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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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Saint-Just, Billaud-Varenne revenu de mission. Pache parla des tentatives accomplies pour affamer le peuple. Ici on avait enterré des vivres, là convaincu les paysans de retenir leur grain, là encore on tuait des génisses pleines, là enfin on exhortait les ouvriers à se révolter contre la taxation des salaires. Tout cela, selon le maire, était lié au complot des Hébertistes agissant avec l’Angleterre pour porter Louis XVII sur le trône avec un régent, après dissolution de la Convention. Le cabinet de Saint-James conclurait la paix, reconnaîtrait le nouveau gouvernement de la France et le ferait admettre par les autres cours européennes.
    Billaud-Varenne dit alors qu’il fallait décidément en finir avec Hébert, mais aussi avec tous les prisonniers du Temple, et avec Danton. À quoi Robespierre répondit sèchement que l’on verrait plus tard. Pour l’instant, il s’agissait de frapper la faction des ultras sans leur laisser aucun moyen de réagir. Saint-Just fut chargé de préparer un rapport à la Convention, sur le complot. Mais on n’attendrait pas le vote de l’Assemblée pour agir.
    Chacun des présents avait juré le secret. Tout le monde tint sa promesse. Le 23 ventôse – 13 mars –, quand Saint-Just lut, devant les deux Comités réunis, son projet de discours, ce fut une surprise agréable pour Carnot, Prieur, Lindet. Tous les membres du Comité de Salut public étaient là de nouveau, sauf Jean Bon Saint-André presque continuellement en mission auprès des escadres, voire en mer avec l’une ou l’autre. Collot d’Herbois et Billaud ne dirent rien. Ils abandonnaient les Hébertistes comme Claude avait abandonné à une nécessité horrible Vergniaud, Lesterpt-Beauvais, Barnave, Marie-Antoinette. Cette fois, il ne pouvait s’empêcher de ressentir un cruel contentement : les ultras allaient payer leur acharnement contre tant de victimes, que, sans eux, on eût pu épargner. Ils se noyaient dans ce sang-là, aujourd’hui. Combiens de vies aurait-on sauvées si, tout de suite après la mort de l’Ami du peuple, il avait été possible d’envoyer à la guillotine trois ou quatre passe-Marat !
    Dès l’ouverture de la séance de relevée, Saint-Just prit place à la tribune de la Convention pour lire son Rapport sur les factions de l’Étranger et sur la conjuration ourdie par elles dans la République française pour détruire le gouvernement républicain par la corruption et pour affamer Paris.
    Ce seul titre, avec ses termes soigneusement pesés, disait d’avance que le discours ne visait pas uniquement les Hébertistes. Non point la faction, mais les factions. Et le mot corruption touchait aussi bien l’entourage de Danton, les Chabot, les Bazire, les Fabre, sinon Danton lui-même. Claude avait approuvé, espérant que l’exemple dont cet avertissement allait s’accompagner vaincrait enfin l’obstination coupable de Danton et de Desmoulins.
    « Je viens, dit Saint-Just, vous payer, au nom du Comité de Salut public, le tribut sévère de l’amour de la patrie. Je viens vous dire, sans aucun ménagement, des vérités âpres, voilées jusqu’aujourd’hui. Je vous parle avec la franchise d’une probité déterminée à tout entreprendre, à tout dire pour le salut de la patrie. » Le rapport s’appuyait sur les pièces réunies par Fouquier-Tinville, mais ne nommait personne. Saint-Just ne cita que les coupables déjà emprisonnés : Desfieux, Proli, Chabot, Fabre, Bazire ; néanmoins il désignait clairement les hommes des deux partis extrêmes. « Tous les complots sont unis, affirma-t-il, ce sont des vagues qui semblent se fuir, et qui se mêlent cependant. La faction des Indulgents veut sauver les criminels, et la faction de l’Étranger se montre hurlante parce qu’elle ne peut faire autrement sans se démasquer, mais elle tourne la vérité contre les défenseurs du peuple. Toutes ces factions se retrouvent, la nuit, pour concerter leurs attentats du jour. Elles paraissent se combattre pour que l’opinion se partage entre elles. Elles se rapprochent ensuite pour étouffer la liberté entre deux crimes. »
    Danton était là qui écoutait, les bras croisés sur sa large poitrine. Entendait-il l’avertissement ? Saint-Just poursuivit, fustigeant Hébert sans le nommer : « Celui-là se déguise qui s’est déclaré le chef d’une opinion et qui, si ce parti a le dessous, déclame contre sa propre opinion, pour tromper ses juges et le

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