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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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les sermons du vieux pasteur Russell beaucoup plus compréhensibles que ceux de l'évêque de Boston. Elle fut initiée au lawn tennis par Janet, la fille cadette des Maitland, son aînée d'un an, qui devint son amie. Le 25 août, jour de son anniversaire, un lad lui amena le poney et le sulky offerts par son père. À la demande de Pacal, Varina García Padilla organisa, au manoir, un goûter auquel furent conviées toutes les adolescentes du Cornfieldshire.
     
    Au soir de ses douze ans, Martha embrassa tendrement son père, pour la première fois depuis leur réunion, et essuya une larme, en disant combien la vie à Soledad lui semblait différente de celle dont on lui avait, maintes fois à Boston, brossé un tableau repoussant.
     
    Pacal, ravi, eut du mal à cacher son émotion. Il s'était appliqué, depuis l'arrivée de sa fille, à ne pas susciter, ni même encourager, de confidences sur son enfance bostonienne. Il l'avait traitée en visiteuse privilégiée, mais avec la distance de qui n'attend aucune démonstration de tendresse filiale. À Nassau, Lizzie, qui n'ignorait rien des soucis de son amant, lui avait dit : « Laissez-la faire le premier pas. Il faut qu'elle découvre seule qu'on lui a longtemps menti. Alors, elle verra en vous le père digne d'amour duquel on l'a injustement privé. »
     
    Ce pas décisif étant franchi, les rapports entre père et fille devinrent affectueux et confiants. Le jour de juillet où le premier ouragan de la saison déferla sur l'archipel, quand les vents d'est, hurlant comme chiens enragés, déboulèrent dans la cuvette du Cornfieldshire, quand elle vit les palmiers royaux du parc de Cornfield Manor, ployer à se rompre en gesticulant de toutes leurs palmes, Martha, effrayée, fit irruption dans le bureau de Pacal.
     
    – N'ayez pas peur, le manoir est solide, dit-il, abandonnant ses dossiers pour lui tendre les bras.
     
    – Avec vous, je n'ai peur de rien, dit-elle en se lovant, telle une chatte frileuse, contre son père qu'elle était maintenant sûre d'aimer.
     
    Martha avait entendu, chaque soir à Boston, la gouvernante faire la lecture des journaux à tante Maguy, malvoyante. Aussi, marquait-elle, avec sa précoce maturité, beaucoup de curiosité pour ce qui se passait dans le monde. Lord Pacal ne pouvait qu'encourager ce désir de savoir et, c'est avec l'adolescente, qu'il prit l'habitude de commenter les événements relatés par The Nassau Guardian et les publications que livrait le bateau-poste. La chute du campanile, sur la place Saint-Marc à Venise, le couronnement d'Édouard VII, à Londres, la fin de la guerre des Boers retinrent plus l'attention de Martha que l'installation, à Cuba, de Tomás Estrada Palma, président d'une république sous tutelle américaine. Le gouvernement des Bahamas annonçait que la colonie avait, en 1902, rapporté à la Grande-Bretagne plus de trois cent mille dollars.
     

    Lors de son premier séjour à Nassau, pour découvrir le Queen's College, où elle préparerait, dès l'année suivante, l'examen d'entrée au Rutgers College, Martha fit, en novembre, la connaissance de Lizzie.
     
    – Liz Ferguson est, depuis longtemps, une amie chère et ma cavalière habituelle – ici on dit escort  –, lors des réunions mondaines où je dois parfois me rendre, précisa Pacal, afin de prévenir toute question.
     
    L'adolescente et Lizzie se plurent instantanément et ce fut ensemble, avec lord Pacal, qu'elle virent la première automobile en circulation aux Bahamas. Ce véhicule, une Oldsmobile 1902, importée par Henry Mostyn, consul des États-Unis, faisait sensation en vllle. Construite par Ranson Elie Olds, fondateur, en 1896, à Detroit, Michigan, de la Olds Motor Vehicle Company, cette Curved Dash, propulsée par un moteur à pétrole raffiné, roulait à près de quatorze miles à l'heure. Le diplomate avait payé six cent cinquante dollars l'engin carrossé de tôle noire avec filets rouges. Deux personnes s'y tenaient à l'aise et le conducteur le dirigeait au moyen d'un levier à main, pivotant. Au long des trottoirs de Bay Street, les badauds s'arrêtaient pour voir passer le consul et son épouse dans leur char pétaradant. The Nassau Guardian publia une photographie du couple, à bord de l'automobile. Plus de trois mille véhicules de ce type circulaient déjà aux États-Unis et cinq cents constructeurs, dont Henry Ford, fondateur de la Ford Motor Company, produisaient des véhicules à

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