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Tragédies Impériales

Tragédies Impériales

Titel: Tragédies Impériales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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aimait le poète allemand Henri Heine, dont elle était passionnée. Et sur les ailes de la poésie, le temps passa très vite.
    Minuit était passé depuis longtemps et, plusieurs fois, le domino rouge s’était rapproché comme pour inviter son amie à se séparer du jeune homme quand, enfin, la dame au domino jaune murmura :
    — Je sais à présent qui tu es. Mais toi, pour qui me prends-tu ?
    — Pour une grande dame. Peut-être une princesse. Tout ton être le prouve…
    — Ne cherche pas à savoir. Tu finiras bien par me connaître un jour, mais pas aujourd’hui. Nous nous reverrons. Viendrais-tu, par exemple, à Munich ou à Stuttgart si je t’y donnais rendez-vous ? Je passe ma vie en voyages.
    — Je viendrai partout où tu l’ordonneras.
    — C’est bien. Je t’écrirai. Maintenant, conduis-moi jusqu’à un fiacre, mais ensuite, promets-moi de ne pas retourner dans la salle.
    — Je te le promets. Aussi bien, le bal sans toi n’aurait plus d’intérêt.
    Pourtant, comme ils descendaient le grand escalier pour gagner le péristyle de l’Opéra, toujours escortés du domino rouge, Fritz déclara :
    — Je voudrais pourtant bien apercevoir ton visage !
    Et, du bout des doigts, il essaya de soulever le volant de dentelle. Mais, plus prompte que lui, le domino rouge se jetait déjà entre lui et son amie. Puis, comme un fiacre s’arrêtait, elle y poussa sa compagne et, avant que le jeune homme fût revenu de sa surprise, la voiture s’éloignait au grand trot, tandis qu’il restait debout sur les marches, regardant fuir cet étonnant rêve en domino jaune.
    Cependant, à l’intérieur de la voiture, le domino rouge se laissait aller sur les coussins avec un soupir de soulagement :
    — Dieu que j’ai eu peur ! J’ai bien cru un instant que ce jeune insolent allait démasquer Votre Majesté.
    — Mais tu sais toujours si bien me garder ! D’ailleurs, il était charmant et je me suis bien amusée, ce qui n’est pas si fréquent. Aussi, ma chère Ida, aie la bonté de ne pas me gronder.
    Enlevant enfin son masque, s’adossa aux coussins et ferma les yeux, tandis que sa lectrice et confidente, Ida de Ferenczi, serrait les lèvres pour mieux retenir les respectueux reproches qu’elle s’apprêtait à faire. Mais après tout, cela n’aurait servi à rien. Cette escapade au bal avait été qu’un caprice bizarre, comme en avait parfois l’impératrice. Elle aimait imaginer qu’elle pouvait être une femme comme toutes les autres… et aussi, elle aimait à se prouver à elle-même que son charme, irrésistible même sous un masque, était toujours aussi puissant malgré ces fameux trente-six ans. Malgré aussi le fait que, depuis deux mois, était grand-mère. En effet, sa fille aînée Gisèle, mariée au prince Léopold de Bavière, venait de mettre au monde une petite et l'impératrice avait passé auprès d’elle, à Munich, un très agréable début d’année.
    Et puis, ce jeune Fritz avait eu le don de lui plaire, peut-être parce que atmosphère de Vienne avait encore effacé sur lui la senteur des grandes forêts Carinthie.
    En dépit des remontrances inquiètes d’Ida de Ferenczi, Élisabeth tint à écrire à Fritz Pacher von Theinburg. Elle le fit sous un nom d’emprunt, lui laissant entendre qu’elle pouvait s’appeler Gabrielle, à moins que ce ne fût Frédérique. Et même, elle lui indiqua une adresse poste restante qu’il pût lui répondre. Sa seule concession à la prudence fut de s’arranger pour que ses lettres à elle n’eussent jamais l’air d’avoir été postées à Vienne.
     
    « Je suis de passage à Munich pour quelques heures, écrivit-elle, et j’en profite pour vous donner le signe de vie que je vous ai promis. Avec quelle angoisse vous l’avez attendu, ne le niez pas. Je sais aussi bien que vous ce qui se passe en vous depuis cette fameuse nuit. Vous avez parlé à des milliers de femmes et vous avez cru, sans doute, vous amuser, mais votre esprit n’est jamais tombé sur l’âme sœur. Enfin, vous avez trouvé, dans un mirage étincelant ce que vous cherchiez depuis des années, mais pour le perdre sans doute à jamais… »
     
    À ce jeu étrange encore qu’un peu cruel, le jeune homme se prit. Il répondit des pages émues, passionnées, des pages qui posaient des questions « Pourquoi continuez-vous à faire la mystérieuse avec moi, Domino Jaune ? Je voudrais savoir cent choses de vous… »
    Élisabeth répondit

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