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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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sénateur Symmaque, au cours d’une fête donnée chez lui par le princeps
senatus de la ville de Rome. Il y avait là des personnages importants, dont
plusieurs sénateurs accompagnés de leurs épouses ; ainsi Boèce, le magister
officiorum de Théodoric, venu avec sa compagne, mais aussi Liberius, préfet
de la ville, et un nombre impressionnant d’autres notabilités de la cité. Ils
semblaient tous mieux informés que moi sur cette fameuse veuve et paraissaient
faire grand cas de ses extravagantes dépenses, les commentaires se répandant
rapidement sur ses projets concernant sa belle demeure.
    Une fois que les femmes se furent retirées du triclinium, laissant les hommes parler plus librement, le sénateur Symmaque nous livra
son opinion quant à cette femme mystérieuse. Il y prit, semble-t-il, un plaisir
tout particulier. Il faut dire que tout raide et sérieux qu’il parût, c’était
quand même lui qui conservait sous son porche d’entrée cette statue de Bacchus
au fascinum outrageusement érigé que certains de ses invités faisaient
semblant de ne pas voir en détournant soigneusement les yeux.
    — Cette femme… Melania, commença-t-il en savourant ses
révélations, est une opulente veuve venue de province. Mais elle est bien plus
qu’une femme d’un certain âge occupée à dépenser la fortune de son défunt
époux. Elle vient parmi nous inspirée d’une mission – que dis-je, d’une
vocation – que je qualifierais de quasi divine. Car ce qu’elle entend
faire de la demeure acquise sur l’Esquilin n’est pas seulement une résidence
aussi élégante que luxueuse, mais une véritable maison de rendez-vous de haut
de gamme, sans doute la plus extraordinaire depuis le temps de la Babylone
antique.
    — Allons bon, cette dame ne serait-elle donc qu’une
simple tenancière de bordel, une lena  ? s’enquit le préfet
Liberius. Elle a demandé une licence en bonne et due forme pour exercer cette
activité, au moins ?
    — Oh, rectifia Symmaque en gloussant, je n’irai pas
jusqu’à qualifier sa maison de « lupanar », le mot me paraîtrait un
peu exagéré. Pas plus que je ne parlerais d’elle comme d’une tenancière de
bordel… Je l’ai rencontrée et c’est une dame aussi gracieuse que distinguée.
Par ailleurs, elle m’a fait les honneurs de son établissement. Aller recourir à
un notaire pour obtenir une licence correspondant à ce genre d’endroit reviendrait
à en faire autant pour l’un des palais de Théodoric.
    — Cependant, s’il s’agit d’en faire un commerce…,
grommela Liberius, toujours tatillon quand il s’agissait de frais ou de taxes.
    Symmaque passa outre.
    — La demeure est certes luxueuse, mais elle n’est pas
si vaste et je la comparerais volontiers à un écrin précieux. On n’y admet
qu’un seul… euh, disons « client » chaque nuit. Encore faut-il qu’il
ait préalablement comparu dans une antichambre pour un entretien avec Caia Melania en personne. Elle le soumet à un interrogatoire en règle et ne se
limite pas à lui demander ses nom et prénom, son rang, son statut, s’assurant
qu’il sera en mesure de régler les sommes exorbitantes qu’elle réclame. Elle
s’enquiert aussi de ses goûts, inclinations et préférences les plus intimes. Y
compris de ses précédentes expériences avec les femmes, voyez-vous ?
Qu’elles soient respectables… ou qu’elles le soient moins.
    — Je ne vois là que l’expression d’une impudente
luxure, déclara Boèce. Allons, quel homme décent irait discuter avec la
première catin venue des mérites comparés de sa femme, voire de ses concubines,
simplement parce qu’elle lui en fait la demande ? Sur quoi portent ses
interrogations, au juste ?
    Symmaque fit un clin d’œil et posa un doigt sur l’aile de
son nez.
    — Ce n’est que lorsque Melania a suffisamment pris la
mesure de son vis-à-vis et soigneusement cerné ses goûts qu’elle fait un signe
discret à l’un de ses serviteurs. L’antichambre est entourée d’un certain
nombre de portes. L’une s’ouvre alors et le visiteur voit apparaître sur le
seuil la femme qu’il a le plus désirée au monde, celle dont il a toujours rêvé
depuis qu’il est sur cette terre. C’est en tout cas ce que m’a affirmé Melania,
et j’ai la faiblesse de penser qu’elle dit vrai. Ma foi, mes amis, si vous
saviez ce que je donnerais pour être un adolescent de soixante ans ! Et
même de soixante-dix, d’ailleurs. Je

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