Titus
peuple, de votre Temple, de votre ville, et vous allez bientôt périr en toute justice !
J’ai senti le frémissement des soldats qui se trouvaient auprès de moi.
— Qui vous a aveuglés ? Qui vous a donné cette confiance ? Votre nombre ? a interrogé Titus. Une toute petite partie de l’armée romaine a suffi à vous mettre en échec. La fidélité de vos alliés ? Mais quelle nation, quel peuple pouvaient préférer les Juifs à Rome ? Votre force physique ? Les Germains sont nos esclaves et qu’êtes-vous, comparés à eux ? La solidité de vos remparts ? Ils n’ont pas résisté à nos machines de siège ! En fait, Juifs, c’est la bonté des Romains qui vous a fait vous dresser contre eux. Nous vous avons permis d’occuper cette terre, nous avons mis à votre tête des rois de votre race ! Vous avez repoussé nos propositions de paix ! Vous avez voulu tuer les Juifs de raison qui sont à mes côtés ! Vous avez rejeté votre roi Agrippa, votre reine Bérénice. Moi, j’ai voulu protéger votre Sanctuaire. Regardez autour de vous, maintenant ! Votre peuple n’est plus que cadavres ! Votre Sanctuaire, ruines ! Votre ville est à ma merci ! Vos vies sont entre mes mains ! « Écoutez-moi. Je vous parle pour la dernière fois. Je ne veux pas rivaliser de folie avec vous ! Si vous jetez vos armes et livrez vos personnes, je vous accorde la vie sauve comme un bon maître dans sa maison, châtiant l’incorrigible et préservant le reste pour moi-même !
J’ai vu les zélotes et les sicaires qui commençaient à reculer, puis quand ils eurent quitté le pont, ils crièrent qu’ils voulaient être autorisés à sortir de la ville avec leurs femmes, leurs enfants, leurs armes. Ils se retireraient au désert, et lui, Titus, serait maître de la ville.
Le visage de Titus s’est contracté. Les Juifs étaient dans la nasse et ils parlaient en hommes libres, posant leurs conditions.
— Je n’épargnerai personne ! a crié Titus. J’appliquerai les lois de la guerre.
Les soldats ont rugi.
Sur l’autre rive, la foule a reflué, couru dans les ruelles, disparu dans les maisons.
— Tuez, incendiez, pillez ! a alors lancé Titus.
Et les soldats se sont rués sur le pont.
Je suis entré à leurs côtés dans la ville haute que les flammes déjà dévoraient.
On se battait. On égorgeait. On piétinait les cadavres. Au bout de quelques heures, les zélotes et les sicaires abandonnaient les tours où ils auraient pu résister encore.
Ils se précipitaient sur les soldats les mains nues pour que la mort vienne plus vite. Ils disparaissaient dans les maisons où les soldats découvraient l’entrée de souterrains. On y jetait des torches et de la poix enflammée. On entendait des cris. On voyait surgir de terre des hommes, des femmes, des enfants que les flammes enveloppaient.
On tuait.
Les soldats pillaient, violaient, plantaient leurs enseignes au sommet des tours, chantaient, battaient des mains.
J’ai senti qu’ils étaient gorgés de meurtres et de sang.
Je me suis rapproché de Flavius Josèphe qui errait au milieu des flammes. Il enjambait les cadavres de son peuple. Il pleurait, répétant qu’au moins un million de personnes avaient péri dans cette guerre qu’il avait condamnée, cherché à interrompre, et qui n’avait laissé que ruines, souffrances et mort.
Nous avons rejoint Titus qui parcourait, acclamé par ses soldats, les ruines de Jérusalem.
Des centurions venaient de lui annoncer que Jean de Gischala et Simon Bar Gioras avaient été pris.
Jean avait réussi à quitter Jérusalem par un souterrain, mais dans un village voisin une patrouille de soldats l’avait arrêté. Il ne s’était pas défendu.
Simon Bar Gioras avait lui aussi surgi d’un souterrain, mais au milieu des ruines du Temple. Il avait cru que les Romains seraient saisis de frayeur en le voyant, grimé, drapé dans un suaire, paraissant revenir du royaume des morts. Mais un centurion l’avait menacé de son glaive et Simon Bar Gioras avait crié son nom pour avoir la vie sauve.
J’ai vu une moue de mépris et de dégoût déformer le visage de Flavius Josèphe. Ces deux chefs, ces deux brigands avaient préféré vivre en prisonniers, être traînés dans les rues de Rome et égorgés le jour du triomphe de Titus, plutôt que de mourir les armes à la main.
— Qui est traître ? Qui est lâche ? a-t-il murmuré, tourné vers moi.
Puis il a demandé à Titus
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