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Testament Phonographe

Titel: Testament Phonographe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Léo Ferré
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plus jamais rentre r
    Quand je te monte en haut d’chez mo i
    On n’voit mêm’ plus la mère Eiffe l
    Le monde est p’ tit mais dans mes bra s
    Moi j’te trimballe au vingtièm’ cie l
    J’suis un parleur à ma manièr e
    Y’ a qu’un seul mot que j’dis jamai s
    T’as beau y mett’ tout’ la manièr e
    Le verbe « aimer » moi je le fai s
     
    J’suis un parleur à ma con v’ nanc e
    Et puis j’t’allum’ quand t’as pas d’fe u
    J’te donn’ ma part et ça r’commenc e
    J’peux la fermer tu caus’s pour deu x
    J’suis un champion à l’allumag e
    Le quart de tour c’est ma parti e
    C’est rar’ quand j’te laisse au garag e
    J’aim’ pas sortir seul dans ta vi e
    J’suis un parleur à ma con v’ nanc e
    Mes phras’s c’est jamais du chiqu é
    C’est pas l’Mond’ ni l’CoIlè g’ de Franc e
    C’est bon mêm’si c’est pas françai s
     
    J’suis un parleur à ma manièr e
    Un’ môm’ c’est pas qu’c’est un parloi r
    Mais moi j’m’en fous j’ai la manièr e
    Je n’finis jamais mes histoire s
    J’suis un parleur à épisode s
    Et c’est comm’ ça que je te tien s
    Je change à chaqu’ fois comm’ la mod e
    J’m’habille en toi et ça t’va bie n
    J’suis un parleur à ta manièr e
    Mes mots toi tu t’les es gravé s
    Dans ta p’ tit’ têt’ phonographièr e
    Quand j’y s’ rais plus… tu f’ ras tourner…
     

C’EST UN AIR
    C’est un air qui vaut pas dix rond s
    C’est presque rien, c’est qu’un’ chanson ,
    Quand on s’met à parler d’amou r
    Nous on traîn’ pas dans les discours.
    Quand à lir’ les auteurs costaud s
    Faut prendr’ sa loupe et ses bachot s
    Mais pour nous parler dans la nui t
    Les mots d’la rue moi, ça m’suffit…
    Quand c’est pas l’heur’ des bis’s dans l’co u
    Quand j’suis tout prêt à t’ fout ’ des coups ,
    Pour s’envoyer tous nos motif s
    On traîn’ pas dans les subjonctifs :
    J’te dis « salope », tu m’dis « ta gueule » ,
    Les voisins peu v’ nt penser c’qu’ils veulen t
    Mais y’ a un truc qu’ils savent, ma mie ,
    C’est qu’on n’est pas d’l’Académie…
     
    C’est un air qu’a servi cent foi s
    À dir’« Je t’aime », à dire « et toi ? »
    Des mots qui traîn’nt dans l’âme des gens.
    Des mots qui chôm’nt jamais tell’men t
    Ces gens les emploient dans leur cœu r
    Chaqu’fois qu’ils reçoi v’ nt le Bonheu r
    Et c’client-là faut pas l’rate r
    Des fois qu’il pass’rait plus jamais…
    Quand c’est pas l’heur’ des rendez-vous.
    Quand on s’rait prêt à mett’ les bouts ,
    On sait causer au désespoi r
    Avec les mots d’Ia Série Noire
    J’te dis « Tir’toi », tu m’dis « fumie r »
    Mêm’ que Stendhal n’a pas bronch é
    Dans son tombeau, car not’ françai s
    Ça l’empêc h’ pas de roupiller…
     
    C’est un air qui court dans la ru e
    Qui fait l’tapin, qui fait la grue ,
    Avec des mots que sa v’ nt les chien s
    Des mots d’amour, des mots de rien ,
    Et quant à fair’ des écriture s
    On écrirait bien nos murmure s
    Et leurs paroles qui d’habitud e
    N’ont pas l’certificat d’études…
    Quand il s’ra l’heur’ de foutr’ le cam p
    Comm’ des oiseaux qu’on fait leur temps ,
    Quand on f’ ra la dernièr’ jav a
    Au dancing dont on n’revient pas ,
    Tu m’diras « Crève », j’te dirai « meurs !
    Les voisins rest’ront tout songeurs ,
    On s’en foutra, toujours est-i l
    Qu’j’étais un chien… qu’avait du style…

L’IDOLE
    Je suis arrivé à huit heures et quar t
    J’ai grillé une sèche en lisant le courrie r
    Dans cette loge d’artiste où s’arrête la gloir e
    Le temps de se refaire une petite beaut é
    Regarde-moi bie n
    J’suis une idol e
    J’ai passé mes joues au fil du rasoi r
    Quand on vend sa gueule sous des projecteur s
    On peut pas se permettre d’avoir les cheveux noir s
    Et une barbe toute blanche même pour trois quarts d’heur e
    J’ai mis mes souliers tantôt bottillon s
    Tantôt mocassins ça dépend des foi s
    Et quant à marcher entre deux chanson s
    J’irais bien pieds nus seulement ça se fait pa s
    Regarde-moi bie n
    J’suis une idol e
    Si j’ai fait mes yeux c’est pour agrandi r
    Les deux petits quinquets que maman m’a donné s
    Je les voudrais bien verts d’ailleurs je le fais dir e
    Mais ils sont châtains en réalit é
    J’ai mis mon costume sorti du pressin g
    Ce vestiaire anglais où on lave

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