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Un jour, je serai Roi

Un jour, je serai Roi

Titel: Un jour, je serai Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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faute car elle l’avait provoqué. Donc, elle seule serait punie, à commencer sur la terre, si elle babillait. « Tu deviendras la catin excommuniée », chuchota-t-il. « Aucun homme ne voudra de la fille du démon qui a couché avec le prêtre, si tu racontes ce que tu as fait . » Elle était partie ainsi, attendant la fin du service pour laver à l’eau fraîche ses chairs meurtries dans la cuisine.
    Des remords, Marolles n’en avait jamais connu. Si elle passait dans un couloir, elle baissait les yeux, lui les laissait ouverts, sévères, inquiétants. Oui, elle gardait son secret et Marolles se prit à rêver qu’il pouvait renouveler l’expérience. Il résista un temps, tremblant de désir, repoussant ses envies et se donnant autant de bonnes raisons d’y céder. Un soir, il se décida. Marie passait dans un couloir, il la saisit par la taille. Elle lutta, mais il était fort. Ses mains s’accrochèrent. Il comprit que son ventre était rebondi. Il paniqua, exigea un autre péché : qu’elle avorte – ce qui, pour lui, n’était pas tout à fait tuer. Marie s’y refusa ; d’ailleurs, il était trop tard ; et Paillard apparut. Marolles avait-il voulu sa mort ? Elle l’arrangeait et, pour pénitence, il restait ce fils, punition de Dieu, que la peur de courroucer trop de fois les cieux avait empêché d’étrangler. Qui saurait qu’il était son père ? Eh bien il porterait sa croix, synonyme, dans cette cervelle noire, de rachat d’une partie de ses fautes.
    Cette vérité complète, seul Calmés l’avait entendue. Marolles, toujours à genoux, répétait qu’il avait aimé Marie et qu’il pleurait sa mort. Le manchot, lui, ne bronchait pas. Il gobait, Marolles se crut sauvé. Mais dans la tête de Toussaint les questions se bousculaient. Cet homme n’avait pu confier Marie à l’ignoble sorcière sans mesurer les risques. Et pourquoi s’était-il tu quand son fils, à seize ans, l’avait supplié de lui révéler de qui il était ? Aussi, ne relâcha-t-il pas son attention. Quand du bruit se fit entendre. Le valet revenait, et il n’était pas seul. Delaforge rangea son arme. Marolles se redressa.

    On se précipita d’abord sur le marquis, constatant qu’il était roide. On entoura alors Delaforge, sur la foi du témoignage du valet qui le montrait du doigt et répétait qu’il avait entendu comme des cris et le commencement d’une querelle. Pendant ce temps, une femme de ménage s’occupait d’Aurore qui revenait peu à peu à elle. Marolles se taisait. Si on le questionnait, il répondrait qu’il était arrivé trop tard, après les événements, et qu’il ne pouvait témoigner de rien. De fait, il attendait prudemment qu’Aurore s’exprime. Si elle accusait Toussaint de la mort de son père, c’en serait fini du manchot, et personne ne pourrait prétendre que le jésuite avait cherché à lui nuire. Aussi s’occupait-il en se penchant sur le défunt, bafouillant une prière, le corps tourné vers le sol afin qu’on ne voie pas les tremblements de ses mains. Pas une fois il ne regarda son fils ou chercha à le protéger, ce qui persuada Toussaint que Marolles restait lui-même. Des pans de son histoire demeuraient sombres. Quel secret cachait-il encore ? Il ne vint pas à Delaforge l’idée que Marie avait été violée. De même, il ne mit pas en doute le fait que ce révérend fût son parrain et son père. Pour l’heure, il fallait s’en sortir, d’autant que la garde survenait.
    On put enfin interroger Aurore qui confirma que Delaforge était connu d’elle et du marquis, qu’il s’agissait d’un orphelin accueilli par le passé et qu’il était sans doute venu présenter ses condoléances. Ne pouvant mieux plaider sa cause, l’incriminé acquiesçait en silence, tandis qu’il prenait peu à peu la mesure de ce qu’avait révélé Marolles. Après ça, quel sort réserver à celui qu’il haïssait ? Rien ne se produisait comme prévu ! Le dégoût s’installa, sa bouche se satura de bile. La désillusion était terrible. Ce qu’il espérait depuis si longtemps se montrait enfin, pour un résultat détestable.
    Delaforge en était là, perdu au milieu de la cohue, tandis que la fille de La Place achevait son récit dont il ressortait que Toussaint n’était aucunement responsable de ce qui devint un accident. Pour une raison qui resterait mystérieuse, Voigny avait surgi du cabinet de travail, la miséricorde en main. Avait-il l’intention de s’en

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