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Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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un peu plus tôt.
    —  Akh, ça me rappelle le bon vieux temps,
s’exclama Dylas admiratif, et la conversation se poursuivit en gotique et en
latin. Mais tu n’es plus un légionnaire visant une promotion. Cette aventure
risquée t’a-t-elle au moins rapporté quelque chose ?
    — Un excellent prix pour mes fourrures, et en cadeau un
cheval et tout son harnachement. J’ai dû laisser sur place celui que m’avait
donné Calidius, mais je vais pouvoir en choisir un nouveau. Ces gages récompensent
mieux une journée de travail que toute ma carrière comme décurion.
    — Par les génisses d’Hertha, c’est mille fois
vrai ! Vois-tu, dès que j’ai su compter, j’ai pu calculer que mes trente
années de service m’ont valu aujourd’hui moins d’un demi -denarius par
journée de retraite. Mais dis-moi, n’as-tu pas passé l’âge, pour te lancer dans
ce genre de cabrioles et de simagrées ?
    — Parle pour toi, gros lard !
    — Quelle que soit la conjoncture, un cabaretier mange
bien, reconnut complaisamment Dylas, flattant de la main son ventre. Et il n’a
pas pour cela à arpenter les bois afin d’attraper la nourriture qu’il va se
faire cuire. Je l’ai toujours dit : toi et Juhiza, vous auriez dû ouvrir
une taverne comme nous l’avons fait. Ma vieille épouse Magdalan n’a jamais été
aussi belle que Juhiza, mais si elle n’a pas plus d’intelligence qu’une barre
d’attelage et la grâce d’un aurochs, elle sait au moins faire la cuisine.
    Comme si elle s’était sentie convoquée par ces mots, une
vieille et grosse femme négligée émergea de la pièce du fond, dans un nuage de
vapeur à l’arôme délicieusement parfumé. Elle nous apportait à chacun une
immense tranche de pain couverte de chou aigre bouilli, où grésillaient de
copieuses côtes de porc. Après avoir déposé tout cela devant nous, elle alla
chercher un plateau chargé de fromages de la région : morceaux de gruyère
et d’emmenthal, avec de blanches tranches d’un Neuchâtel des plus crémeux.
Comme boisson, nous eûmes droit, en plus du vin, à de grandes chopes d’une
bière brune que Dylas, très fier, affirmait avoir brassée lui-même.
    Dylas et Wyrd ne cessaient d’interrompre leur repas absorbé
à pleines mains en dessinant d’un doigt, parmi les flaques de vin répandues sur
la table, les schémas de bataille de jadis dans lesquelles ils s’étaient
distingués. Ils évoquaient des camarades tombés dans telle ou telle
échauffourée, et Wyrd corrigeait Dylas, à moins que ce ne fut le contraire,
quand l’un s’était perdu dans les détails de ces engagements, et l’on voyait
combien ces deux vieux guerriers avaient plaisir à faire revivre leurs années
de jeunesse. Mais toutes ces batailles avaient été livrées des années avant ma
naissance, dans des lieux dont je n’avais jamais entendu parler. Et comme les
deux hommes utilisaient souvent des mots de cette langue étrangère, je pouvais
difficilement me faire une idée de ce qu’avaient pu être ces combats, de qui
les avait gagnés ou perdus, et même de qui les avait livrés.
    Nous terminions de manger ce qui garnissait nos tranches de
pain, lesquelles étaient à présent délicieusement gorgées de bonne sauce, quand
un bruit mêlant tintements métalliques et craquements de cuir frappa nos
oreilles, et Paccius pénétra dans la taverne, en tenue de combat. Wyrd, secoué
d’un hoquet, s’excusa auprès de la compagnie et, en titubant légèrement, alla
s’asseoir à une table propre en compagnie du signifer, afin de le
diriger vers le camp des Huns et de le conseiller pour l’assaut.
    Juste pour alimenter la conversation avec Dylas, je
demandai :
    — Qui est, ou qui était Juhiza ?
    Il éclusa une nouvelle corne de vin et secoua sa grosse
tête :
    — Je n’aurais jamais dû lui remémorer ce nom. Tu as vu
à quel point le visage du vieux Wyrd s’est fermé ? Ne le mentionne plus
jamais devant lui.
    Je changeai donc de sujet :
    — Wyrd et vous avez l’air de vous connaître depuis fort
longtemps.
    Il ôta de la graisse de sa barbe. En réalité, il l’étala
distraitement dans ses poils.
    — Depuis que nous nous sommes rencontrés lui et moi
comme hommes de rang dans la Vingtième Légion. C’était à Deva [53] . Je me souviens quand on lui a
donné pour la première fois son surnom de Wyrd l’Ami des Loups.
    — Il se fait appeler maintenant Wyrd le Traqueur des
Bois, dis-je. Mais je sais qu’il

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