Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
Vom Netzwerk:
Malgré les exécutions massives pour décimer les conspirateurs des prisons, les royalistes et les prêtres entretenaient toujours là une conjuration permanente. Ils faisaient à présent courir le bruit que le Comité de Sûreté générale s’était déclaré contre le Comité de Salut public, et Saint-Just contre Robespierre. On entendit même des colporteurs de journaux annoncer à pleine voix : Grande arrestation de Robespierre. Ces rumeurs, ces tiraillements, ces incertitudes désorientaient dangereusement les honnêtes sans-culottes. Enfin, une seconde note envoyée par l’agent de Bâle faisait état de l’inquiétude régnant parmi les émigrés, anéantis à la nouvelle « d’un coup d’État en France et de la proclamation de Louis XVII ». (En effet, la royauté rétablie par un protecteur ou un régent eût ruiné leurs espoirs. Ils désiraient voir Louis XVII sur le trône, oui, mais avec son oncle comme régent, jusqu’à ce qu’il pût gouverner lui-même.) Dans les deux Comités, chacun sentait combien le trouble résultant de ces dissensions au sein du gouvernement était périlleux pour la république. Malgré toutes les antinomies, il fallait absolument s’efforcer de s’entendre. On se rendit aux instances de Saint-Just, de Couthon, de Le Bas. On décida de tenir, le 4 au soir, une séance commune, à laquelle on inviterait Robespierre.
    Claude, lui, avait pris en même temps une autre décision. Au fond, Maximilien, pas plus que Danton, n’était vraiment républicain. Démocrate, oui, au moins de principes – encore que sa façon de concevoir la démocratie fût singulièrement tyrannique. Si, au moyen du petit Capet, il pouvait établir une forme de monarchie constitutionnelle, démocratique et déiste, il n’aurait pas le sentiment de trahir la Révolution. L’Angleterre, on le savait, souhaitait voir un régime de ce genre, un peu semblable au sien, s’instaurer en France. Bien qu’ils s’apprêtassent, signalait un agent de Berne, à débarquer sur les côtes vendéennes avec un corps d’émigrés commandé par Monsieur, les Anglais ne mettaient aucune chaleur à soutenir les Princes. Ils les abandonneraient allègrement pour s’accorder avec Robespierre sur les bases susdites. À en croire Sénar, Maximilien aurait eu déjà des entrevues, dans la maison d’un intermédiaire, avec l’agent Vaugham revenu à Paris. Ainsi, à l’égard de Londres comme de Vienne, le petit Louis XVII était un élément capital de négociation. Grâce à lui, on pouvait terminer la guerre.
    De toutes les trahisons envers la France et la république, aucune n’eût été pire que de négocier. Dans un temps où la coalition se disloquait, où les armées avançaient victorieusement sur tous les fronts, où les soldats de la liberté délivraient de l’antique esclavage les Belges, bientôt les Bataves, la guerre ne devait se terminer que par la capitulation pure et simple des tyrans. Traiter avec eux quand ils étaient déjà vaincus, laisser l’ambitieuse maison d’Autriche régenter l’Europe, se soumettre de nouveau à sa politique, recevoir un roi de sa main, était-ce pour en arriver là que l’on avait guillotiné « l’Autrichienne » ? Était-ce pour en arriver là que des milliers de citoyens avaient péri sur les champs de bataille et sur l’échafaud ? Dans son aveuglement, Robespierre prétendait défendre la liberté, mais il ne défendait que ses idées à lui. À ses certitudes, à sa vérité personnelle, il sacrifierait la Révolution, la république, la nation, la délivrance des peuples européens. Tout-puissant à la Commune, après Hébert et Chaumette, il tenait à son tour en main le petit prisonnier du Temple, dont nul, au Comité de Salut public, ne se souciait. Grave tort. Il importait de savoir, tout d’abord, dans quel état se trouvait ce garçon, et ensuite de l’enlever aux Robespierristes.
    Claude avait donc décidé de se rendre compte par lui-même, discrètement, puis de faire aussitôt rapport aux deux Comités en demandant que la garde du jeune Capet fût retirée à la Commune et confiée au Comité de Sûreté générale. Le fils de Louis XVI n’appartenait pas à la Commune de Paris mais à la nation. En tant que municipal, Dubon pouvait le plus normalement du monde se présenter au Temple. Il prit néanmoins la précaution de se faire signer un ordre de visite par trois de ses collègues, opposants comme lui.
    Rien n’avait

Weitere Kostenlose Bücher