Une histoire du Canada
états-Unis est plus important, proportionnellement, que l’investissement américain au Canada, les investisseurs canadiens au sud de la frontière obtiennent une certaine protection supplémentaire.
Une des clause de l’aLena, le chapitre 11, retient énormément l’attention. elle permet à des investisseurs non nationaux (ce qui, au Canada, signifie des investisseurs des états-Unis et du Mexique) d’intenter des actions en dommages-intérêts au cas où la réglementation gouvernementale ferait obstacle à leurs profits probables. des investisseurs des trois pays y ont recours pour obliger les gouvernements à leur verser des dédommagements en vertu de règlements environnementaux ou à abroger ces règlements. Fait paradoxal, les entreprises nationales ne peuvent avoir recours à cette clause, réservée aux investisseurs des deux autres pays signataires de l’aLena. Cette pratique surprend au moins un des négociateurs initiaux de l’aLena. Comme le sous-négociateur en chef pour les états-Unis l’exprimera ultérieurement au cours d’une entrevue, 16•marasmeeTexplosiondanslesannées1980
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« Je comprends qu’on puisse prendre cette partie du texte en particulier et qu’en somme, les entreprises peuvent dire : si vous me soumettez à une réglementation de façon à réduire mes profits, remboursez-moi. Je ne suis pas persuadé que c’était ça l’idée […]15 ».
Les conséquences de l’accord de libre-échange initial et de l’aLena sont moins désastreuses pour l’économie canadienne que ses opposants l’ont craint et sans doute moins évidemment favorables que l’auraient souhaité les partisans du libre-échange. Les négociants en vins de la Colombie-Britannique et de l’Ontario s’en réjouissent puisque leurs vins, non seulement subsistent mais prospèrent. La concurrence pourrait aussi se révéler profitable. « en 1989, j’ai déclaré en public que le libre-échange aurait des effets dévastateurs sur notre entreprise », déclare au Washington Post un fabricant de meubles ontarien, « en privé, j’aurais affirmé qu’il fallait remettre notre secteur sur pied, ce qui était vrai. Le secteur va plutôt bien maintenant [en 1999]. sans le libre-échange, nous n’en serions pas là. » toutes les entreprises n’ont pas cette chance ; le tiers des fabricants de meubles ontariens ne parviennent pas à survivre. dans certains cas, des entreprises américaines ferment leurs entrepôts ou leurs succursales au Canada : désormais, le marché canadien peut être desservi depuis le sud de la frontière. Mais, dans l’ensemble, les échanges et les exportations sont en croissance, de sorte qu’en 1998, « l’incroyable pourcentage de 40 pour cent du PiB [de l’Ontario] » est exporté aux états-Unis, comparativement à 20 pour cent en 1989. On peut en dire autant du Québec, qui connaît une « énorme croissance » de ses exportations aux états-Unis. Pourtant, l’emploi dans le secteur manufacturier subit une chute de 10 pour cent16.
L’aLe et l’aLena ne ramènent pas l’ordre dans les échanges commerciaux canado-américains ni n’en augmentent la prévisibilité, surtout en raison du mécanisme de règlement des différends. et, en raison du Chapitre 11 de l’aLena, ils créent de l’incertitude également alors que les gouvernements et la classe politique des trois pays discutent de la façon, et de la possibilité, de continuer à exercer le pouvoir nécessaire pour mettre en vigueur des éléments comme les normes sur la pollution, ou d’exploiter des entreprises gouvernementales comme les postes, qui feront d’ailleurs l’objet d’une contestation du Chapitre 11 au Canada.
Les commissions de règlement des différends ont leurs limites.
elles peuvent interpréter les lois en vigueur, mais ne peuvent en aucun cas restreindre la capacité d’adopter des lois des assemblées législatives ou parlements souverains. Le cas le plus notoire mais non le seul est celui du bois d’œuvre résineux canadien. dans les années 1980, le secteur de la construction aux états-Unis affiche une forte dépendance envers les exportations canadiennes de bois d’œuvre résineux, récolté sur les terres provinciales du Canada et expédié au sud de la frontière pour combler 444
UnE HIsTOIRE dU Canada
l’appétit des banlieues américaines (il s’agit en général de pin et d’épinette).
Les provinces canadiennes ont recours à divers systèmes pour
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