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Un mois en Afrique

Un mois en Afrique

Titel: Un mois en Afrique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre-Napoléon Bonaparte
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arriver à ma destination, et je me séparai de lui et du général, en leur promettant que je passerais à tout prix.
Le lendemain, de bonne heure, je fis mes adieux, non sans émotion, à mon excellent colonel et à MM. les officiers de la Légion, et je partis à la tête du convoi, avec mon adjudant-major, M. Bataille, aujourd'hui chef de bataillon, qui se rendait à Batna. Notre allié le marabout Si-Mokran, dont j'ai déjà parlé, se joignit à nous avec une douzaine de cavaliers. Nous marchions lentement, à cause de la longue file de mulets d'ambulance qui portaient nos blessés et nos malades dans des cacolets, ou bien dans des lits parfaitement adaptés aux bâts, pour ceux à qui leur état ne permettait pas de garder une position perpendiculaire.
    Ce système de transports est admirablement entendu ; il est toujours praticable dans toute espèce de terrain, et il peut devenir rapide en cas de nécessité absolue. Les lits, il est vrai, ont l'inconvénient de prendre, suivant la pente du sol, des inclinaisons diverses, qui, parfois, laissent la tête du blessé beaucoup plus bas que les pieds. Cela doit être douloureux et d'autant plus dangereux qu'on ne place dans les lits que les hommes gravement atteints ; mais on pourrait, je crois, remédier à cette imperfection par un système de bascule, au moyen duquel le lit serait toujours maintenu dans la même direction. Quoi qu'il en soit, ce mode de locomotion, pour les ambulances, est le plus militaire, le plus expéditif et le plus universellement applicable qu'on puisse imaginer.
Nous fîmes halte aux deux tiers du chemin, et nous arrivâmes de bonne heure à Biscara, où je trouvai M. le colonel de Mirbeck, qui me retint à dîner. J'allai voir les blessés alités à la casbah, parmi lesquels étaient les capitaines Butet et Touchet, blessés sous mes ordres le 25. Le premier allait déjà beaucoup mieux, et je l'ai revu depuis à Paris. La blessure du second était plus grave, et l'on m'a assuré qu'il en souffre encore. Je revis également le brave commandant Gujot, filleul de l'empereur, mais, hélas ! dans quel état ! La plaie suppurait abondamment par la bouche et répandait une odeur corrompue qui me fit craindre pour sa vie. Je quittai, les larmes aux yeux, cet intrépide officier, pour qui la parité de grade et les autres raisons que j'ai signalées m'inspiraient le plus vif intérêt. En lui serrant la main, je fis des voeux pour que ce ne fût pas la dernière fois ; mais il était écrit qu'ils demeureraient stériles, et que l'armée regretterait un de ses plus nobles enfants.
    Le 31, dès que le jour commença à poindre, je me mis en route avec un détachement de chasseurs et spahis, aux ordres de MM. d'Yanville et Lermina. Pour arriver à temps à Philippeville, y prendre le bateau à vapeur d'Alger, et afin de dérouter les partis ennemis, nous doublâmes l'étape. A El-Outaïa, où nous fîmes halte, Déna et quelques-uns de ses spahis bleus, dont j'avais déjà eu lieu de reconnaître l'utile intelligence, accrurent mon escorte. Le soir, nous étions à El-Kantara, après avoir fait cinquante-huit kilomètres dans la journée. Nous reçûmes l'hospitalité du caïd, et nous passâmes la nuit sous la sauvegarde de sa fidélité.
Le lendemain, même journée. Notre halte se fit à El-Ksour, où Déna nous quitta. Je lui donnai en souvenir un pistolet à deux coups dans le même canon, dont il avait remarqué la justesse en me voyant tirer un corbeau pendant la marche. Nous arrivâmes à Batna fort avant dans la nuit ; nous avions parcouru une double étape de soixante-onze kilomètres.
M. le lieutenant-colonel de Caprez me reçut avec sa cordialité accoutumée, et m'installa dans le quartier de M. le colonel Carbuccia. Il m'apprit que je rencontrerais, avant d'arriver à Constantine, une partie des renforts attendus à la colonne. Le lendemain, avec M. Osman, jeune lieutenant indigène, et quelques-uns de ses spahis, j'allai coucher à Aïn-Yagout.
Le surlendemain, 3 novembre, près du lac salé dont j'ai parlé, nous fîmes une chasse fort singulière. M. Osman ayant aperçu, fort loin dans la plaine, une hyène qui se dirigeait vers les montagnes à droite, deux ou trois de nos spahis se mirent à sa poursuite. Ils la rejoignirent bientôt et lui tirèrent, sans l'atteindre, plusieurs coups de fusil. Mettant le sabre à la main, un de ces cavaliers lui porta alors un coup de pointe, qui la blessa très légèrement ; mais

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