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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ça.
    Balançant son pied vers l’avant dans un mouvement de rage, il repoussa le tréteau qui se referma avec un claquement sec avant de chuter à terre, là où la chaussure de Sidonie, imprégnée d’encre, avait laissé son empreinte.
    Comment l’avait-elle obtenue cette révocation ? En soulevant ses jupons comme une catin ? Oui. Forcément. Et son époux de s’en réjouir !
    Non, décidément, les Sassenage n’étaient pas meilleurs que lui. Seulement mieux nés. Et couverts de privilèges.
    Il se leva, ulcéré, des envies de mordre aux mâchoires.
    Il ne prêterait pas le dos à la camarde ainsi que feu Philibert de Montoison l’avait fait. Hugues de Luirieux avait toujours été maître de son destin.
    Quitte à tout perdre, il leur donnerait une bonne raison de se venger.
    Il sortit en claquant la porte, traversa le couloir, en ouvrit brutalement une autre, forçant Ronan de Balastre et Torval, occupés à jouer aux dés, à tourner vers lui leurs regards surpris.
    — Rassemblez vos affaires et faites seller nos chevaux. C’est terminé pour nous ici. On file à Sassenage, ordonna-t-il d’un air mauvais.
    *
    À l’instant précis où Hugues de Luirieux décida de la mort d’Hélène, celle-ci ne songeait plus qu’à la vie.
    Même Algonde, à ses côtés, qui lui tenait la main tandis qu’elle poussait, avait laissé l’avenir prendre le pas sur le passé.
    Dans l’escalier du donjon, Constantin, Petit Pierre et Janisse montaient tour à tour seaux d’eau chaude et serviettes. Gersende les récupérait sur le pas de la porte de la chambre autrefois maudite, sans mot dire.
    L’enfantement venait de commencer.
    À cet instant précis aussi, un homme se présentait à la herse du castel de Sassenage.
    Un homme fatigué.
    Un homme qui s’était épris d’Hélène au premier regard, dix ans plus tôt, le jour du grand tournoi de Romans.
    Un homme qui l’avait aimée assez pour se rendre complice en Italie de ses amours discrètes avec Djem.
    Un homme, enfin, qui, averti des intentions de Luirieux, avait obtenu du roi l’autorisation de rentrer au pays.
    Il ne savait pas encore qu’il arrivait trop tard pour empêcher ces épousailles et moins encore que d’autres personnes, Enguerrand, Sidonie et le baron Jacques, devançant les intentions dudit mari, s’étaient élancées sur la grand-route de Grenoble.
    Cet homme, les joues mangées par une barbe de plusieurs semaines, aussi sale d’habit que de figure, ne songeait pas à plaire, mais à guérir celle qui hantait ses jours et ses nuits. Tout en étant convaincu que, si elle parvenait à l’aimer un jour, ce ne serait jamais autant que le prince Djem, à qui il avait prêté serment de la chérir.
    Mais ainsi était Jacques de Montbel, comte d’Entremont.
    Point n’était besoin d’un retour d’affection pour le convaincre d’agir.

55
     
    Si son bain n’avait refroidi, il se serait bien gardé d’en sortir, tant il avait rêvé de pareil confort durant ce long voyage. L’annonce du mariage d’Hélène avec le sire de Luirieux avait considérablement amoindri le plaisir de son arrivée la veille. Mais, au petit jour, grâce à celle, plus réjouissante, de la savoir soulagée de ses couches, Jacques de Montbel se sentait serein.
    Somme toute, songeait-il, il arrivait à point nommé.
    Il devait en cela remercier le roi Charles qui s’était séparé de lui à regret, mais sans colère. Une indulgence que Jacques de Montbel devait à Hélène, ou plutôt à la bravade qu’elle avait osée pour demeurer auprès de son prince. Charles le Huitième en avait été impressionné. Elle avait forcé son respect. Lors, quand il l’avait sue en danger, il n’avait pas longtemps hésité à lui envoyer un défenseur.
    Jacques de Montbel avait donc quitté l’Italie au lendemain de l’entrée triomphante et solennelle du roi dans Naples, conquise trois jours avant la mort de Djem. Pour rendre hommage au défunt toujours sans sépulture, le monarque avait revêtu les insignes de l’empereur de Constantinople et s’était fait proclamer roi. C’est sur cette dernière image que Jacques de Montbel avait tourné bride, quelques jours seulement après le départ du baron de Sassenage.
    Il accepta la serviette que le valet lui tendait. Un pied en dehors du baquet, il se sécha vigoureusement la jambe afin de ne pas inonder le parquet.
    — L’aube point, messire. Désirez-vous votre matinel ? demanda le jouvenceau d’une

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