je crois à la sincérité de ta démarche au point que je

Weitere Kostenlose Bücher