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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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d’ailleurs son ami Vaudreuil n’avait pas craint de faire insolemment jouer chez lui en privé et qui constituait, contre la monarchie, le plus dangereux des pamphlets politiques ?… Il n’y avait donc pas à s’étonner de cela, pas plus que des fréquentations louches d’une souveraine qui semblait se complaire, au contraire, à frôler le vice et le danger. Mais on pouvait tout au moins le déplorer et prier Dieu pour que toutes ces inconséquences n’aboutissent pas à un drame immense si les rats du quartier du Temple avaient licence de continuer à ronger les pieds dorés du Trône. Des pieds qui avaient perdu la lourdeur un peu écrasante du style Louis XIV pour la fragile légèreté du style Louis XV et de ce style « moderne » qu’affectionnait la Reine…
    En arpentant le Bosquet, Tournemine aperçut dans l’herbe quelque chose de blanc, le ramassa et vit que c’était un papier plié, échappé sans doute à l’un des deux personnages qui s’étaient tenus là. Il le mit dans sa poche. Puis, comme l’endroit n’avait vraiment plus rien à lui apprendre, il reprit à son tour le chemin du palais où les lumières s’éteignaient les unes après les autres dans les appartements.
    En arrivant dans la Cour de Marbre, il leva la tête vers les fenêtres obscures du Roi, aux prises avec une dernière hésitation qui ne dura qu’un instant. Tandis qu’il revenait à travers les jardins il avait, en effet, examiné soigneusement la conduite à tenir et décidé, finalement, de s’en tenir à sa seule consigne. Louis XVI avait dit : « Si la Reine se rend à Trianon… » Or la Reine, dont l’appartement seul était encore brillamment illuminé, n’était pas allée à Trianon mais venait de rentrer chez elle. Il ne restait donc à Gilles qu’à s’occuper de ses propres affaires car il se voyait mal rapportant au Roi le curieux spectacle qu’il lui avait été donné de contempler.
    Par contre, il apparaissait urgent d’en discuter avec la Reine elle-même. Il était plus que temps d’éclairer définitivement Marie-Antoinette sur le compte de la femme qu’elle autorisait, si malencontreusement, à organiser ses distractions nocturnes puisque, apparemment, et malgré son avertissement, Axel de Fersen n’en avait rien fait avant son départ…
    Une voix essentiellement suisse le tira de ses méditations. Ulrich-August débouchait du Grand Vestibule à la tête d’un piquet de compatriotes rouge et or, auréolés de fraises tuyautées et hérissés de hallebardes étincelantes telle une escouade d’anges exterminateurs.
    — Tu vas te coucher ? Tu as de la chance ! Je meurs de sommeil, moi, et j’en ai encore pour quelques heures !
    — Winkleried, mon ami, tu manges trop. C’est ton estomac trop rempli qui te donne sommeil. Mais si cela peut te consoler, je ne vais pas me coucher. J’ai encore une visite à faire…
    Il venait en effet de se rappeler qu’Anne de Balbi lui avait donné, rue de l’Orangerie, un rendez-vous comminatoire auquel il serait peut-être de bonne politique de se rendre. Si la jeune femme avait réellement convaincu Provence de le laisser vivre en paix, cela méritait tout de même quelque considération car, réduit à l’état de cadavre, Gilles n’aurait plus aucune chance de retrouver Judith, sinon dans l’autre monde.
    Mais quand il franchit le seuil de la chambre qu’il connaissait déjà et où le mena une servante maussade, il n’eut même pas le temps d’ouvrir la bouche et d’entamer la conversation : il reçut dans les bras un paquet parfumé de légères mousselines et de chair brûlante, tandis qu’une bouche avide et déjà délirante murmurait contre la sienne :
    — Tu es venu !… J’étais sûre que tu viendrais !… Je t’aime !… Oh ! je vais tellement t’aimer que tu ne pourras plus jamais t’éloigner de moi ! Viens… viens vite !
    Il comprit alors qu’il avait, sans le vouloir, menti à Ulrich-August et qu’il allait bel et bien se coucher… mais pas seul, ce qui faisait toute la différence car il ne serait pas beaucoup question de dormir dans ce lit vers lequel on l’entraînait. De toute façon, passer la nuit comme cela ou autrement, l’important était de ne pas se retrouver transporté comme par magie dans quelque château inconnu. Et, pour empêcher sa partenaire de songer à lui offrir de dangereux rafraîchissements, il prit bravement sa part du débat…
    Quand il la quitta à

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