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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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patience comme la vertu capitale par excellence, s’employait de son mieux à calmer les rages de son ami. Ainsi Judith, cent fois décrite, lui était devenue à ce point familière que la rencontrant dans une rue, il l’eût reconnue sans l’ombre d’une hésitation. Mais il n’ignorait rien non plus de son caractère difficile et les homélies à tournure philosophique qu’il délivrait périodiquement à son ami se terminaient généralement par une phrase lapidaire du genre :
    — Les femmes de caractère ça fait des épouses admirables mais il y a des moments où ça vous empoisonne sérieusement l’existence. Je ne suis pas du tout pressé de marier Ursula, moi ! Un jour viendra peut-être où tu regretteras le joyeux temps du célibat !
    — Je donnerais cher pour être certain d’en arriver là un jour, soupirait Gilles, et les deux amis, armés chacun d’une pipe s’enfonçaient alors dans un silence peuplé de pensées et de songes.
    Ceux du Breton étaient rarement gais. Il voyait autour de lui le ciel s’assombrir. Judith avait disparu sans laisser plus de trace que si quelque main géante l’avait tout à coup effacée de la surface de la terre. Quant à Madame de Balbi l’aventure forcée que Gilles vivait avec elle en était venue à lui peser singulièrement car il n’avait jamais éprouvé d’amour pour elle et le désir, privé des ailes de la passion, s’émoussait rapidement.
    Elle était trop intelligente pour ne pas s’en rendre compte et la plupart de leurs rencontres se muaient peu à peu en scènes désagréables, violentes de sa part à elle, excédées de celle du chevalier qui cherchait à rompre un lien dont on refusait farouchement de le libérer.
    — Je sais que tu ne m’aimes pas, mais cela m’est égal, disait-elle. Ce que je veux c’est te garder autant que je le souhaiterai. Prends garde ! S’il te prenait fantaisie de m’abandonner avant que je n’aie décidé notre séparation ! Prends garde, non à toi mais peut-être à ceux qui te sont chers…
    Alors, pour que Judith, dont il ne savait rien mais dont elle savait peut-être quelque chose, n’eût pas à souffrir des rancunes de cette femme, il restait…
    À Paris l’atmosphère n’était pas meilleure. Force était aux serviteurs de la Royauté de constater que la popularité de la Reine se détériorait avec une vitesse effrayante sans que d’ailleurs elle en eût conscience le moins du monde.
    L’annonce de sa nouvelle grossesse était accueillie, grâce aux nombreux pamphlétaires à gages de Monsieur ou des Orléans, par des libelles insultants et des sarcasmes dont le moins sordide chantait sur un air de gavotte :
     
    « Belle Antoinette
    Qu’importe d’où nous vient cet enfant
    C’est sans doute quelque planète
    Qui nous a fait ce doux présent
    Belle Antoinette… »
     
    Et le nom de Fersen, de Fersen qui était justement à Paris au moment de la conception de l’enfant, de voltiger sournoisement sur certaines bouches malintentionnées. On disait même que le comte de Provence avait l’intention de protester contre la légitimité des enfants de son frère par une lettre secrète adressée au Parlement. On disait… Que ne disait-on pas ? Et, durant ces tristes semaines, le fourreau de l’épée du Gerfaut alla s’abattre plus d’une fois sur les épaules d’un libelliste dont il avait réussi à découvrir l’identité, souvent aidé d’ailleurs par celui d’Ulrich-August qui voyait dans ces expéditions punitives une espèce de sport.
    — La saison de la chasse est ouverte ! disait-il en rossant joyeusement un scribouillard terrorisé qu’il finissait par arroser du contenu de son encrier.
    Mais il était plus difficile de lutter contre l’immense campagne de dénigrement qui se développait autour de Marie-Antoinette et à laquelle, malheureusement, elle ne fournissait que trop d’aliments.
    Dans les cafés, les clubs et sous les galeries neuves du Palais-Royal dont les travaux attiraient les curieux, on s’indignait des nouvelles de Versailles. Il y avait d’abord l’affaire du château de Saint-Cloud : pour achever justement ses énormes travaux, le duc d’Orléans souhaitait vendre son plus beau château et Marie-Antoinette poussait le Roi à le lui acheter pour la somme de six millions 1 .
    — Trianon ne lui suffit plus ! Il lui faut Saint-Cloud à présent, grondait la foule indignée. Elle arrivera bien à nous ruiner !
    Infiniment plus

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