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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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aussitôt mettre les drapeaux en berne, décréta un deuil de trois jours et annonça l'accession au trône, sous le nom d'Édouard VII, du prince de Galles. Âgé de soixante ans, marié à la princesse Alexandra, fille du roi Christian IX de Danemark, le fils aîné de Victoria passait pour un joyeux fêtard, parieur invétéré, grand amateur de femmes et de chevaux.
     
    Lord Pacal se trouvait à Nassau quand l'événement survint et il ordonna à John Maitland d'amener, à mi-mât, le pavillon du Lady Ounca . Lizzie Ferguson assura qu'on ne trouvait plus dix centimètres de crêpe noir à Nassau, tous les sujets de la défunte souveraine souhaitant porter le deuil. Il en était de même à Londres, ce que l'on ne sut que plus tard dans l'archipel, en même temps que l'on apprit que Victoria avait exprimé la volonté formelle d'être enterrée dans une robe blanche et de voir les tentures noires des cérémonies remplacées par des tentures rouges ! Si l'on parvint in extremis , à Londres, où des foules denses et recueillies assistèrent aux funérailles, à respecter les volontés de la reine morte, il n'en fut pas de même à Nassau, où les exigences de Victoria furent connues une semaine trop tard.
     
    On vit lord Pacal aux offices célébrés à la cathédrale anglicane et, dès son retour à Soledad, il constata que le portrait de la reine avait été, partout, des bureaux du port au Loyalists Club, voilé de crêpe. Le pasteur Michael Russell avait attendu l'arrivée du maître de l'île pour célébrer l'office des morts.
     
    Dans son homélie, le vieux ministre de la Haute-Église rappela ce qu'avait écrit la jeune Victoria, âgée de dix-huit ans, au jour de son avènement, texte rendu public avec l'autorisation de Sa Très Gracieuse Majesté le roi Édouard VII.
     
    – « Puisqu'il a plu à la Providence de me mettre à cette place, je ferai tout mon possible pour accomplir mon devoir envers mon pays ; je suis très jeune, et, en bien des choses, sinon en toutes, très inexpérimentée ; mais je suis sûre que peu de personnes ont plus de bonne volonté et un plus réel désir de faire ce qu'il faut et ce que l'on doit 3 . » À l'âge de douze ans, elle avait promis d'être sage et l'a été. Reine, elle a toujours fait ce qu'il fallait pour notre Empire. Elle nous laisse, à tous, le plus bel exemple du sens du devoir, de la moralité, de la fidélité conjugale, conclut le pasteur.
     

    En février, lord Pacal dut se rendre en Angleterre, où sa grand-tante, Mary Ann, veuve de sir William Gordon, dit Willy Main-Leste et gardienne de Cornfield House, à Belgravia, était morte, à l'âge exceptionnellement avancé de quatre-vingt-quatorze ans. Avec la sœur de lord Simon, jusqu'à son dernier jour très lucide, disparaissait la dernière représentante d'une génération Cornfield. À Londres, Pacal fit célébrer, à Saint Paul, une messe des morts à sa mémoire. Un orchestre et les choristes de la cathédrale interprétèrent un requiem pompeux. Répondant au faire-part, les derniers amis survivants de lord Simon se déplacèrent, ce qui donna l'occasion à Pacal de revoir lady Jane Kelscott, dont le père avait quitté ce monde et dont la mère, impotente, l'esprit égaré, ne sortait plus de chez elle. À l'issue de la cérémonie, le Bahamien s'entretint avec son amie.
     
    – Vous avez l'air d'un militaire, s'étonna-t-il.
     
    Et il détailla la curieuse toilette de la jeune femme : jupe longue et vareuse bleu foncé, avec col officier frappé de deux S brodés au fil d'or, chapeau de paille bleu marine, genre cabriolet, retenu sous le menton par un ruban rouge.
     
    – Militaire, je le suis : major de l'Armée du Salut, pour vous servir, vous aider à vaincre vos turpitudes et sauver votre âme ! répondit-elle gaiement.
     
    Lord Pacal ignorait tout de cette œuvre, fondée à Londres en 1865, par William Booth, protestant méthodiste, sous le nom de Mission chrétienne, devenue depuis Armée du Salut.
     
    – Notre mission consiste à relever les âmes déchues, à les convertir, pour les ramener à Dieu. Notre mouvement a été persécuté, jusque dans les années 90, mais maintenant, il est partout admis et respecté, parce que fort utile pour lutter contre la misère, l'alcoolisme, l'incroyance. Nous avons des adhérents dans la plupart des pays protestants. Seule, la Suisse nous a interdit son territoire pendant quelques années.
     
    – Une organisation

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