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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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entretinssent une équivoque, et il le dit fermement : « On a supposé qu’en accueillant les offrandes civiques l’Assemblée avait proscrit le culte catholique. Non, elle n’a pas fait cette démarche téméraire, elle ne la fera jamais. »
    C’était bien le maître qui parlait, sur un ton sans réplique, engageant de la sorte la Convention, la rangeant par avance sous son autorité. La déclaration ne plaisait pas trop à Claude et il lui déplaisait encore plus d’entendre Maximilien proférer des bourdes de ce calibre : « L’athéisme est aristocratique. L’idée d’un Grand Être qui veille sur l’innocence opprimée et punit le crime est toute populaire. » Pendant des siècles, le despotisme, l’aristocratie de la naissance ou de la fortune avaient spéculé sur cette trop naïve croyance du peuple puéril, pour le maintenir en esclavage. Vous qui peinez afin d’assurer notre richesse, notre luxe et nos beaux loisirs, consolez-vous : Dieu vous donnera dans la vie éternelle tout ce dont vous manquez. Priez donc et nous laissez jouir en paix des biens de ce monde. Le trône et l’autel : les deux piliers de l’esclavage. Tant que l’un des deux resterait debout, la Révolution ne serait pas faite.
    Des Jacobins de la classe indigente approuvaient Robespierre. Il en prit acte. « Le peuple, les malheureux m’applaudissent, si je trouvais ici des censeurs, ce serait parmi les riches et parmi les coupables. » Claude faillit bien l’interrompre brutalement. Mais non, il fallait supporter ces sottises, si rudes fussent-elles à avaler, parce que ce pauvre Maximilien voyait juste sur d’autres points, qu’il était le seul homme capable de faire échec à l’anarchie. Il fallait supporter sa crédulité jusqu’au jour où la république serait assez solidement assise pour qu’on pût la pousser, sans risque pour elle, dans une nouvelle étape.
    D’ailleurs, s’il divaguait ainsi, Robespierre ne perdait pas de vue son but. Il l’atteignit soudain en revenant d’une façon foudroyante sur « les contre-révolutionnaires soudoyés par l’étranger, qui se servent du fanatisme pour donner à la Révolution le vernis de l’immoralité : caractère de nos lâches et féroces ennemis ».
    Là-dessus, il fit voter le principe d’une épuration périodique de la Société. Menace permanente suspendue non seulement sur Hébert mais sur tous ceux qui dévieraient de la ligne jacobine, c’est-à-dire désormais, robespierriste.

X
    « Enfin, te voilà ! »
    Danton s’était décidé à rentrer. Toutes les lettres demeurant inutiles, ses amis avaient fini par envoyer son neveu Mergez le chercher. Dans la campagne champenoise où les feuilles jaunes des peupliers jonchaient les chemins, le jeune homme l’avait trouvé en pleine partie de pêche avec des compagnons villageois, sur les bords de la Barbuise, et fort peu enclin à regagner Paris. Mais il le fallait absolument. Fabre, Camille l’en suppliaient : ses ennemis étaient en train de le perdre, les pires rumeurs circulaient à son sujet, on le disait sorti de France, émigré en Suisse avec le fruit de ses rapines. Sa jolie Louise déjà dans la chaise de poste, il avait donné un dernier baiser à sa mère, un dernier regard à sa longue maison basse, à ses bois, ses prés où serpentait le Pleuvard déjà couleur du ciel d’hiver, et il était parti en soupirant.
    Cour du Commerce, dans le grand salon au papier arabesque, aux fauteuils de satin vert, ses amis l’accueillaient avec des visages anxieux. Le dos à la cheminée où Marie Fougerot avait allumé un bon feu, il les regardait tous. Fabre, l’avantageux, semblait vieilli de dix ans. Camille avait perdu sa mine insouciante. L’athlétique Delacroix, sa superbe. Le gros Legendre était morne et réticent. « Ah çà ! dit Danton, que signifient ces têtes d’enterrement ? Ne puis-je donc rester un mois en congé sans que l’on me donne pour mort ou en fuite ? » Un mois en congé régulier, oui, mais en réalité cela en faisait près de trois qu’il avait abandonné toute activité politique suivie.
    « Mais… mais, malheureux, balbutia Desmoulins, te… te rends-tu compte que Robespierre est à présent le maître incontesté des Jacobins, de la Convention qui l’a a… acclamé l’autre jour ?
    — Eh ! peu m’importe Robespierre ! Je ne suis pas de ceux qu’il puisse dévorer. Ne me connaissez-vous plus ?
    — En attendant, lui

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