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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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d’Orange et de Beaulieu avant que Cobourg n’accourût avec des renforts. Jourdan, mal à l’aise sur un pareil champ de bataille, observa qu’Orange, alerté depuis midi par le canon de Charleroi, ne leur laisserait assurément pas le temps de se retrancher. Le meilleur moyen de prévenir une offensive consistait à la prendre soi-même.
    « Nous attaquerons demain à l’aube, décida-t-il.
    — Puisque vous y voilà résolus tous les deux, répondit Bernard, je me rends. Mais dans ce cas, il importe d’installer dès à présent un parc sur la route de Gosselies, car Kléber est beaucoup trop loin pour envoyer ses caissons s’approvisionner sur la rive droite. Tu t’en charges, Antoine ? »
    Malinvaud fit pivoter son cheval et rendit la main. L’état-major retourna vers le village de Gilly, au grand quartier. Le soir tombait sur les faibles ondulations de la campagne. Il n’avait pas fallu moins de six heures pour parcourir le demi-cercle du front. Dans le ciel jaune et rouge, l’Entreprenant, irradié, était comme un autre soleil. Sous lui, s’étalait le camaïeu vert des prairies, les champs de blé jaunissant, avec les boursouflures des bois, les routes blanches, les méandres des ruisseaux et le scintillement de la rivière. L’aérostat n’envoyait aucun message. Bientôt il se mit à descendre, ramené par son câble, tandis que la brume formait lentement des écharpes sur les cours d’eau. « Elle ne peut pas servir à grand-chose, cette machine, dit Jourdan en haussant les épaules. Je me demande bien pourquoi on nous encombre de ça. » Du côté de Charleroi, la canonnade grondait. Les grosses pièces de siège étaient maintenant en action, on sentait l’ébranlement de la terre et de l’air lorsqu’elles tiraient en salves. Après un rapide souper, Saint-Just repartit à cheval avec Le Bas vers la place. Jourdan donna l’ordre de marche général pour le lendemain, 28 prairial, à quatre heures du matin. Bernard et lui déterminèrent la composition, l’emplacement des réserves, leurs points de progression derrière les corps engagés. Puis, laissant les officiers d’état-major décomposer ces ordres en détails, les dicter aux secrétaires et les faire transmettre par les aides de camp, ils allèrent eux aussi, avec leur escorte et les porte-fanions, dont Sage, bien entendu, se rendre compte de l’état du siège.
    La nuit brumeuse était rousse, toute colorée par les lueurs des canons dont le feu ne discontinuait pas. Ils entouraient d’une ceinture rugissante et foudroyante la vieille place fortifiée jadis par Vauban. Les obus, les bombes dont on pouvait suivre les courbes fumeuses, la fouillaient tandis que les boulets de gros calibre frappaient coup après coup, comme des béliers, les mêmes endroits sur ses murailles. Un halo rougeâtre, fait de poussière, de fumée illuminées par le reflet des incendies, planait au-dessus de la ville et se réverbérait sur les lignes des assaillants. Sans la brume, on aurait vu presque comme sous des lustres. Dans le brouillard teinté de cuivre et saturé de soufre, des chevaux, des caissons, des hommes passaient en groupes confus. Au milieu du tonnerre, on entendait des ordres hurlés par des fantômes, et parfois des cris, des gémissements poussés par des blessés. Car la garnison tirait elle aussi de toutes ses pièces, mais ses projectiles ne frappaient qu’au hasard. Ceux des assiégeants, au contraire, concentrés sur l’objectif, produisaient des ravages. Ne voulant pas s’attarder en longs travaux, l’ingénieur général Marescot cherchait à faire brèche dans la muraille en battant sans répit les points selon lui les plus faibles. Comme Bernard et Jourdan venaient de le rejoindre au bord de la rivière où, avec le général Hatry, il modifiait l’installation d’une batterie de mortiers, un officier du génie accourut. Dans le rentrant de l’enceinte, à l’est, annonça-t-il, un redan commençait de s’écrouler.
    « C’est bon, dit l’ingénieur, nous allons mettre là-dessus toutes les pièces de ce côté. Demain, j’en suis sûr, citoyens, nous aurons effondré suffisamment de muraille pour pouvoir donner l’assaut. »
    Jourdan et Bernard retournèrent au grand quartier pour prendre un peu de repos. Bernard, à demi dévêtu, dormait lorsqu’il se sentit secoué par l’épaule. C’était Malinvaud, une chandelle à la main. « L’ennemi attaque nos positions », dit-il. Toute la

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