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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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« Frère
Thomas, quand vous êtes arrivé au prieuré, vous souffriez d’une blessure
d’épée, je crois. »
    Les moines se figèrent pour écouter.
    « Oui, répondit l’interpellé, le regard de pierre.
    — Et par suite de cette blessure, vous avez perdu
l’usage de votre bras gauche. Je m’interroge : quand vous avez reçu cette
blessure, étiez-vous au service de la reine Isabelle ? »
    Thomas pâlit. « Je suis moine à Kingsbridge depuis dix
ans. Ma vie antérieure est oubliée. »
    Murdo ne se laissa pas démonter. « Je posais cette
question au regard de la terre que vous avez offerte au prieuré lors de votre
admission. Cinq cents acres très fertiles dans un petit village du comté de
Norfolk. Près de Lynn... Là où vit la reine, justement. »
    Godwyn intervint, feignant l’indignation. « Que peut
savoir un étranger des propriétés possédées par le prieuré ?
    — Oh, ces choses-là ne sont pas secrètes. Il suffit de
lire les chartes ! » répliqua Murdo.
    Godwyn tourna les yeux vers Carlus et Siméon. Assis l’un à
côté de l’autre, ils avaient l’air ébahis. De par leur position respective de
sous-prieur et de trésorier, ils étaient au courant de la situation. Ils
devaient se demander comment Murdo en avait eu connaissance. Siméon ouvrit la
bouche pour parler.
    Murdo le devança : « En tout cas, ces informations
ne sont pas censées être secrètes. »
    Siméon referma la bouche. Il ne pouvait exiger de Murdo
qu’il révèle ses sources sans se voir demander pourquoi lui-même avait si
longtemps gardé le silence sur cette question.
    Murdo poursuivait : « Et la ferme de Lynn a été
offerte au prieuré par... la reine Isabelle...», dit-il après une pause
emphatique.
    Godwyn promena les yeux sur l’assemblée. À l’exception de
Carlus et de Siméon qui gardaient tous deux un visage impassible, les moines
affichaient tous une expression consternée.
    Murdo se pencha par-dessus la table. « Je vous le demande
encore, articula-t-il d’une voix plus agressive, et l’on put voir, coincés
entre ses dents, de petits brins verts provenant du ragoût. Étiez-vous au
service de la reine Isabelle quand vous avez reçu cette blessure ?
    — Tout le monde est au courant que j’ai été chevalier
autrefois, répondit Thomas. Que j’ai livré bataille et tué des hommes. Je m’en
suis confessé et j’ai reçu l’absolution.
    — Un moine peut se permettre de laisser son passé
derrière lui. Le prieur de Kingsbridge porte un fardeau plus lourd. Il peut se
voir questionner sur l’identité des personnes qu’il a tuées et sur ses raisons
d’agir ainsi. Et, le plus important, quelle récompense il a reçue pour ses
actes. »
    Thomas regardait Murdo sans ciller. Godwyn s’efforça de
déchiffrer son visage. Assurément, on y lisait une forte émotion, mais
laquelle ? Ce n’était nullement la culpabilité ou l’embarras : quel
qu’ait été son secret, Thomas ne considérait pas avoir accompli un acte
honteux. Ce n’était pas non plus la fureur, bien que le ton pris par Murdo eût
pu pousser à bout nombre d’hommes. Mais Thomas ne semblait pas sur le point
d’éclater. Non, le sentiment qui l’agitait était de nature différente, plus
froid que l’embarras, plus muet que la fureur. C’était, comprit enfin Godwyn,
l’effroi. Thomas avait-il peur de Murdo ? C’était difficile à croire. Non,
il craignait visiblement que les révélations de Murdo ne déclenchent un
événement néfaste, que la découverte de son secret ne soit suivie d’une
conséquence désastreuse.
    Murdo enchaînait, tel un chien rongeant son os. « Si
vous ne répondez pas à cette question, ici, dans cette salle, sachez qu’elle
vous sera posée en un autre lieu. »
    Arrivé à ce point de non-retour, Thomas ne pouvait que
capituler, songea Godwyn. Cependant, rien n’était joué. Thomas était un dur.
Dix ans durant, il avait fait preuve de calme, de patience et de soumission.
Quand il avait accepté de se présenter à l’élection du prieur, il croyait
certainement que le passé était enterré. Comprenant maintenant qu’il s’était
trompé, comment allait-il réagir ? Allait-il admettre son erreur et
retirer sa candidature ? Allait-il serrer les dents et poursuivre malgré
tout ? Godwyn attendit, se mordant les lèvres.
    Thomas finit par déclarer : « Il est possible en
effet que l’on me pose la question en d’autres lieux et je pense que

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