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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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disperser. L’escorte comprenait deux frégates et un vaisseau : le Vengeur du Peuple, un 74 qui naviguait majestueusement en tête, laissant aux deux bâtiments plus légers le soin de la police. Deux, c’était peu pour ce métier. De plus, l’autre frégate, mal servie, ne se montrait guère meilleure manœuvrière que les marchands. Bien beau, la démocratie, mais quand tout le monde se considère comme maître à bord, il n’y a plus de navigation possible. Le capitaine Marvejol ne manquait point de travers, il était en outre fort loin d’avoir inventé la poudre. Du moins maintenait-il sur la République, à grands coups de gueule, voire de poings, la discipline indispensable. Jean Bon Saint-André ayant froidement fait guillotiner comme ennemis du peuple un chaloupier et un calfat qui prétendaient déposer le capitaine, personne ne pipait maintenant : la République était le navire le plus allant de toute la division légère.
    Tant qu’on eut le brick en remorque, Fernand l’observa curieusement. Tiré au bout du câble, l’ Espoir embardait parfois, comme n’y eût point manqué en la circonstance un méchant caboteur. « Qu’est-ce que je te disais, citoyen ! » remarqua le commandant. Le jeune officier ne répondit pas, ces zigzags lui semblaient non point maladroits, mais au contraire très habiles. Ils s’accomplissaient toujours sans mettre la remorque en danger. Pourtant ce n’était pas facile : les vagues devenaient vicieuses et le temps vraiment mauvais. Le premier lieutenant, prenant le quart, demandait au commandant la permission de ferler les voiles hautes. Quand on eut rejoint le convoi, que le brick, filant le câble, remercia par signaux, il ventait grand frais et tout annonçait la tempête. Le Vengeur profitait de l’ultime clarté pour signaler à tout le monde de prendre la cape.
    Le mauvais temps atteignit son plein à l’aube. Pendant la nuit, les Brissotins, sauf Barbaroux que tout laissait indifférent, n’avaient pas fermé l’œil. Ils s’attendaient à s’engloutir avec l ’Espoir aux trois quarts couché sur le flanc et s’élevant sur des montagnes d’eau pour redescendre vertigineusement, l’instant d’après. Des cataractes s’écrasaient sur le pont. Tout craquait, gémissait. Le capitaine ne s’inquiétait pourtant pas le moins du monde.
    « Le seul risque, disait-il, c’est un abordage, mais on veille avec soin. Quant au temps, il reste parfaitement maniable. Je n’aurais pas pris la cape si le chef du convoi ne l’avait ordonné pour éviter que l’on ne se disperse. »
    À six heures du matin, au plus fort de la tempête, Mac Dougan redescendit en annonçant qu’elle se calmerait sous peu. « J’ai une bonne nouvelle à vous communiquer : quelques poltrons se séparent du convoi pour s’abriter à La Rochelle. Le Vengeur du Peuple a signalé à la République de les suivre. J’en suis fort aise, car ce petit lieutenant que j’ai vu hier n’est pas dupe, je crois bien. »
    Fernand perdit ainsi contact avec le brick, à grand regret. Il s’y intéressait de plus en plus. Il eût donné un quartier de la solde qu’il touchait rarement, pour savoir ce que manigançait ce petit navire. Sous le ciel en train de s’éclaircir, on l’apercevait encore, très en avant, près de doubler le Vengeur. À celui-ci le soin, mais il n’y avait pas grand-chose à espérer de ce gros pataud commandé par un certain capitaine Renaudin auprès duquel le citoyen Marvejol faisait figure d’aigle.
    « Je gagerais, dit Fernand au lieutenant en second, que nous ne reverrons pas le numéro 18. Il s’esquivera au moment d’entrer dans la Gironde.
    — Il y aurait de la peine.
    — Ta, ta, ta ! je ne le crois point. »
    Le capitaine Mac Dougan avait eu raison : à midi, le ciel était nettoyé, la mer simplement houleuse. On arrivait par le travers de l’île d’Oléron. Deux fois déjà, tandis que le Vengeur et la seconde frégate se donnaient un mal du diable pour rassembler le convoi dispersé par la tempête, le vaisseau, hissant le numéro du brick, lui avait intimé l’ordre de rentrer de la toile. Mac Dougan ne manquait pas d’obéir, mais en gardait assez pour gagner sournoisement vers la pointe d’Arvert. À la troisième fois, le gros 74 perdit patience et appuya l’ordre d’un coup de canon. Il fallut obtempérer. D’autant que l’équipage, furieux contre le capitaine, courait de lui-même aux bras de vergues pour

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