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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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venin sera moins concentré la prochaine fois. Ce sera plus long. Et d’autant plus douloureux, affirma cette dernière. Plusieurs jours sans doute.
    Mounia se détacha d’Enguerrand pour se planter devant Luirieux, devenu livide.
    — Tu l’as compris, le prochain ce sera toi. Tu vois, il m’aura fallu dix ans… C’est long, dix ans, Hugues. Très long lorsque la détresse te noue le ventre, te donne à croire que les tiens ne sont plus et qu’un seul homme est responsable de cela. Toi. Même l’idée de ta mort me semblait trop douce. Te torturer ? Nous y avons tous pensé, chacun notre tour, jusqu’à ce qu’Algonde nous raconte le long cheminement du poison dans les veines, comme des milliers d’aiguilles enflammées, la transformation des vaisseaux en cristaux bleus, et surtout la douleur. La douleur qui grandit au-delà du pensable, de l’humainement supportable dans un corps peu à peu pétrifié. La douleur, Luirieux. Je vais l’écouter te retourner le ventre, les yeux, le cœur, chaque parcelle de toi, des heures, des jours durant peut-être. Je vais m’en guérir de la mienne. Et tous ceux qui sont là avec moi.
    La peur martelait à présent les tempes du prévôt. Une peur comme il n’en avait jamais connu et ne pensait en connaître. Pas d’échappatoire, pourtant. Il n’en aurait pas.
    — N’as-tu rien à leur dire en retour ? insista Mounia.
    — Non. Je ne regrette rien. Rien, Mounia, sinon toi. Je n’aurais jamais dû te vendre, ce jour-là.
    Elle lui cracha au visage.
    Ensuite elle s’écarta.
    Briseur le poussa vers la cheminée.
    Il s’agita, le visage inondé soudain d’une sueur froide. L’urine au bord du vit.
    — Pour ma mère, trembla Petit Pierre.
    — Pour la mienne et mon père, ajouta Mounia.
    — Pour ceux de Choranche, confirma Celma.
    Tous les poings serrés sur leur vengeance.
    Briseur le poussa dans le passage.
    Luirieux fut saisi par l’odeur infecte, tenta de se rabattre à l’intérieur de la chambre, mais rien n’y fit. Le colosse n’attendait que cela. Il lui administra un coup de pied violent dans les reins, tandis qu’Algonde actionnait le mécanisme.
    Le passage se referma.
    Pendant quelques secondes, ils restèrent à fixer la cheminée remise en place. Puis Petit Pierre demanda à Mounia :
    — Tu crois qu’il descendra ?
    — Pour chercher les armes de ses compagnons dans l’espoir d’en finir lui-même, oui, il descendra.
    Elle lui froissa la chevelure.
    — Mais rassure-toi, la bête le sentira. Aujourd’hui, demain, qu’importe. Il mourra.
    — Mais on l’entendra pas, se désola le garçonnet.
    Algonde tourna vers lui un visage évidé de couleurs.
    — Si, celui qui restera dans cette pièce l’entendra, crois-moi.
    — Eh bien, décida La Malice en sautant pour se coucher d’un bloc sur le lit, les deux mains sous la nuque, il n’y a plus qu’à prendre poste, à tour de rôle, parce que, je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi, je ne veux pas rater ça !

67
     
    Hugues de Luirieux mit trois jours avant de se décider à mourir. Dans des hurlements tels que certains d’entre eux, même les plus aguerris, se signèrent. Rameutés par Jacques de Montbel, de garde lorsque cela commença, ils assistèrent, depuis la chambre et, devant le passage rouvert, à sa lente et effroyable agonie, sans un mot, unis par la même certitude.
    Justice avait été rendue.
    *
    Le soir même, ils se rapatriaient à la Rochette.
    Les huit jours qui suivirent, Enguerrand et Mounia s’aimèrent dans de folles étreintes.
    Elora accorda sa lumière aux petiotes pour éliminer tout risque qu’elles passent pendant l’hiver tout en devisant joyeusement avec Gersende, Celma, Présine, Algonde, Sidonie et Hélène, quand le sire de Montbel ne l’accaparait pas.
    Rejoints par les enfants de Bohême dont Carol et Anne, les fillettes de Nycola, sensiblement de leur âge, Petit Pierre, Jean, Bertille, Mayeul s’adonnèrent à toutes sortes de jeux mais aussi au braconnage sous la tutelle de Briseur et de La Malice.
    Bouba ne lâcha plus Noiraud.
    Constantin et Khalil lièrent une amitié profonde et complice.
    Gersende et Janisse annoncèrent qu’ils étaient du voyage, les Bohémiens que la mer ne les tentait pas et que, forts de la lettre de recommandation du pape et du sultan, ils allaient reprendre le leur.
    Dans les deux cas, le baron finança.
    Durant ces huit jours aussi, on pria. Pour la petite Laurence, enterrée par

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