Une histoire du Canada
pourrait-il qu’il y ait un trou dans la côte du Labrador ? se pourrait-il que le continent septentrional ne soit qu’un isthme, comme Panama, et que le Pacifique se trouve juste derrière ?
La possibilité demeure également que le territoire lui même vaille la peine qu’on s’en empare. Les espagnols ont trouvé de l’or au Mexique et au Pérou. Les Français et les anglais ne pourraient-ils les imiter ? si le passage du nord-Ouest se trouvait juste derrière la courbe suivante dans la côte, l’or se trouverait juste derrière le cap suivant. Ce doit être vrai ; sinon, à quoi tout cela aurait-il servi ? Les rivages du nord du continent sont froids, rocailleux et battus par les vents – « la terre que dieu donna à Cayn », pour reprendre la phrase célèbre de Jacques Cartier. Cette terre « n’a aucune valeur », a affirmé un espagnol au roi Charles ier en 1541. Laissons-la aux Français.
Ce conseil est tout à la fois sensé et peu perspicace. Le continent septentrional est bel et bien aride et éreintant et, pire que tout, glacé.
Pourtant, comme nous l’avons vu, certaines parties de l’amérique du nord rapportent déjà des profits, surtout la zone de pêche à la morue de terre-neuve. il arrive aux pêcheurs de débarquer sur le rivage et de se déployer à la recherche de bois ou de viande pour varier leur menu. ayant trouvé de la viande, ils trouvent aussi des fourrures, qu’ils rapportent en europe. La fourrure nord-américaine suscite d’abord la curiosité, mais celle-ci devient rapidement rentable. La fourrure est un produit de luxe en europe occidentale, où elle sert à décorer les robes des riches. transformée en feutre, elle sert dans la confection de chapeaux. La fourrure du castor nord-américain se révèle tout particulièrement utile et est très prisée. C’est ce rongeur peu avenant, avec ses dents oranges et sa queue écailleuse, qui finira par fournir aux européens le prétexte nécessaire pour venir faire du commerce dans le territoire qui deviendra le Canada, puis s’y établir.
s’ils ne pouvaient compter que sur leurs propres efforts, saisonniers et sporadiques, les européens ne feraient pas beaucoup de traite de fourrures.
Pour commercer, ils ont besoin de fournisseurs autochtones. C’est ainsi que 23
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s’établit un partenariat entre les marchands européens (surtout français) et les chasseurs amérindiens, ravis d’échanger leurs castors, ressource inépuisable en apparence, contre des outils en fer, des couteaux en acier et des armes à feu. Les amérindiens qui vivent le long de côtes sont avantagés car ils contrôlent l’accès aux européens qui, eux, ne s’aventurent pas à l’intérieur des terres.
Les deux parties profitent de ces échanges, si l’on exclut le coût des maladies que les commerçants apportent avec eux d’europe pour les communiquer aux indigènes. Pour les commerçants, la plus grande partie du dur labeur est faite par les indigènes, universellement connus sous le nom d’indiens en raison de la vieille croyance erronée selon laquelle les amériques se trouvent en bordure des îles aux épices de l’asie. Les marchandises échangées sont assez bon marché : du fer, du laiton ou des vêtements ou, rapidement, de l’alcool, vers lequel de nombreux indigènes se découvrent un attrait. Le métal – le cuivre – n’est pas inconnu des indigènes de l’est du continent nord-américain, mais il est rare et toujours mou. Les indigènes lui préfèrent le laiton, le fer et l’acier, que seuls les européens peuvent fournir.
dans la vallée du saint-Laurent, ce sont les Français qui prédominent. Leur intérêt envers les terres explorées et revendiquées pour la France par Jacques Cartier ne s’est pas démenti, mais ils sont pratiquement impuissants tant que la France est déchirée par les guerres entre catholiques et protestants. enfin, les guerres cessent en 1598, laissant sur le trône un protestant converti au catholicisme, Henri iv, qui pratique une politique de tolérance à l’endroit des catholiques et des protestants.
L’amérique bénéficie rapidement d’un regain d’intérêt en France.
Les gouvernements européens du début du dix-septième siècle manquent de ressources et de capacité pour envisager la colonisation.
dépourvus de grandes armées et de marines permanentes, ainsi que de compétences administratives uniformes, ils se fient à des
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