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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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meilleur que lui. » Dites-moi, Odoin, à qui
pensiez-vous ? Et que croyez-vous que pensera Théodoric, lorsqu’il lira
ces lignes ?
    Éludant ma question, Odoin répliqua simplement :
    — Vous n’êtes sûrement pas venu sans armes jusqu’ici,
Thorn, pour me mettre aux arrêts à mon tour.
    Je plantai mon regard dans ses yeux.
    — Vous êtes un vaillant guerrier et un général
efficace. Jusqu’à présent, vous aviez loyalement servi votre roi. C’est en
reconnaissance de ce passé que je suis venu vous permettre de prendre vos
dispositions et d’éviter la disgrâce qui vous est promise.
    L ’Historia Gothorum de Cassiodore mentionne que l’ herizogo Odoin fut, trois jours plus tard, en compagnie de ses nombreux complices,
décapité en place publique sur le Forum Romanorum. Et il le fut effectivement.
Mais ce que tous ignorent, hormis Artémidore, Hakat et moi-même, c’est qu’Odoin
était déjà mort trois jours plus tôt. Dans la plus noble tradition romaine, il
avait calé le pommeau de son épée entre deux carreaux de mosaïque et, appuyant
de tout son poids sa poitrine sur la pointe, s’était immolé devant moi,
s’affaissant au sol transpercé de part en part.
     
    *
     
    Ces événements eurent pour moi deux conséquences. La
première fut la conversation que j’eus avec Artémidore avant son départ de
Rome.
    —  Saio Thorn, commença-t-il, notre vénérable
pourvoyeur d’esclaves, le vieux Meirus le Boueux, sera bientôt en âge de
rivaliser avec son ancêtre Mathusalem et désirerait se retirer du commerce.
Aussi, avec votre permission, je souhaiterais me concerter avec lui quant à la
possibilité de trouver un nouvel agent à notre service à Noviodunum.
    — Vous l’avez, Artémidore, et ce n’est pas tout. J’ai
amassé plus de fortune que je ne pourrais en dépenser le reste de mon
existence, dussé-je dépasser en longévité Meirus et Mathusalem réunis. Or, avec
l’âge, je me suis lassé du commerce d’esclaves. Pour rien au monde je ne
souhaiterais en être un, c’est pourquoi je ne veux plus contribuer à en créer.
En conséquence, Artémidore (je lui tendis alors un papier préparé et signé à
son intention) je vous lègue l’intégralité de mes terres et ma résidence de
Novae.
    Il recula abasourdi et ce Grec, d’ordinaire si volubile,
sembla en avoir perdu la parole.
    — Prenez bien soin de l’endroit, je vous en prie, tant
du personnel que des animaux qui s’y trouvent. Tous m’ont procuré d’immenses
satisfactions.
    L’autre conséquence m’ayant personnellement affecté s’était
produite un peu plus tôt, le jour où j’avais laissé Odoin mort sur son sol de
mosaïque et avais regagné la maison de Veleda, afin d’y revêtir ma tenue
féminine la plus seyante et de libérer le jeune et élégant Hakat.
     
    *
     
    Depuis plusieurs années déjà, à mesure que je perdais de
l’intérêt pour les voyages, le commerce et les horizons lointains, d’autres
types de plaisir, naguère aussi urgents qu’irrésistibles, suivaient peu à peu
la même pente. Oh, je sais que je ne serai jamais totalement rassasié de toutes
les plaisirs sexuels, mais j’ai pu constater au fil du temps que j’en éprouvais
un besoin moins fréquent. Non que les partenaires potentiels se soient faits
plus rares, à vrai dire. Aujourd’hui encore, que je sois Veleda ou même Thorn,
je serais en mesure de faire mon choix dans le sexe opposé, pourvu que je
recherche un partenaire de mon âge. Mais quel homme ou quelle femme ayant passé
le bel âge de la jeunesse et de la beauté voudrait-il partager la couche d’un alter
ego tout aussi marqué que lui par les affres du temps ?
    Il y a bien longtemps, près des Bouches du Danuvius, j’avais
constaté, en observant le vieux couple composé de Fillein et Baúhts, qu’ils se
ressemblaient étrangement. À présent, lorsque je regardais autour de moi les
hommes et les femmes atteints par le vieillissement, je me rendais compte
qu’ils évoluaient de la même façon. Hormis leur tenue, les différences tenant à
leur sexe respectif semblaient s’être atténuées. Sans doute certains des hommes
devenaient-ils chauves alors que certaines femmes, au contraire, devenaient un
peu barbues, certains paraissaient décharnés alors que d’autres devenaient
obèses, mais tous finissaient peu à peu par arborer cette douceur et cette
tiédeur qu’engendre l’abstinence. Bien entendu, je ne suis pas allé voir ce

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