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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Balastre.
    — Il faut ce qu’il faut, messires. Vous n’en reviendrez pas, je vous le promets, affirma maître Janisse en ouvrant la porte à Gersende qui était retournée en cuisine le chercher.
    De fait, la sauce embaumait.
    Cette fois, elle servit les trois hommes en premier, puis Petit Pierre qui tapota sa cuillée dans son assiette, désolé.
    — La soupe était si bonne que j’en suis rassasié. Me pardonnerez-vous d’en laisser ?
    Hugues de Luirieux rit de bon cœur.
    — Vous vexerez-vous, Janisse ?
    — Non point, messire, s’il me fait l’honneur d’y goûter.
    Petit Pierre traîna. Assez pour que les trois hommes se jettent sur leur écuelle et en vident la moitié dans des exclamations jubilatoires.
    Elles s’étranglèrent dans leur gosier.
    D’un même élan et sans avoir le temps de comprendre ce qui leur arrivait, ils piquèrent du nez sur la table et se mirent à ronfler.

64
     
    Tous. Ils iraient tous, fut-il décidé. Jacques de Sassenage, Sidonie, Présine, Mounia, Enguerrand, Khalil, Elora, Jean, Bertille, Celma, Briseur, Mayeul et même La Malice. Seuls les Bohémiens se mirent en retrait, les laissant à ce qu’ils devaient.
    Lorsque Benoît, juché sur le pigeonnier de la Rochette, aperçut le signal, une torche enflammée balayée depuis le sommet du donjon de Sassenage, ils se mirent en branle dans le silence le plus complet et une nuit d’encre. Ce n’était pas Hugues de Luirieux qu’ils comptaient surprendre par le nombre, ils le savaient à cette heure solidement ligoté et enfermé, mais bien plutôt les gens de la maisonnée.
    Pour une surprise, ce fut une surprise. Car nul ne les vit entrer dans le castel sitôt la barbacane passée. Constantin, Janisse, Gersende, Jacques de Montbel, Petit Pierre et Algonde s’étant retranchés dans la chambre d’Hélène pour y attendre Enguerrand, Sidonie et le baron, ainsi qu’il avait été convenu.
    Guidé par ce dernier, l’étrange équipage grimpa discrètement l’escalier jusqu’à la coursive, puis laissa Elora toquer à la porte.
    — Ce sont eux, comprit Gersende en libérant la gâche d’un tour de clef.
    Elle ouvrit, joyeuse que tout se soit déroulé ainsi qu’ils l’avaient espéré, et demeura la bouche ouverte devant le sourire radieux qui lui fut retourné.
    — Bonsoir, grand-mère. Puis-je entrer ?
    Algonde, assise sur le bord du lit, Gasparde dans les bras, sursauta ainsi qu’Hélène à ses côtés. De fait, tous s’étaient figés, à l’exception de Gersende qui s’effaça, les sourcils froncés sur une impression de mirage. Elora fit deux pas dans la pièce, rayonnante, le temps d’accrocher leur silence pareillement incrédule.
    — Vous ne m’attendiez pas, je pense, leur servit-elle dans un rire léger avant de biser la joue de Gersende qui sursauta, comme si un seau d’eau venait de lui être jeté.
    Algonde s’était levée, abandonnant aux bras de sa mère la petiote qu’elle avait bercée. Des larmes coulaient sur ses joues.
    Elora s’avança jusqu’à elle, aussi émue qu’elle l’était, et se nicha dans les bras qu’elle lui tendait.
    Ce fut Janisse qui les ranima tous, d’un coup, l’air égaré.
    — Elora ? C’est Elora ? Gersende, c’est Elora ? balbutia-t-il devant cette femme que la vie leur rendait.
    Pour seule réponse, Gersende rejoignit ces deux êtres enlacés. Son sang. Sa chair.
    — Vous le croyez, comte, une chose pareille, c’est Elora. Ah çà ! je n’en reviens pas. C’est Elora, vraiment… Et ce soir qui de mieux ! Vraiment…
    — Elle est telle qu’en mon souvenir, mon bon Janisse, mais plus belle encore, lui confirma ce dernier, troublé.
    Il se passa alors quelque chose d’étrange dans cette pièce où tout avait commencé.
    Constantin rejoignit le bloc, puis Petit Pierre, et Hélène après avoir confié ses filles à Jacques de Montbel. Puis un à un tous les autres de la communauté qui, en silence et sous le regard abasourdi de Janisse, enfilaient la porte dans un long serpentin de sourires, comme guidés par un appel silencieux.
    — Eh bien, eh bien, moi aussi, puisque c’est ainsi. Moi aussi… Faut y aller. J’y vais, se décida Janisse, lorsque la porte se referma sur le dernier.
    Il ouvrit ses grands bras et, sans plus s’embarrasser, se colla aux épaules de Présine et d’une autre inconnue qui rayonnait.
    Dix-neuf personnes en tout, avait compté Jacques de Montbel. Dix-neuf corps soudés à elle, cette

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