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Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Titel: Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Claude Pomonti
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employé à l’égard des manœuvres. L’homme finit par lui dire qu’il ne veut plus le laisser sous-louer son cyclo-pousse. Pham Xuân Ân a beau lui expliquer pourquoi il le fait de nuit, l’autre ne veut rien entendre et lui reprend le cyclo-pousse. L’explication : quelques jours auparavant, Pham Xuân Ân a transporté le fils d’un ami de sa famille et le petit a rapporté le fait à son propre père, qui en a informé le père de Pham Xuân Ân. Malade, celui-ci en a beaucoup souffert. Il pense que son fils est tombé bien bas pour exercer ce métier, sans réaliser que Pham Xuân Ân se sacrifie pour aider sa famille.
    S’étant rendu compte de la situation, un ancien professeur du jeune homme lui propose alors d’enseigner le français dans un cours de rattrapage privé. Pham Xuân Ân accepte volontiers l’offre et se retrouve face à des élèves dissipés, dont la moyenne d’âge est de dix-huit ans alors que lui-même n’en compte qu’un peu plus de vingt. Pour les calmer, il offre de leur enseigner, gratuitement après les cours, les arts martiaux. Le stratagème fonctionne.
    À cette époque, les Saigonnais vivent les lendemains frustrants de la grande espérance de 1945. Pour les Français, l’humiliation – et les malheurs – ont culminé avec le coup de force japonais du 9 mars. Philippe Franchini, qui a vécu cette période, cite la parabole d’un vieux sage de My Tho : « Il y avait autrefois devant nous une porte si lourde et, surtout, si impressionnante que personne n’osait même tenter de la pousser. Personne ou presque personne, car des audacieux s’y étaient brûlé les doigts. Un jour, un étranger est venu et l’a brutalement ouverte. Depuis lors, personne ne craint plus de l’ouvrir, ni de la franchir. » Mais c’est le Viêt Minh, et non les protégés locaux de Tokyo, qui remporte la mise un peu plus tard, lors de la capitulation de l’empire du Soleil-Levant.
    Empereur d’Annam, Bao Dai abdique le 25 août, préférant, de façon un peu grandiloquente, être « simple citoyen d’un pays indépendant plutôt que souverain d’un peuple esclave ». Il y a eu de graves bavures un peu partout, qui révèlent une « haine » accumulée depuis longtemps. Le 2 septembre 1945, alors que Hô Chí Minh proclame l’indépendance à Hà Nôi, le Viêt Minh organise un vaste défilé dans le centre français de Sài Gòn, y compris rue Catinat. Dans la soirée, des éléments incontrôlés se livrent à la vengeance ou à des règlements de comptes avant que le Viêt Minh y mette un frein.
    Dans l’esprit des Vietnamiens, après plus de quatre années d’occupation japonaise, l’Indochine française a vécu. La mentalité populaire vietnamienne, a observé le sociologue Paul Mus, est « scrutatrice ». Le message a été perçu. Fondée en 1802, son prestige usé par des années de collaboration avec les autorités coloniales françaises, la dynastie des Nguyên s’est effondrée. Deux mots, indépendance et unité, ne semblent pas négociables pour les Vietnamiens. Le mandat du Ciel se reporte sur des forces nouvelles mal connues d’une société française locale qui considère le Viêt Minh comme le diable.
    L’accord entre alliés du 2 août 1945, passé à Potsdam à l’insu des Français, prévoit que les Japonais seront désarmés dans le sud du Viêt Nam par les Britanniques et dans le Nord par les Chinois du Kuomintang. Mais les Français s’entendent avec les Britanniques pour remettre pied dans le Sud et des troupes commandées par le général Philippe Leclerc de Hauteclocque y rétablissent progressivement l’autorité française avant de se rendre sur les Hauts-Plateaux et dans le Nord.
    L’espérance laisse place aux désillusions ou à la colère. Si la partie est jouée, il va falloir attendre ou se battre pour l’emporter. Dans la mentalité populaire, l’inconnue est le temps qu’il faudra pour y parvenir, non le résultat. Concédée dès le 24 mars 1945 par le général de Gaulle, la libéralisation de l’Indochine dans le cadre d’une Union française ne fait pas l’affaire. La reconnaissance, en juin 1948, d’un État du Viêt Nam associé, dont la direction est confiée à un Bao Dai discrédité, est interprétée comme une manœuvre visant à isoler le Viêt Minh qui se bat contre le corps expéditionnaire français. L’année suivante, l’armée de Máo Zédong s’assure le contrôle de la Chine

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