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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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bonne vingtaine de cheminées, à gauche par l’arrière du harem et face à eux, au centre, par Kubbealti, la salle du divan. C’était là, leur avait-on appris, que se tenaient toutes les cérémonies. Pouvant accueillir quelque dix mille personnes, la bâtisse rectangulaire était surmontée par la tour de justice, considérée comme le siège du Conseil de l’Empire.
    L’endroit était calme, presque reposant au regard de la première enceinte. Des eunuques blancs allaient et venaient avec déférence au milieu de serviteurs enturbannés qui entraient et sortaient des bâtisses. D’un côté, celui des cuisines, s’élevait le parfum des épices ; de l’autre, sous les moucharabiehs du harem, celui des roses et des jasmins.
    Le mélange des trois donnait à l’endroit une fragrance particulière, presque entêtante mais toute de volupté.
    — Nous allons t’attendre ici, décida Elora en récupérant la longe de la mule.
    Quatre palmiers formaient un carré, protégeant d’ombre un bassin dans lequel glougloutait une fontaine. Instinctivement, l’animal s’y pencha pour s’abreuver.
    Nycola hocha la tête et continua son chemin vers un portique immaculé et ajouré en son cintre, qui s’ouvrait sur le pavillon des audiences où il était attendu.
    De nouveau, il dut montrer son autorisation, laquelle, cette fois, disparut dans le gilet d’un eunuque blanc auquel il emboîta le pas.
    C’était fait. Il était dans la place.
    Ne restait plus à Elora et Khalil qu’à occuper au mieux le temps qu’on lui concéderait.
    Craignant sans doute le regard des eunuques qui gardaient les différentes portes, aucun des serviteurs auxquels ils s’adressèrent ne consentit à leur répondre. Tout juste l’un d’eux releva-t-il le nez sur les caprices de la mule qui, agacée par une guêpe, s’était mise à ruer pour la déloger.
    Un quart d’heure s’écoula qu’ils n’étaient pas plus avancés.
    C’est alors qu’Elora avisa la silhouette courbée d’un jardinier dans l’imposante roseraie qui courait contre le mur du harem. À son visage buriné par le temps, elle devina qu’il officiait là depuis de nombreuses années. Avec un peu de chance…, songea-t-elle. Laissant Khalil en garde de la mule, elle s’avança le long des allées. Elle prit soin de caresser les fleurs en boutons, de humer les pétales épanouis sur leurs tiges, avant de s’approcher assez pour que le vieil homme, occupé à cisailler les fleurs fanées, puisse la remarquer. Lorsqu’elle se présenta devant lui, il avait admis son amour des roses et se trouvait enclin à le partager.
    — Puis-je en ramasser ? demanda-t-elle dans un sourire enjôleur.
    — Les flétries seulement. Les autres sont destinées à la Khanoum. Je serai battu si j’enfreins la règle.
    Elora s’accroupit, ramena dans sa paume quelques pétales éparpillés sur le sol, puis se redressa pour mieux les admirer. Leur parfum, puissant encore, s’éleva sous la caresse de son doigt.
    — Qui est la Khanoum ?
    — La mère du sultan.
    Elora hocha la tête avant de la tourner vers le moucharabieh de bois blanc qui couvrait toute la façade du harem, au-dessus d’un mur de mosaïque.
    — Elle nous regarde, tu crois ?
    — Je l’ignore et c’est là que réside tout le danger. Tu es fille de Bohême, n’est-ce pas ?
    — Oui, répondit Elora, agacée de ne pouvoir utiliser ses pouvoirs pour inspecter au-delà de cette barrière ajourée.
    — Tu ne devrais pas rester ici. Ta beauté est trop grande. Elle fait injure à celles qui sont enfermées et le sultan ne s’y tromperait pas, lui conseilla le jardinier.
    — N’est-ce point un honneur que d’être choisie ?
    Une grimace discrète fronça le nez du vieil homme, parcheminant un peu plus son visage ridé. Il baissa la voix.
    — D’autres se sont fanées telles ces roses, ou sont mortes d’avoir osé espérer.
    Elora se baissa de nouveau vers le sol, le temps de laisser passer un eunuque qui roula des yeux furieux en direction du vieil homme. Elle ne pourrait rester davantage en sa compagnie si elle ne voulait lui causer tort. Stimulé par la menace, il poursuivit sa besogne. Un rosier, deux, dépouillés par ses mains expertes. L’eunuque s’éloignait. Elora attendit qu’il contourne un grenadier pour revenir à la charge, plus directement cette fois.
    — En ville on raconte qu’une Égyptienne a ravi le cœur du sultan il y a quelques années…
    Le jardinier

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